Les écoliers n’ont pas piscine, la grève n’en finit pas : le ton monte dans cette ville bretonne (OF.fr-9/12/24)

Les maîtres-nageurs de la piscine communautaire Aquarive à Quimper (Finistère) sont en grève perlée depuis fin septembre. Au regard d’annulations répétées, l’Éducation nationale a décidé de suspendre les séances scolaires en ce début décembre 2024. (Photo d’illustration). | ARCHIVES OUEST-FRANCE

Alors que l’Éducation nationale suspend les séances de natation en raison des conséquences de la grève des maîtres-nageurs, Quimper Bretagne occidentale hausse le ton. Ce lundi 10 décembre 2024, la collectivité annonce remettre en question certains avantages sociaux des agents et réfléchit confier la gestion de l’équipement à un privé.

Par Nelly CLOAREC.

Voilà un peu plus de deux ans et demi que les maîtres-nageurs sauveteurs (MNS) des piscines de Quimper (Finistère) mènent une grève perlée. Les deux parties n’arrivent pas à trouver une entente autour de questions d’organisations internes comme il peut s’en poser entre un employeur et ses salariés. En ce début décembre 2024, Quimper Bretagne occidentale (QBO) change de braquet et hausse le ton. La collectivité annonce, ce lundi 9 décembre 2024, être prête à revenir sur des avantages sociaux, voire à accorder la gestion de l’équipement à un prestataire privé.

L’Éducation nationale dit « stop »

Les séances de natation scolaire à la piscine Aquarive sont suspendues à partir de ce lundi 9 décembre. Le courrier, signé de l’Éducation nationale, est arrivé sur le bureau de la présidente, il y a quelques jours. La raison ? « Les conditions trop incertaines de l’accueil des scolaires et des enseignants à Aquarive. » Les séances reprendront « quand les conditions seront réunies », précise l’institution.

« Le savoir nager est attaqué »

« Le savoir nager est la priorité numéro un de notre plan piscine, a rappelé à la presse Isabelle Assih, la présidente socialiste de QBO, ce lundi, en amont d’une rencontre avec les maîtres-nageurs en grève perlée depuis fin septembre. Or, cette priorité est à terre. » Elle détaille : « Cela se manifeste par dix-huit séances annulées sur trente-trois pour les écoles publiques. Six séances sur dix annulées pour l’école Saint-Charles. L’Éducation nationale annule le deuxième cycle de natation, c’est inédit. Je la comprends. » Christelle Quéré, conseillère communautaire et adjointe aux sports à Quimper appuie : « Ces séances de natation sont essentielles pour garantir la sécurité des enfants qui vivent en bord de mer. »

« Séance annulée une fois les enfants douchés »

La présidente dit avoir reçu plusieurs témoignages écrits. Ils décrivent des situations vécues, Isabelle Assih en cite quelques-unes : « Des enseignants apprennent que la séance est annulée alors qu’ils sont avec leurs écoliers dans le bus. Parfois, ils l’apprennent en arrivant à la piscine, voire une fois que les enfants se sont changés et douchés. » Daniel Le Bigot, vice-président en charge des piscines, rebondit : « Nous ne remettons pas en cause le droit de grève. Mais la collectivité a une obligation morale et réglementaire d’assurer la continuité du service public. »

Quelle méthode maintenant ?

Le travail autour du protocole sur les risques psychosociaux est au point mort ? La collectivité va missionner un cabinet pour mener un audit organisationnel. Qualité de vie au travail mais aussi temps de travail, contraintes, obligations… seront passés à la loupe. Il sera engagé entre février et juin : « Ma boussole est qu’on puisse proposer un accueil satisfaisant à la rentrée 2025 », espère la présidente.

Qu’est-ce qui peut être revu ?

À l’issue d’un précédent conflit, en 2010, un protocole d’accord avait été signé entre les MNS et la collectivité. « Ce protocole offre, sur une base de 35 h, des conditions particulièrement avantageuses aux MNS. Les plus avantageuses de tous les agents de la collectivité. Je le remets en question », livre Isabelle Assih. Pour exemple, quarante-cinq minutes d’aquagym sont reconnues comme une heure et demie de travail. Assurer une heure de formation au BNSSA ou une heure d’aquabébé, idem. Ce protocole intègre dans le planning hebdomadaire trois heures de préparation pédagogique, une heure de préparation physique sur site.

Des fonctionnaires qui deviendraient salariés du privé ?

« Cela n’est pas notre projet d’envisager une délégation de service public. Mais je ne me l’interdis pas », expose la présidente. Un propos qui arrive après qu’elle a affirmé que tout fonctionnait à la piscine de Briec. Or Aqua Cove est gérée par une entreprise privée pour le compte de la collectivité. Cette dernière définit les orientations, les tarifs… L’ensemble du personnel dépend de l’entreprise privée. Si cette option était retenue, il serait proposé aux agents de travailler pour le prestataire. L’agent peut refuser et demander à être reclassé au sein de la collectivité. S’il refuse, la collectivité peut être amenée à se séparer de l’agent.

Clément Marcadet, maître-nageur sauveteur, agent de Quimper Bretagne occidentale depuis huit ans. | OUEST-FRANCE

« On tombe des nues et on poursuit le mouvement »

Ils ont reçu la date et l’heure de rendez-vous le matin-même. Ce lundi, l’équipe des maîtres-nageurs sauveteurs titulaires, agents de Quimper Bretagne occidentale (QBO), a écouté la présidente Isabelle Assih. Alors, avantagés par rapport aux autres agents ? « Non, on n’est pas privilégiés, réagit Clément Marcadet, membre du SNPMNS. Ces avantages, si on peut les nommer ainsi, nous les avons obtenus et ils sont liés à notre métier. »

La menace d’évoluer vers une délégation de service public ? « On tombe des nues, c’est étonnant car c’est souvent plus coûteux qu’une gestion directe et pas forcément très bon pour les administrés. » Calmement, il précise : « On est tous seuls dans le bateau : le directeur des piscines a démissionné il y a quelques mois, la cheffe de bassin vient de démissionner également. Notre directeur des sports se retrouve tout seul. »

Les grévistes déplorent se « trouver face à un mur, une porte fermée. Nos suggestions ne sont pas prises en compte. » L’état dégradé du bâtiment, dont ont conscience les élus, attachés, durant ce mandat, à rénover l’autre piscine, celle de Kerlan Vian (5 millions), revient souvent dans les échanges.

Ce lundi, les deux syndicats qui soutiennent les maîtres-nageurs (le syndicat professionnel et la CFTC de QBP) annoncent que le mouvement se poursuit : « Le préavis de grève se poursuit pour les trois prochains mois. »

Pollution, état du bâtiment, management : quelles revendications depuis deux ans et demi

Deux ans et demi : cela fait deux ans et demi que des grèves perlées, à l’initiative de maîtres-nageurs, soutenus par deux syndicats dont un professionnel (1), perturbent l’activité de la piscine Aquarive. Il s’agit d’un conflit employeur-agents sur des sujets d’organisation de travail, de qualité de vie au travail qui ne trouve pas d’issue concrète.

Au fil des mois, des rencontres et des échanges avec leur employeur, Quimper Bretagne occidentale, les revendications évoluent, s’étoffent. En mars 2022, les maîtres-nageurs mettaient en avant leur santé, pointant le taux de chloramines dans l’eau et dans l’air. Ils souhaitaient, et souhaitent toujours, que la collectivité reconnaisse la sujétion « agents chimiques » et leur accorde, de « façon symbolique, sept heures annuelles ». Ils ont ensuite dénoncé « un management répressif », que récuse la collectivité. Ils dénoncent également l’état de dégradation de l’équipement.

(1) Le syndicat national professionnel des maîtres nageurs sauveteurs

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Source: https://www.ouest-france.fr/economie/social/les-ecoliers-nont-pas-piscine-la-greve-nen-finit-pas-le-ton-monte-dans-cette-ville-bretonne-ed67f4bc-b61a-11ef-92cc-87419da1008e

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