
La Commission européenne veut taxer à 50 % les importations d’acier. Son vice-président, Stéphane Séjourné, espérait en échange une annonce d’investissement à ArcelorMittal Dunkerque. Raté.
Par Ludovic FINEZ.
« On n’est pas des terroristes ! » Avec sa chasuble rouge et son casque recouvert d’autocollants CGT, Gaëtan Lecocq ne comprend pas comment un rassemblement de quelques dizaines de salariés devant les bureaux de l’usine d’ArcelorMittal Dunkerque peut susciter autant d’agitation. Une vingtaine de policiers, dont certains protégés par des boucliers, ont pris place dans le hall d’entrée, tandis que six camionnettes, gyrophares allumés, arrivent en renfort. « On veut juste saluer les invités du jour », ironise le secrétaire du syndicat CGT.
Ce vendredi 10 octobre, l’usine accueille du beau monde : le président d’ArcelorMittal France, Alain Le Grix de la Salle, le vice-président à l’industrie de la Commission européenne, Stéphane Séjourné, le président de la Région Hauts-de-France, Xavier Bertrand, le maire de Dunkerque Patrice Vergriete… La visite intervient trois jours après l’annonce par la Commission européenne d’un plan « visant à protéger l’acier européen face aux pratiques commerciales déloyales et aux surcapacités mondiales », comme le présente la préfecture du Nord dans son invitation à la presse. La Commission propose ainsi de doubler les droits de douane pour les importations européennes d’acier, en les portant à 50 %, et de passer de 20 % à 10 % la part des importations qui y échapperont. Exactement ce qu’ArcelorMittal a réclamé à plusieurs reprises.
Des lettres de licenciement au pied du sapin ?
Ce qui n’empêche pas le plan de plus de 600 licenciements, annoncé en avril, de se poursuivre. À Dunkerque, « plus de 200 postes dans les fonctions supports » sont concernés, rappelle Gaëtan Lecocq. « Les lettres de licenciements devraient arriver juste avant les cadeaux de Noël », prédit-il. « Seront virés ceux qui ont des problèmes de santé ou qui ont une grande gueule et sont syndiqués à la CGT », s’emporte le délégué syndical. « Mon emploi fait partie de ceux supprimés », confie Aline, analyste informatique et déléguée CGT, 23 ans d’ancienneté dans l’usine. « Nous avons enregistré 88 démissions (sur 3 500 emplois, dont 3 244 CDI, N.D.L.R.) en septembre, du jamais vu chez nous ! », souligne-t-elle. Le taux d’arrêt maladie, d’un peu moins de 5 %, grimpe à 8 % au service achats et à 10 % au service financier, tous deux particulièrement visés par le plan de la direction.
Délocalisation en Inde et au Brésil ?
« L’objectif de Mittal, c’est de quitter le Vieux Continent, la France, l’Espagne, l’Allemagne, la Belgique, tranche Gaëtan Lecocq. En Inde et au Brésil, ils font 300 euros de bénéfice à la tonne, contre cinquante en France. Nous gagnons de l’argent, mais pas assez à leurs yeux. » Il en veut pour preuve l’annonce, faite il y a plusieurs années mais aujourd’hui oubliée, de 1,8 milliard d’euros d’investissement – dont 800 millions d’euros de promesses d’aides publiques – pour construire un nouveau haut-fourneau et deux fours électriques, afin de produire de l’acier « bas carbone ». Quant à la ligne électrique de tôles dans l’usine voisine de Mardyck – un investissement de plus de 500 millions d’euros -, elle ne tourne toujours pas, alors qu’elle aurait dû démarrer en juin 2024.
La table ronde « s’est mal passée »
La visite de l’usine se conclut par une table ronde qui, de l’aveu de Xavier Bertrand, « s’est mal passée ». L’ambiance tendue se prolonge lors de la conférence de presse qui suit. Certes, pour la direction d’ArcelorMittal, le plan européen va « dans le bon sens » et nécessite une « application urgente ». Mais elle ajoute aussitôt qu’elle attend, pour contrer la « concurrence déloyale », la réforme du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, promise pour fin 2025.
C’est à cette seule condition que l’unique projet de four électrique encore évoqué à Dunkerque – un investissement estimé à 1,2 milliard d’euros – « sera présenté au comité de direction (d’ArcelorMittal) et on verra à ce moment quelle sera la décision », explique Alain Grix de la Salle. Des propos très éloignés des « engagements » et des « preuves d’amour » que Stéphane Séjourné, Xavier Bertand et Patrice Vergriete attendaient.
Même décalage avec « l’impact concret dans les Hauts-de-France », que vantait déjà la préfecture. « Nous avons fait une partie du travail, à vous de faire la vôtre », lance le vice-président de la Commission européenne, tandis que le président de Région s’emporte devant les journalistes : « Quelle est leur stratégie, industrielle ou financière ? Produire en Europe ou ailleurs ? » Depuis des mois, la CGT d’ArcelorMittal a répondu à la question, en affichant son slogan « Faire du métal sans Mittal » pour résumer sa revendication d’une nationalisation.
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Il manque la période chrétienne depuis au moins 1840
Petit coup de patte à la Russie, a-t-il enquêté pour savoir si cela pouvait être vrai? Pas de rappel de…
Bon , ce n'st pas lui qui va nous expliquer comment décroitre!
il n'a pas lu le livre de Zucman!!
Très intéressant !