
Cette fois-ci, c’est officiel. Le chef de l’Etat a annoncé lundi 26 août qu’il ne nommerait pas de Premier ministre qui porterait le programme du Nouveau front populaire (NFP). La « clarification » se poursuit.
Par Pierre VALDEMIENNE.
Après l’annonce de Jean-Luc Mélenchon que La France insoumise (LFI) ne se dispose pas à participer à un gouvernement NFP, apparaît encore plus nettement ce qui terrifie tous les tenants de l’ordre établi : le programme du NFP, à commencer par l’abrogation de la réforme des retraites.
« Le programme du NFP est immédiatement dangereux pour le pays » (François Bayrou, 25 août)
Depuis cette annonce, tous entonnent le même refrain : de François Bayrou, qui a déclaré que « Le programme du NFP est immédiatement dangereux pour le pays » (post X du 25 août), au chef de file des sénateurs Droite républicaine, Bruno Retailleau, en passant par le patron du Medef, Patrick Martin.
Mention spéciale au Rassemblement national (RN) qui, à la suite de son entretien à l’Élysée lundi 26 août, a déclaré par la voix de Jordan Bardella et Marine Le Pen : « Le Nouveau Front populaire dans son programme, dans ses mouvements, comme pour les personnalités qui l’incarnent représente aujourd’hui un danger », ajoutant : « Je ne veux pas que pendant un mois, un Premier ministre puisse par décret mettre en œuvre une politique profondément toxique et dangereuse pour les Français. »
Le journal financier l’Opinion (27 août) ne s’y trompe pas en titrant : « Contre la gauche, un front RN-Elysée » qui, conclut l’article, a pour but d’« arranger à nouveau les affaires d’Emmanuel Macron ».
Il est d’ailleurs à noter que c’est à peine une heure après le passage des dirigeants du RN à l’Élysée qu’Emmanuel Macron s’est senti l’assurance de refuser un Premier ministre issu du NFP, confirmant à tout le moins une alliance objective, voire même un accord en bonne et due forme entre Macron et Le Pen, à l’instar de ce qui s’est passé depuis 2022 pour, par exemple, empêcher le SMIC à 1 600 euros ou voter la loi « asile et immigration » à l’Assemblée.
Pour ceux qui ont voté le mois dernier pour les députés du RN en pensant à tort qu’ils sont « anti-système », on peut s’attendre à ce que, comme avec d’autres il n’y a pas si longtemps, les électeurs se sentent trahis.
« À l’orée de la rentrée, Emmanuel Macron est un peu plus embourbé dans une tempête qu’il a provoquée » (L’Opinion, 27 août)
Il faut dire que le chef de l’État a bien besoin de soutien, lui qui, pour tenter de poursuivre une politique entièrement dirigée contre les intérêts du peuple, en vient à piétiner les bases les plus élémentaires de la démocratie en refusant de se plier aux résultats des urnes. Ce faisant, c’est bien Emmanuel Macron lui-même, appuyé par tous ceux qui bandent leurs forces pour préserver l’ordre établi – à commencer par le RN – qui crée les conditions à sa destitution et son départ.
De ce point de vue, il faut reconnaître que la secrétaire nationale des Écologistes n’a pas tort lorsqu’elle déclare : « Si un président d’extrême-droite faisait exactement la même chose depuis six semaines, tous les observateurs hurleraient au scandale. »
Eh oui, décidément, on peut chercher les différences, tous ceux-là ne forment bien qu’un seul « bloc », le « bloc » de ceux qui s’arc-boutent à préserver les institutions pour que se poursuive, contre les intérêts de l’immense majorité, une politique de plus en plus rejetée.
Au même moment où ont lieu toutes ces manœuvres ahurissantes de tous bords, ce gouvernement « démissionnaire » continue de taper
Des patients sont morts tout l’été dans les couloirs des urgences et ce gouvernement « démissionnaire » répond par la suppression de 1 500 postes d’internes pour la rentrée 20241.
La presse fait état cet été de patientes atteintes de cancer du sein qui doivent payer de leurs poches plus de 2 000 euros par an pour se soigner et ce gouvernement « démissionnaire » examine à l’heure actuelle la future loi de financement de la Sécurité sociale 2025 avec plusieurs milliards d’économies portant sur les hôpitaux, les arrêts de travail et les transports sanitaires.
De plus en plus de jeunes se retrouvent livrés à eux-mêmes et ce gouvernement « démissionnaire » répond au mois de juillet par la suppression de 500 contractuels (sur 2 000) de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), provoquant une grève massive le 14 août dernier à l’appel de plusieurs syndicats, avec rassemblements devant les préfectures.
À l’instar de ce qui se passe à la PJJ, plus que jamais, l’état d’esprit de la population n’est certainement pas à accepter ou à se soumettre ; et ça, c’est la majorité effective, relative ou pas.
Il ne reste bien que les directions des confédérations pour manifestement ne pas se sentir concernées par ce qui se passe en ce moment.
Pourtant, la rentrée aidant, les sujets de mobilisation ne manquent pas : application du « choc des savoirs » à l’école, préparation d’un budget 2025 avec 25 milliards de coupes supplémentaires dans les services publics, proposition de « rapprocher le salaire net du brut » par de nouvelles exonérations de cotisations (ce qui figure aussi dans le programme du RN et qui est une vieille revendication patronale), sans oublier une nouvelle loi Travail et une nouvelle « réforme » de l’assurance-chômage…
En tout et pour tout, la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, a répondu à cette situation par une déclaration : « Nous travaillons à une rentrée offensive » par une mobilisation syndicale prévue… à l’automne ! À juste titre, cette dernière se fait railler sur les réseaux sociaux, les internautes l’informant que la rentrée, c’est le 2 septembre… Quant aux autres dirigeants syndicaux, c’est silence radio…
Samedi 7 septembre, les organisations de jeunesse soutenues par LFI appellent à une « mobilisation face au coup de force de Macron »
Cet unanimisme Macron-Le Pen contre le programme du NFP se heurte néanmoins à la réalité, que résume à sa manière Le Parisien (27 août) : « le chef de l’État sait qu’il ne peut pas imposer un nom, alors qu’il a perdu les élections législatives du 7 juillet. “Ce n’est pas évident de balayer d’un revers de main le NFP, c’est pour ça qu’il prend son temps, qu’il concerte”, décrypte l’un de ses confidents. »
Ainsi, lundi 26 août, le président de la République a exhorté les « partis de gouvernement », c’est-à-dire le Parti socialiste (PS), le Parti communiste français (PCF) et Europe Écologie Les Verts (EELV) « à coopérer avec les autres forces politiques ».
Pour ceux qui, d’habitude, sont si prompts à suivre la pente de moindre résistance et répondre aux propositions de « coalition large » ou autre « co-habitation », ce n’est aujourd’hui pas si simple… Le lendemain, ces mêmes formations politiques ont refusé de se rendre au nouveau « cycle de concertation » organisé par le chef de l’État, fustigeant à l’instar du premier secrétaire du PS, Olivier Faure, une « parodie de démocratie ». Qui s’en plaindrait ?
Dans le même temps, LFI qui a tenu ses AmFis la semaine dernière a conclu ses travaux par un appel à la censure, la mobilisation, la destitution. Samedi 7 septembre, les organisations de jeunesse soutenues par LFI appellent à une « mobilisation face au coup de force de Macron ».
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