Malgré les menaces de Trump, l’Espagne refuse de verser à l’OTAN 5% de son PIB. (Investig’Action – 02/07/25)

Par José Antonio Egido

Le président du gouvernement espagnol, Pedro Sánchez, s’est montré physiquement et symboliquement distant des autres dirigeants des pays de l’OTAN, un geste salué par une partie de la gauche, mais critiqué par la droite pro-américaine espagnole. Pour beaucoup, il s’agit d’une expression de la volonté populaire de ne pas se soumettre aux diktats de l’alliance militaire.

Les gouvernements espagnols ont toujours fait preuve d’une grande docilité à l’égard de Washington et de l’OTAN. Après le franquisme pourtant, Adolfo Suarez, président de la transition démocratique, avait refusé de reconnaître l’État d’Israël et de faire entrer l’Espagne dans l’OTAN, malgré les pressions des États-Unis. Mais il fut confronté à une tentative de coup d’État militaire le 23 février 1981. Après sa démission, son successeur, Leopoldo Calvo-Sotelo, fit adhérer l’Espagne à l’OTAN sans consulter la population.

Même le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) s’était d’abord opposé à cette adhésion. Mais il a changé de position sous l’influence de figures tirant le parti à droite, à l’instar de Felipe Gonalez, de Josep Borrell (ancien responsable des affaires extérieures de l’Union européenne) et de Javier Solana (ex-secrétaire général de l’OTAN).

En 1986, le PSOE organisait un référendum sur ce délicat sujet : 9 millions de personnes votèrent pour le maintien dans l’OTAN, 6,9 millions s’y opposèrent. Depuis, les gouvernements successifs ont témoigné une parfaite servilité à l’alliance atlantique. Mais le sentiment anti-OTAN est resté vivace au sein d’une large frange de la population.

Aujourd’hui, le Premier ministre Pedro Sánchez, membre du PSOE, refuse de porter les dépenses militaires espagnoles à 5 % du PIB d’ici 2035, comme le réclament les États-Unis. Il affirme privilégier « un investissement suffisant, réaliste et compatible avec notre modèle social et notre État providence ».

Cette décision a déclenché la colère de Donald Trump, qui a menacé l’Espagne :
« C’est le seul pays qui ne va pas tout payer, il va rester à 2 %. Leur économie se porte très bien, mais elle pourrait imploser si quelque chose de grave se produisait. Nous allons négocier un accord commercial avec l’Espagne : nous allons leur faire payer le double. Ils s’en sortent un peu tout seuls, mais à la fin ils vont devoir payer. C’est injuste », a-t-il déclaré lors de la conférence de presse consécutive au sommet de l’OTAN du 25 juin.

La réponse de la gauche espagnole a été immédiate. Les membres du gouvernement, les partis alliés, ainsi que les syndicats progressistes comme Comisiones Obreras ont soutenu la position du Premier ministre. Diana Morant, ministre de la Science, a déclaré : « Nous n’allons pas compromettre la sécurité des services publics. »
Yolanda Díaz, vice-présidente issue de la coalition SUMAR, a exprimé son refus de voir l’Espagne devenir un vassal de Donald Trump. Le dirigeant syndical Unaï Sordo a salué l’engagement de 2 % du PIB plutôt que 5, tout en s’opposant à la course au réarmement en Europe.

Cette position ferme de Pedro Sánchez a été bien accueillie par une partie importante de la population espagnole. Cependant, les principaux médias, publics comme privés, ont refusé de publier tout sondage d’opinion à ce sujet. Une autre frange de la population a été choquée par les menaces du président étasunien, alors qu’il est censé passer pour l’un des principaux alliés de l’Espagne et une figure centrale du « monde occidental libre ».

Quant aux partis de droite et d’extrême droite, ils se présentent toujours comme les grands défenseurs des intérêts espagnols. Mais ils ont évité de critiquer les menaces de Trump contre l’Espagne.

Finalement, on constate que Pedro Sanchez a regagné une certaine initiative politique en s’opposant à l’OTAN et en exprimant ouvertement son soutien à la Palestine. Le 26 juin, il a qualifié de « génocide » la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza tout en réclamant « un accès immédiat et urgent à l’aide humanitaire » dans le territoire palestinien, sous l’égide des Nations unies.

Source : https://investigaction.net/malgre-les-menaces-de-trump-lespagne-refuse-de-verser-a-lotan-5-de-son-pib/

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