
L’un gouverne, l’autre l’espère… Mais sur le fond, rien ou presque ne les sépare. Après avoir applaudi ensemble à la loi sur l’immigration, les voilà d’équerre sur la possible suppression du droit du sol à Mayotte. Flanqué de l’inévitable Ciotti qui aboie dans tous les sens.
Par Gérard BAUVERT
Dimanche 10 février, Darmanin, premier flic de France, accompagné comme d’habitude de quinze membres du GIGN pour « renforcer l’opération Wuambushu phase 2 », est arrivé à Mayotte.
La fois précédente, en août dernier, il était flanqué de 500 gendarmes et autres policiers. Ils avaient procédé à la démolition à coups de tractopelles, de matraques, et de gaz lacrymogène, à l’éradication des habitations misérables et chassé les familles qui s’y trouvait.
Il l’a assuré… il va mettre les bouchées doubles. Outre différentes annonces faites au nom de Macron, Darmanin a donc déclaré vouloir en finir avec le droit du sol à Mayotte, ce qui a fait rougir de plaisir l’extrême droite et la droite.
Les « bravos » des Le Pen et autres Maréchal
Chacun comprend qu’à une encablure des élections européennes, dans une situation d’extrême isolement de la macronie, pour ne pas dire davantage, concentrer l’attention sur l’immigration, en l’espèce sur le droit du sol, est une manière de tenter à la fois de gagner du temps et de faire obstacle à la révolte sociale présente dans tous les secteurs en saturant l’atmosphère d’une rhétorique xénophobe.
A peine Darmanin avait-il fait sa déclaration provocatrice que les uns et les autres se sont précipités devant micros et caméras pour revendiquer la paternité de cette proposition réactionnaire.
Marine Le Pen et la députée RN Laure La Valette se sont félicitées et ont rappelé que la suppression du droit du sol était dans le programme RN, ce qui est vrai. Marion Maréchal, l’amie de Zemmour, s’est écriée « bravo ». Brice Hortefeux, ex-ministre de l’Intérieur de Sarkozy, a rappelé que François Barouin avait fait cette proposition en 2005 pour l’UMP. Encore un humaniste ! il aurait pu ajouter que Pasqua, ministre de l’Intérieur de Chirac, l’avait fait 10 ans auparavant.
Après Mayotte, la Seine-Saint-Denis ?
Quant à Yves Thréard, éditorialiste du Figaro (12 février), il pose benoîtement la question : « A Mayotte comme partout en France, pourquoi l’attribution de la nationalité serait un dû ? » Hortefeux a répondu que ce qui était prévu à Mayotte devrait l’être également en Guyane, en raison la frontière avec le Suriname, et aussi en Martinique, en raison de la proximité avec Sainte-Lucie, de la crise en Haïti…
Bref, à quand la Seine-Saint-Denis, le Nord, les Bouches-du-Rhône ? On le comprend aisément, la principale différence entre Macron et Le Pen réside dans le fait que Macron est à la tête de l’Etat et que Marine Le Pen voudrait y accéder. Pour le reste, on est vraiment tout près du « bonnet blanc et blanc bonnet ».
Oui, il y a une crise à Mayotte. Mais qui en est responsable ? Qui maltraite la population depuis des décennies ?
Fort heureusement, les représentants de LFI, du PS, d’EELV, ainsi que de nombreuses associations démocratiques ont condamné les propos et objectifs de Macron-Darmanin.
Soyons sûrs d’une chose : la surenchère pourrie va continuer.
Apprentis sorciers
Y aura-t-il une révision constitutionnelle ? Nous verrons quelle tournure prendront les évènements. Quoi qu’il en soit, ce pouvoir discrédité qui pourrit, avec ces institutions qui pourrissent avec lui, joue une nouvelle fois les apprentis sorciers, affublé d’aventuriers venus de différents horizons.
Même en truquant les cartes, le succès n’est pas donné et chacun ferait bien d’y réfléchir. Aucun « prince », celui-ci ou un autre, n’a le pouvoir de faire renoncer des millions d’hommes et de femmes à leur droit à vivre. Les travailleurs et la jeunesse ont besoin d’air frais. Qu’ils dégagent tous, et le plus tôt sera le mieux.
Jusqu’en 1975, l’archipel des Comores composé de quatre îles (la Grande Comore, Moheli, Anjouan et Mayotte) était sous domination coloniale française. Cette année-là, une élection a lieu pour décider de l’indépendance. Ces élections ont eu lieu dans les règles qui ont été acceptées par tous, c’est-à-dire que sera pris en compte l’ensemble du scrutin et non le résultat de telle ou telle île. L’Onu a reconnu juridiquement cette réalité historique de l’archipel comorien comme un tout indissociable. La majorité des habitants des quatre îles votent pour l’indépendance. L’île de Mayotte a voté contre. Cette île était le siège de l’administration coloniale française. Celle-ci, en utilisant les réseaux claniques et religieux, mais aussi les promesses économiques (allocations, Sécurité sociale, etc.) a réussi à imposer un vote en faveur de la domination coloniale française. La décision de maintenir Mayotte dans le giron de la France du gouvernement français est une violation des accords réalisés sous l’égide de l’Onu. Depuis cette date, l’Onu a voté 17 résolutions condamnant le coup de force de l’Etat français. Pour l’impérialisme français, il fallait garder un pied dans l’Océan indien. Il n’en demeure pas moins que Mayotte est une des îles des Comores et que l’arrivée de Comoriens des trois autres îles à Mayotte n’est en rien une invasion étrangère, ni une immigration. Les Comoriens des autres îles sont chez eux à Mayotte. |
Source: https://infos-ouvrieres.fr/2024/02/13/mayotte-les-duettistes-macron-et-le-pen/
URL de cet article: https://lherminerouge.fr/mayotte-les-duettistes-macron-et-le-pen-io-fr-13-02-24/