
Les «Nuits du Bien Commun» : fausse charité et vraie cheville ouvrière du milliardaire ultra réactionnaire Pierre-Edouard Stérin dans sa croisade pour la fascisation de la France
Les Nuits du bien commun, ça sonne bien, ça sonne solidaire, un brin catho sur les bords, mais rien de bien méchant. Elles prennent la forme d’un gala de charité où un système d’enchères permet de financer des associations triées sur le volet, et son organisées dans des lieux prestigieux de grandes villes de France. Alors que le monde associatif a été mis à genoux année après année par des politiques d’austérité budgétaire ultra libérales, on serait même tenté d’y voir là une belle occasion de sauver des associations menacées de disparition.
Lancées en 2017, les Nuits du Bien Commun sont en réalité l’avant-garde du projet de la 104e fortune de France : le milliardaire catholique, libertarien et exilé fiscal en Belgique, Pierre-Édouard Stérin. Proche de la Manif pour tous et des mouvements anti-IVG, Stérin aspirae à «la sainteté et la vie éternelle» selon ses propres mots. Il a lancé une véritable croisade pour «permettre la victoire idéologique, électorale et politique» de l’extrême droite, mais aussi «servir et sauver la France et lutter contre les ‘maux principaux’ que sont le socialisme, le wokisme, l’islamisme, et l’immigration».
C’est l’Humanité qui révélait, en juillet 2024, l’ampleur de ce projet baptisé Périclès, l’acronyme de «Patriotes / Enracinés / Résistants / Identitaires / Chrétiens / Libéraux / Européens / Souverainistes» : un budget de 150 millions d’euros sur 10 ans dans cet objectif via le fonds d’investissement qu’il dirige, Otium Capital.
Une bataille culturelle, politique et idéologique
Au niveau politique, Stérin propose une formation via une structure qu’il finance – Politicae – pour les candidats d’extrême droite aux municipales, avec l’objectif de remporter 300 villes en 2026 qui seront autant de bases arrières pour partir à la conquête du pouvoir. Une équipe par département est chargée de trouver les villes cibles et les candidats adaptés, le tout en partenariat avec le directeur général du RN.
Jordan Bardella et Marine Le Pen sont d’ailleurs considérés comme les deux personnalités sur lesquelles Périclès a déjà une «influence réelle». Par exemple, le numéro deux de Stérin, François Durvye, qui dirige son fonds d’investissement Otium Capital, est l’un des hommes de confiance de Marine Le Pen et l’un des trois principaux rédacteurs du programme de Jordan Bardella pour les élections législatives de l’an passé.
Le programme vise aussi à unir la droite et l’extrême droite, un objectif déjà bien réalisé avec l’arrivée au gouvernement de ministres d’extrême droite comme Bruno Retailleau, et des politiques déjà largement empruntées à l’extrême-droite comme la Loi immigration de Darmanin. Chez les Républicains, on a un goût particulier pour les Nuits du Bien Commun : notre chère Christelle Morançais, la présidente de la région Pays-de-la-Loire, qui massacrait à la tronçonneuse, en décembre dernier, les budgets de la culture et des associations, est elle-même partenaire de l’événement.
Depuis 2015, les élu·es LR, Reconquête et Rassemblement national sont d’ailleurs rassemblé·es lors des apéros du Bien Commun, où l’on peut apercevoir Marion Maréchal et Nadine Morano siroter des cocktails et parler grand remplacement. Ces «Nuits» sont donc un espace de réseautage et de convergence décisif, où se retrouvent la bourgeoisie, les néofascistes et la droite radicalisée.
Le projet Périclès compte également une «réserve» de 2000 personnalités prêtes à devenir candidates, expertes, technocrates, pour être placées dans les ministères et administrations en cas de victoire de l’extrême droite en 2027.
Autre volet essentiel, l’institut de formation politique (IFP), chargé de coacher des personnalités comme l’influenceuse d’extrême droite Thaïs d’Escuffon ou la fondatrice de Némésis, collectif faussement féministe et réellement raciste, Alice Cordier. L’IFP fait partie du réseau Atlas, un think tank américain libertarien ultra-conservateur. Il s’agit d’un des réseaux les plus puissants au monde. Selon une enquête de l’Observatoire des multinationales, il se prévaut notamment d’être à l’origine du Brexit et de l’élection de Javidr Milei en Argentine.
La bataille se livre aussi au niveau idéologique. C’est pourquoi Stérin finance des écoles privées hors contrat chargées de promouvoir « l’éducation intégrale », une éducation ultra réactionnaire pour « relever la France ». Il finance également l’Institut Libre de Journalisme afin de former les futurs journalistes à inonder les journaux et chaînes télévisées des idées d’extrême-droite, déjà omniprésentes.
Au début du mois, c’est son « observatoire », Hexagone, qui publiait un sondage repris en masse par les médias mainstream et matraquant le fait que les dés étaient jetés et le RN vainqueur dès le premier tour des présidentielles en 2027. Une bonne manière de distiller l’idée que se battre contre l’extrême-droite ne sert à rien car elle aurait gagné d’avance. Rien n’est laissé au hasard, et c’est une véritable machine idéologique, culturelle et médiatique qui est en branle.
Pour couronner le tout, Stérin est aussi un sponsor de l’État israélien et un soutien du génocide commis contre le peuple palestinien. Le 26 mars dernier, le milliardaire finançait une soirée organisée par Elnet à Paris, un lobby proche de Netanyahou. On y retrouvait des ministres, des éditorialistes, des sondeurs, prononçant des discours violemment islamophobes. Retailleau y avait notamment hurlé «à bas le voile !»
Les «Nuits du Bien commun»
Au démarrage uniquement parisiennes, ces soirées ont aujourd’hui lieu dans pas moins de 20 grandes villes – Lille, Paris, Toulouse Nantes… Elles sont essentielles dans la bataille menée par le milliardaire. Elles permettent dans un premier temps de financer des associations ultra réactionnaires qui sont en première ligne de la bataille culturelle.

En voici quelques exemples : SOS Calvaires : une association très proche des milieux d’extrême droite, dont la mission est d’installer de gigantesques croix partout en France dans un processus de « rechristianisation ». Ces actions sont accompagnées de prières traditionalistes avec curé, enfant de chœur et parfois même des individus en armures de chevaliers ! Ambiance croisades et guerres de religion.
On trouve aussi la «Maison de Marthe et Marie» qui, sous couvert de proposer des colocations solidaires pour femmes enceintes isolées, poursuit un projet anti IVG dans de nombreuses villes – notamment à Nantes – piégeant des femmes en situation de vulnérabilité.
Il y a également «Espérances banlieues» : un réseau d’écoles privées hors contrats dont le but est de «faire aimer la France». Celle de Marseille a même développé un partenariat avec… la Légion étrangère. Ce réseau est visé par une enquête pour violences volontaires sur mineurs, harcèlement moral et dénonciation calomnieuse.
Ces soirées permettent surtout de faire se rencontrer la bourgeoisie locale – qui peut en profiter pour défiscaliser un maximum d’argent grâce à ces dons – et de tisser des liens solides entre les représentant·es de la droite et de l’extrême droite locale afin de réaliser «l’union des droites», l’un des objectifs majeurs du projet Périclès. En outre, à l’approche des élections municipales, avoir un maillage serré du territoire est également essentiel.
Mobilisation générale contre Stérin
Pour lutter contre son projet mortifère, des collectifs se sont unis dans différentes villes pour imposer un rapport de force et faire annuler ces Nuits du Bien Commun. Pour les composantes de la Section Carrément Anti Stérin, syndicalistes, étudiant-es, collectifs antiracistes… il est hors de de question que ces soirées se déroulent tranquillement : le «bien commun», c’est la lutte sociale.
Si différents modes d’action sont à envisager, une pétition a été lancée pour faire annuler la Nuit du Bien Commun à Nantes, qui doit avoir lieu le 5 juin à la Cité des Congrès, un lieu prêté par la mairie socialiste de Nantes. Si l’évènement est maintenu, une grande mobilisation populaire aura lieu.
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