
Recueilli par Philippe ECALLE.
Les locataires des logements sociaux sont directement impactés par l’inflation et la baisse du pouvoir d’achat. Par ricochet, les bailleurs sociaux le sont aussi. Ils mettent en place des plans d’apurement auprès des locataires, comme l’explique Axel David, directeur régional des Pays de la Loire de l’Union sociale de l’habitat.
Axel David, directeur régional des Pays de la Loire de l’Union sociale de l’habitat a répondu à nos questions.
Avec l’inflation et la baisse du pouvoir d’achat, est-ce que vous faites face à de plus en plus d’impayés des locataires ?
Oui, ça monte, on le constate depuis un an, même si ce n’est pas de manière exponentielle. De 5,53 % d’impayés de plus de trois mois en janvier 2022 dans le parc des organismes HLM de Loire-Atlantique, on est passé à 6,93 % aujourd’hui. Tous les organismes HLM de l’Union sociale de l’habitat sont concernés. C’est important. Il faut remonter à janvier 2020, où on avait connu une hausse des impayés à cause du Covid. Les pics précédents remontent à la crise de 2008 et aux années 1990.
Vous avez été surpris par cette hausse des impayés ?
On s’y attendait. On craignait même un impact plus fort sur nos locataires. On s’aperçoit que tout ce qu’on a mis en œuvre lors de la flambée de la crise de l’énergie, ça fonctionne plutôt bien. C’est, d’une certaine façon, la première mesure de protection du pouvoir d’achat des locataires.
Comment faites-vous pour accompagner les ménages qui peinent à joindre les deux bouts et ont des retards de loyers ?
On fait de l’accompagnement sur-mesure. C’est de la dentelle. Chez les bailleurs, les équipes sont vraiment dans la bienveillance. On sait qu’au-dessus de trois mois d’impayés, une dette peut devenir difficile à résorber. D’autant qu’à partir de trois mois, la CAF supprime des aides. En dessous, ce sont des accidents de paiement. On a mobilisé le fonds de solidarité pour le logement, le Soliha (Solidaires pour l’habitat) ou des fonds abondés par les organismes mis en place depuis la crise énergétique. Ça permet d’accompagner tous les locataires de bonne foi, qui représentent l’immense majorité des locataires en difficulté.
Vous dites que vous faites du sur-mesure pour accompagner les locataires qui ont des difficultés. Ça veut dire que les plans d’apurement sont adaptés aux capacités de remboursement ?
Les organismes HLM sont très vigilants sur ce qu’on appelle le reste à vivre. On peut mettre en place des plans d’apurement sur dix-huit mois pour permettre aux locataires de résorber leur dette sans se sacrifier sur l’alimentaire par exemple. On peut avoir des remboursements de 5 € par mois.
Est-ce que l’inflation et la crise du pouvoir d’achat font émerger de nouveaux ménages en difficulté ?
On retrouve les mêmes profils, essentiellement les locataires les plus fragiles.
Et les expulsions ? Est-ce qu’elles augmentent aussi ?
En janvier 2022, on était à un taux de 0,49 % de commandement de quitter les lieux, la procédure qui précède l’expulsion. En janvier 2023, on était à 0,53 %. Ça veut dire que nos démarches d’accompagnement pour éviter d’en arriver là fonctionnent malgré la crise. On est très fier de ça.
Est-ce que cette situation pèse sur les comptes des organismes HLM ?
L’impact financier des impayés est plutôt maîtrisé. Par contre, l’enjeu, c’est de faire en sorte que ces recettes en moins ne compromettent pas les capacités des bailleurs pour réhabiliter le parc de logements. La réhabilitation énergétique, c’est une autre manière de protéger les locataires.
Ça pèse aussi sur la capacité à engager d’autres programmes de logements ?
Ça devient de plus en plus difficile de sortir un programme. Avant la crise, le coût de la construction était de 1 500 € le m2. Il est passé à 2 000 €/m2 en l’espace de deux ans et demi. À 1 500 €, il fallait mobiliser nos fonds propres pour équilibrer des opérations immobilières. Avec le taux du livret A, sur lequel est indexée notre dette, qui est passée de 0,5 % à 3 %, c’est compliqué. Notre modèle économique n’a jamais dégagé aussi peu de fonds propres alors que nous n’avons jamais eu autant besoin pour construire.
Il manque combien de logements sociaux ?
On a un parc de 65 000 logements sur la métropole, de 95 000 sur la Loire-Atlantique. Au 1er janvier 2019, il y avait 32 417 demandeurs d’un logement social HLM sur la métropole de Nantes. On est à 38 209 au 1er septembre 2023. C’est affolant. Depuis 2019, on accumule un déficit de production de logements.
URL de cet article: https://lherminerouge.fr/nantes-oui-les-loyers-impayes-augmentent-depuis-un-an-dans-les-hlm-of-fr-5-10-23/