Nouveau Premier ministre : comment le patronat met la pression sur Emmanuel Macron (H.fr-20/08/24)

Le président du Medef, Patrick Martin, est opposé à l’idée d’un gouvernement mené par le NFP. © Raphael Lafargue/ABACAPRESS.COM

Après s’être murées dans le silence face au risque RN, les organisations de chefs d’entreprise mettent la pression sur l’Élysée pour maintenir une politique économique toujours plus libérale. Certaines avancent le nom de Jean-Dominique Senard (Renault) pour Matignon.

Par Naïm SAKHI.

Ce vendredi 23 août, Emmanuel Macron recevra les chefs de parti et de groupes de députés du Nouveau Front populaire (NFP). La gauche parlementaire demandera, une nouvelle fois au chef de l’État, la nomination de Lucie Castets comme première ministre.

Mais, ce même jour, l’Insee doit publier sa note d’indicateurs de climat des affaires et de retournement conjoncturel. La précédente, réalisée durant les législatives anticipées, montrait une défiance des chefs d’entreprise : en chute de 5 points depuis ces dernières, le climat des affaires était en juillet à son plus bas niveau depuis février 2021, au cœur de la crise Covid. François Asselin, de la CMPE (Confédération des petites et moyennes entreprises), expliquait alors que la France pourrait perdre un troisième trimestre de croissance.

« Le programme du NFP serait fatal pour l’économie »

« Ne pas prendre en compte les réalités économiques dans les prochains arbitrages politiques serait coupable », prévenait dès dimanche, sur LinkedIn, Patrick Martin, le président du Medef, alors que l’incertitude plane sur le futur locataire de Matignon, sans majorité à l’Assemblée nationale.

Silencieux face au risque RN, le responsable patronal a depuis multiplié les sorties contre l’alliance de gauche. Dès le lendemain du second tour, il clamait dans les Échos : « Le programme du Nouveau Front populaire serait fatal pour l’économie. »

L’abrogation de la réforme des retraites, voulue par les syndicats et une écrasante majorité des actifs ? « Un signal terrible à l’égard des marchés financiers, mais surtout pour la pérennité de notre système par répartition », poursuivait Patrick Martin. Ajoutant, non sans honte, qu’il « est quand même extraordinaire que l’on parle de réforme des retraites depuis maintenant quarante-trois ans, à la suite d’une décision totalement inappropriée de retraite à 60 ans en 1981 ».

L’U2P avance le nom de Jean-Dominique Senard (Renault)

Michel Picon est allé plus loin en dressant, au micro de RMC ce lundi 19 août, le portrait-robot, selon lui, d’un futur premier ministre. Déplorant « le Festival de Cannes des nominations », le président de l’Union des entreprises de proximité (U2P) plaide pour un « patron reconnu » et réputé « social ». Ajoutant, lui aussi, un nom dans le débat public : Jean-Dominique Senard, ex de Michelin, à la tête du constructeur automobile Renault.

Le responsable de la 3e organisation patronale a également cité le profil de Sophie Thiéry (CFDT), présidente de la commission travail-emploi du Cese. La cédétiste avait rendu, courant 2023, un rapport co-écrit avec Jean-Dominique Senard issu des assises du travail et adressé à l’ex-ministre du Travail Olivier Dussopt, « qui nous inspire tous sur un certain nombre d’orientations dans la qualité de vie au travail, pour remettre le travail au centre des préoccupations du pays », insiste Michel Picon.

Patrick Martin, lui, se réserve bien d’avancer un nom pour Matignon. Mais, dans son poste LinkedIn, le président du Medef prévenait que « rien de durable et solide ne se ferait en matière de pouvoir d’achat, d’emploi, de formation, d’inclusion, de compétitivité, d’innovation, d’équilibre de nos régimes sociaux ou de transition écologique si nos entreprises ne sont pas robustes et si la France ne continue pas à travailler son attractivité ».

Comprendre : aucune inflexion sur les politiques économiques favorables au capital. « Je n’oublie pas que c’est un gouvernement de gauche qui a engagé le virage de la politique de l’offre il y a neuf ans. Mais le projet que le Nouveau Front populaire pousse en bloc, c’est l’inverse. Il fait complètement abstraction des contraintes budgétaires et de la compétition internationale », affirmait-il dans le même entretien aux Échos.

Le Medef se retrouve sans surprise dans les pas d’Emmanuel Macron, qui, selon l’Opinion, exigera du futur chef du gouvernement le maintien de la politique économique et sociale menée depuis sept ans, y compris sur les retraites. C’est dans ce contexte d’incertitude politique que se tiendra l’université d’été du Medef, les 26 et 27 août. Si aucun ministre du gouvernement démissionnaire n’est programmé, Bruno Le Maire s’attelle à rassurer les marchés financiers.

Alors que la France est sous le coup d’une procédure européenne pour déficit excessif, le futur exécutif devra envoyer à Bruxelles son plan de réduction de la dette courant septembre. Ce dernier était de 5,5 % en 2023, alors que Bercy a pour objectif de repasser sous les 3 % d’ici à 2027. Selon le Figaro, Bruno Le Maire prévoit 5 milliards de coupes sur le futur budget quand Gabriel Attal table vers une reconduction des dépenses à l’identique, excluant pour l’heure toute conditionnalité des aides publiques versées aux entreprises.

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Source: https://www.humanite.fr/social-et-economie/medef/nouveau-premier-ministre-comment-le-patronat-met-la-pression-sur-emmanuel-macron

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