Papeterie de Stenay : l’entreprise en redressement judiciaire, a deux mois pour faire ses preuves (H.fr-7/09/24)

Les représentants du comité social et économique de Stenpa, nom de la papeterie propriété du fonds allemand Accursia Capital, avaient en effet rendez-vous devant la justice pour une audience intermédiaire.

Risquant la fermeture pour la deuxième fois en deux ans, les travailleurs de la papeterie de Stenay plaident ce vendredi la continuation de leur activité devant leur tribunal. Bien que le site ait été abandonné par l’actionnaire, les carnets de commandes sont pleins, garantit l’intersyndicale.

Par Marie TOULGOAT.

Les 130 salariés de la papèterie Stenay avaient une autre idée en tête concernant les prochaines célébrations des 100 ans de leur usine. Ce vendredi 6 septembre, c’est pourtant au tribunal de commerce de Bar-le-Duc (Meuse) que ceux-ci sont allés parler de leur fabrique, fondée en 1925. Pour la deuxième fois en moins de deux ans, les travailleurs de ce producteur de papier emblématique de la Meuse risquent la cessation d’activité et, au passage, la perte de leurs emplois dans ce site industriel, l’un des seuls restants dans cette partie de la campagne lorraine.

Les représentants du comité social et économique de Stenpa, nom de la papeterie propriété du fonds allemand Accursia Capital, avaient en effet rendez-vous devant la justice pour une audience intermédiaire, à la suite du placement en redressement judiciaire le 5 juillet dernier, et avant la fin de la période d’observation le 31 décembre prochain. En apparence une simple formalité, donc, qui est toutefois loin d’en être une pour les travailleurs de la fabrique à papier. « Le 7 août, une demande de prolongation de notre redressement judiciaire a été faite. C’est ce que le tribunal a examiné cette requête et a tranché que l’activité pouvait poursuivre encore deux mois », indique le secrétaire CGT du CSE de Stenpa, Alain Magisson. Une nouvelle audience est donc prévue le 8 novembre.

Des carnets de commande pleins, mais pas de trésorerie

Pour le salarié quinquagénaire, l’autorisation par le tribunal de continuer l’activité, en plus de garantir aux travailleurs un emploi pour quelques semaines supplémentaires, a une autre vertu : celle de sortir d’un paradoxe apparent. « Nous avons plein de commandes, mais pas assez de trésorerie pour les honorer. C’est le serpent qui se mord la queue », déplore le représentant syndical. Avec ces deux mois supplémentaires à pouvoir faire tourner les bobines, les papetiers espèrent livrer le papier – surtout dédié à l’emballage alimentaire – commandé, mais aussi donner des gages de la viabilité de leur activité.

Pour lui et ses collègues de l’intersyndicale CGT-FO, qui ont organisé la lutte autour de cette usine des mois durant, c’est bien Accursia Capital qui est à blâmer dans cette malheureuse situation. D’abord auréolé d’une aura de héros pour avoir sauvé le site de la cessation d’activité après que le précédent actionnaire néérlandais Ahlstrom ne décide de fermer boutique en mars 2023, le fonds allemand a finalement réussi à se mettre à dos l’ensemble du site. Ce dont l’accuse syndicats et salariés : n’avoir tenu aucune de ses promesses d’investissement sur le site. « Accursia Capital n’a investi rien d’autre que l’euro symbolique de la reprise de la papeterie. Si on venait à fermer, ils ne perdraient rien, puisqu’aujourd’hui, on tape dans la trésorerie pour payer les salaires. Pourtant, dans le contrat de cession entre Ahlstrom et Accursia Capital, y a des clauses qui obligent le nouvel actionnaire à assurer la soutenabilité financière de Stenpa », pointe Alain Magisson.

Face à cette situation, les travailleurs partagent l’impression de s’être fait avoir par un actionnaire aux abonnés absents. « L’année dernière, quand Ahlstrom avait annoncé la fermeture du site, il y avait de l’abattement et la colère. Cette fois-ci, c’est bien plus que ça, il y a de la haine », assure le représentant CGT au CSE. Déterminée à ne pas laisser Accursia Capital s’en sortir avec ses engagements non tenus, l’intersyndicale a saisi pendant le mois d’août le Procureur de la République du Tribunal de commerce de Bar le Duc, « pour demander notamment l’engagement d’actions en comblement de passif à l’encontre » d’Accursia Capital, mais aussi d’Ahlstrom.

Tout espoir n’est donc pas encore perdu bien que le ressentiment soit grand parmi les papetiers. Si la date limite de dépôt des candidatures à la reprise de l’usine est passée depuis le 2 septembre, deux candidats seraient en train d’étudier la possibilité d’une reprise, assure Alain Magisson.

Leur éventuelle candidature pourrait être étudiée par le tribunal le 8 novembre. Par ailleurs, la papeterie peut compter sur le soutien de ses clients, assure-t-il. « Depuis le mois d’août, nous n’avons perdu aucun client, alors même que nous sommes en redressement judiciaire. Les clients nous disent qu’ils ont confiance en nous, que notre papier est de qualité, et sont déjà prêts à passer commande pour le mois d’octobre », se félicite le représentant CGT. De quoi, espère-t-il, à nouveau convaincre le tribunal de poursuivre l’activité de ce site historique.

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Source: https://www.humanite.fr/social-et-economie/industrie/papeterie-de-stenay-lentreprise-en-redressement-judiciaire-a-deux-mois-pour-faire-ses-preuves

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