
Le trafic aérien est perturbé dans le ciel français. Le mouvement de grève est suivi avec 933 vols supprimés sur l’ensemble du territoire jeudi 3 juillet et l’annulation attendue de 40 % des vols dans les aéroports parisiens ce vendredi 4 juillet. Après une réunion de conciliation infructueuse, deux syndicats dénoncent une forte dégradation des conditions de travail, sur fond de réforme du secteur. Le ministre des Transports a exclu de céder aux revendications des contrôleurs aériens, qu’il qualifie d’« inacceptables ».
Par Stéphane GUERARD.
Vols annulés à Paris-Charles-de-Gaulle, Orly et Beauvais, Nice, Bastia et Calvi, Lyon, Marseille, Montpellier, Ajaccio et Figari… La Direction générale de l’aviation civile (DGAC) a pris les devants pour faire face à un double préavis de grève lancé pour ces jeudi 3 et vendredi 4 juillet par l’UNSA-ICNA et l’USA CGT. Au total, elle a chiffré à 933 le nombre de vols supprimés jeudi au départ ou à l’arrivée de la France, soit environ 10 % des vols initialement prévus. Localement, ces taux ont été bien plus élevés : 50 % à Nice, troisième aéroport français, et 25 % à Paris-Charles-de-Gaulle et Orly, où transitent 350 000 personnes par jour en période estivale. Vendredi, jour de grands départs, la DGAC a demandé, dans les aéroports parisiens, aux compagnies de réduire leurs programmes de vols de 40 %.
Après deux réunions de « conciliation » infructueuses avec la DGA, les deuxième et troisième syndicats des contrôleurs aériens (organisation majoritaire, le SNTCA ne s’est pas joint au mouvement), dénoncent un contexte social dégradé avec la direction et des sous-effectifs préoccupants, suite à la réforme des process et de l’organisation du travail après un « incident grave » à Bordeaux en 2022.
« Sous-effectif généralisé »
« Sous-effectif chronique, accord social corporatiste et déséquilibré, management autoritaire, flicage généralisé, menaces de nouvelles externalisations et dégradation du service public, tous les personnels de la DGAC subissent les errements d’une direction dont nous ne partageons ni les priorités, ni les valeurs », dénonce ainsi l’USACGT qui revendique des effectifs supplémentaires afin de résoudre un « sous-effectif généralisé (qui) impacte fortement les conditions de travail ». Le syndicat appelle à l’ouverture de trois négociations pour revoir le maillage territorial des services de la DGAC, les conditions de travail « qui dégrade toujours plus la qualité du service public », et le « dialogue social à la DGAC à deux vitesses ».
Déplorant elle aussi un « sous-effectif structurel » et des « projets techniques en échec », l’UNSA-ICNA ne mâche pas non plus ses mots pour mettre en cause « les dérives managériales au sein de la Direction des Services de la Navigation Aérienne, dont le mode de management autoritaire, brutal, reniant ses engagements et déconnecté des réalités opérationnelles, entretient un climat de pression constante et de défiance incompatible avec les exigences en matière de sérénité et de sécurité du métier de contrôleur aérien ».
De son côté, la DGAC avait reconnu par voie de communiqué il y a huit jours « les difficultés liées à la situation de sous-effectif chronique, qui affectent la qualité du service rendu aux compagnies aériennes. C’est précisément pour y remédier qu’elle défend un plan de recrutement ambitieux, inscrit dans une stratégie pluriannuelle, afin de garantir un service performant et sécurisé ». La direction du gestionnaire du ciel rappelle qu’un accord avec la majorité des syndicats a été signé en 2024, qui « a permis des revalorisations salariales pour les contrôleurs aériens ».
« Je sais combien ces mouvements de grève sont coûteux pour vos compagnies aériennes », a affirmé Philippe Tabarot en clôturant à Paris le congrès annuel de la Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (Fnam), porte-voix du secteur. « Les revendications portées par des syndicats minoritaires sont inacceptables, tout comme le choix de faire cette grève au moment des grands départs en congés », a ajouté le ministre. Airlines for Europe (A4E), principale association de compagnies aériennes en Europe, a dénoncé de son côté cette grève qui va selon elle « perturber les projets de vacances de milliers de personnes ».
Le premier ministre y est aussi allé de son couplet, jugeant cette grève « choquante » et reprenant l’argument classique de la « prise d’otage » : « C’est prendre en otage les Français que de choisir le jour où tout le monde part en vacances pour faire une grève du contrôle aérien », a-t-il déclaré, passant comme chaque fois sous silence que le principe d’une grève c’est justement d’avoir le maximum d’impact sur la production afin de disposer d’un levier pour se faire entendre.
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