La fièvre monte au centre hospitalier du Centre-Bretagne, à Noyal-Pontivy, qui se prépare à un été difficile en raison de la pénurie de médecins.

Le docteur Marie-Hélène Aleman-Trévidic, représentante de la communauté médicale du groupe hospitalier Centre-Bretagne. (Le Télégramme/Patrick Hernot)
La période estivale n’a pas encore commencé mais le Centre hospitalier du Centre-Bretagne, à Noyal-Pontivy, est déjà en surchauffe. « Juillet et août s’annoncent encore plus compliqués car l’organisation repose sur des équipes épuisées qui ont déjà tout donné. Les galériens sont à bout de forces », s’inquiète le docteur Marie-Hélène Aleman-Trévidic, la représentante de la communauté médicale du groupe hospitalier.
Elle a décidé de tirer la sonnette d’alarme pour pointer les conséquences de la loi Rist, visant à plafonner la rémunération des médecins intérimaires, tant sur l’organisation des services que sur l’accueil des patients. « Ce recours était nécessaire dans un secteur moins attractif comme le nôtre. D’autant qu’il n’y avait pas d’abus à Noyal-Pontivy », affirme le médecin qui déplore l’absence de plan d’accompagnement pour compenser ce plafonnement et le départ des intérimaires. Ainsi, avant l’application de la loi Rist, au 1er avril de cette année, 40 % des médecins du centre hospitalier étaient intérimaires. Cette proportion montait à 70 % aux urgences et descendait à 10 % en médecine polyvalente.
Avec les effectifs actuels, on ne pourra pas accueillir tout le monde. On se demande comment on va passer l’été !
Pénurie d’urgentistes et d’anesthésistes
« Nous n’avons plus les moyens de faire face aux besoins nécessaires à la continuité des services. Et l’Agence régionale de santé fait la sourde oreille à nos demandes », dénonce Marie-Hélène Aleman-Trévidic. L’appel à des contrats courts, dits motif 2, pour contourner la difficulté (20 % des médecins actuellement contre 1 % avant avril), ne règle rien. « Non seulement ce dispositif est plus cher que l’intérim, mais il accroît les différences avec les titulaires en développant un système à deux vitesses. D’un côté la charge de travail, déjà lourde, s’accroît pour les titulaires, quand les autres travaillent à la carte, en refusant parfois des services de nuit et en imposant leurs dates de congés », souligne la représentante de la communauté médicale. Et cet « intérim déguisé », selon Marie-Hélène Aleman-Trévidic, ne permet pas de recruter le nombre suffisant de praticiens remplaçants nécessaires à la continuité des soins, notamment au service des urgences où il faudrait doubler leur nombre. Résultat : le centre hospitalier s’apprête à réduire ses capacités d’accueil cet été. « Avec les effectifs actuels, on ne pourra pas accueillir tout le monde. On se demande comment on va passer cette période ! »
Vers des déprogrammations…
Première conséquence : l’accès aux urgences sera régulé tout l’été. Même si cette solution, déjà mise en place durant certains week-ends, ne limite pas suffisamment le flux des patients et en détourne une partie vers d’autres établissements déjà sous tension. Cette option, imposée par la pénurie de médecins urgentistes et d’anesthésistes, se traduit aussi par des incompréhensions et une agressivité croissante des patients. « Mais il faut faire le 15 et passer par un régulateur qui estimera si le passage aux urgences est nécessaire. Un urgentiste occupé à gérer un problème médical non urgent ne pourra peut-être pas sauver le patient grave qui attend son tour », explique la représentante de la communauté médicale qui annonce aussi des déprogrammations chirurgicales pour faire face aux priorités. « Elles seront nécessaires pour recentrer les anesthésistes sur les urgences médicales et la maternité ».
Et des fermetures de lits
Mais cette organisation ne suffira vraisemblablement pas à passer les trois premières semaines d’août qualifiées de « critiques ». Il faudra sans doute passer par des fermetures de lits en fonction des effectifs en présence. Voire une fermeture de la maternité, des urgences et de l’unité de soins continus. « La menace existe », avoue le docteur Aleman-Trévidic qui s’attend à un été de tous les dangers. « Arrivera-ton à se relever en septembre ? »
Seul, et sans moyens suffisants, le groupe hospitalier de Centre-Bretagne n’a pas de remède face la pénurie. « Nous ne sommes pas les seuls dans ce cas », affirme le médecin qui réclame un véritable plan gouvernemental pour soigner l’attractivité du statut de médecins hospitaliers tout en appelant à une plus grande coopération avec les hôpitaux de Lorient, Vannes et Saint-Brieuc.
Auteur : Patrick Hernot
URL de cet article : Pas assez de médecins : l’hôpital de Noyal-Pontivy en surchauffe cet été (LT.fr 26/06/2023) – L’Hermine Rouge (lherminerouge.fr)