Pierre-Édouard Stérin, milliardaire d’extrême droite et soutien de Marine Le Pen, refuse de se rendre devant une commission d’enquête (LI.fr-23/04/25)

Par Kaïs

Le milliardaire Pierre-Édouard Stérin, porteur d’un projet politique et idéologique (« Périclès ») visant à porter l’extrême droite au pouvoir en France, a refusé de se présenter devant une commission d’enquête à l’Assemblée nationale ce 23 avril. L’objet de cette commission : l’organisation des élections dans notre pays. Financement d’influenceurs réactionnaires, rachat de médias, financement de think tank, formation des élus et de journalistes, proximité avec Marine Le Pen, par le biais de l’un de ses plus proches collaborateurs… Le milliardaire d’extrême droite tisse sa toile et tire les ficelles dans l’ombre.

« Pierre-Édouard Stérin et Arnaud Rérolles (Péricles) étaient convoqués demain par la commission d’enquête sur les élections. Nous avons reçu aujourd’hui une fin de non-recevoir. Nous les re-convoquons donc en mai et attendons une réponse positive », écrit le député LFI Antoine Léaument, rapporteur de cette commission d’enquête, sur Twitter. Un refus de se rendre devant une commission d’enquête, qui n’est pas sans rappeler le refus d’Alexis Kohler de se présenter devant une autre commission, cette fois-ci sur le dérapage des comptes publics. Le milliardaire a sûrement bien conscience des sanctions pénales possibles, s’il venait à mentir devant cette commission d’enquête : jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende.

Telle est la nature des puissants de se croire au-dessus de lois. De par son projet affiché de porter l’extrême droite au pouvoir et parce qu’il se comporte comme un mécène de cette dernière, l’influence du milliardaire dans le processus électoral du pays est bien réelle. Une convocation devant cette commission était belle et bien justifiée.

Nous republions dans nos colonnes notre dernier portrait de Pierre-Édouard Stérin.

Une croisade ultra-conservatrice bien financée

Pierre-Édouard Stérin, fondateur de Smartbox, ne cache pas sa volonté de changer la société. Mais son « changement » est à sens unique : celui d’un retour aux années 1950. Avec sa fortune estimée à plus d’un milliard d’euros, il a lancé en 2021 le Fonds du Bien Commun, une fondation à l’apparence philanthropique, mais dont les financements servent principalement à soutenir des projets conservateurs : écoles hors contrat aux programmes catholiques, formation de journalistes réactionnaires, et campagnes hostiles aux droits des femmes et des personnes LGBTQ+.​

Au cœur de cette stratégie : le réseau Acutis, un groupe d’influenceurs catholiques réactionnaires sponsorisés pour évangéliser TikTok, YouTube et Instagram. Le ton est moderne, le fond beaucoup moins : on y défend la soumission de la femme, la répression morale, et un rejet systématique des valeurs progressistes. L’un des visages phares du réseau, le frère Paul-Adrien d’Hardemare (voir l’enquête de StreetPress), a cofondé Acutis en 2022 avant de s’en retirer en mars 2025, dénonçant des dérives dans la gestion du réseau. Parmi les autres influenceurs soutenus figurent Yentl CG, Zeytooun, Lecathodeservice, Leana Daily, Amen Media, Mon expérience de Dieu, et le père Simon de Violet, animateur de la chaîne Catholand.

Pour aller plus loin : Copinage entre l’extrême droite et les riches : le projet « Périclès » de Pierre-Édouard Stérin met en danger la démocratie

Périclès : 150 millions d’euros pour préparer la prise de pouvoir

Mais la stratégie ne se limite pas à influencer la jeunesse. Avec le projet Périclès, Stérin entend désormais préparer l’arrivée au pouvoir d’une extrême droite formatée et professionnalisée. Ce programme, doté de 150 millions d’euros sur dix ans, se donne pour mission de former une élite conservatrice à tous les niveaux : élus municipaux, cadres administratifs, experts, communicants, juristes.​

L’ambition est claire : occuper les mairies dès 2026, pour installer un réseau d’élus conservateurs sur tout le territoire. Périclès ne cache pas sa volonté d’imposer une nouvelle génération de responsables politiques formés « en rupture » avec l’héritage de 1968. Les stages proposés à ses futurs cadres mêlent apprentissage technique, endoctrinement idéologique et storytelling nationaliste. Le tout, dans une logique d’« accélération culturelle » inspirée des milieux néo-conservateurs américains.​

Cette logique s’appuie sur un constat froid : une partie des institutions peut être conquise sans majorité dans les urnes, mais par le biais d’un quadrillage territorial, de l’ingénierie électorale, et d’un accompagnement professionnel de candidats soigneusement choisis. Une méthode qui emprunte davantage à la stratégie que Stérin a pratiquée dans le monde des affaires qu’au débat démocratique.​

L’extrême droite institutionnelle dans la boucle

Si Stérin se défend de tout lien partisan, les faits parlent d’eux-mêmes. Son bras droit, François Durvye, est désormais conseiller économique de Marine Le Pen. Il a participé à la rédaction du programme du Rassemblement National pour les élections législatives de 2024. Et de nombreux cadres passés par la galaxie Périclès se retrouvent aujourd’hui dans les campagnes municipales du RN ou de la droite radicalisée.​

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L’objectif est limpide : construire une union des droites sous pilotage idéologique, appuyée sur des moyens financiers que les partis classiques n’ont plus. Le terrain municipal est vu comme une rampe de lancement : implantation locale, discours sur la « sécurité », récupération des classes moyennes rurales, instrumentalisation de la religion. À la clef, un pouvoir institutionnalisé, prétendument propre, mais enraciné dans une vision autoritaire de la société.​

Une offensive contre la démocratie

Pierre-Édouard Stérin ne se contente pas de former des troupes. Il cherche aussi à contrôler le récit. En 2023, il tente de racheter le journal Marianne, suscitant une vague d’indignation dans la rédaction. Son objectif n’était pas commercial : il s’agissait de s’assurer un levier d’influence médiatique pour diffuser les idées de l’extrême droite sous des formes plus présentables. Une stratégie bien connue : celle du cheval de Troie.​

Au-delà des médias, il vise aussi à discréditer les contre-pouvoirs traditionnels : syndicats, associations, presse indépendante. Sa galaxie oppose systématiquement « la France d’en haut » à un « peuple enraciné » fantasmé, tout en étant financée par une fortune installée… en Belgique. Car oui, Stérin ne paie pas ses impôts en France. L’homme qui clame défendre les « vraies valeurs » est un exilé fiscal qui finance des campagnes contre l’impôt depuis Bruxelles. Le « bien commun » selon lui commence par la défiscalisation personnelle, et finit par l’ingérence politique d’une élite économique dans les institutions de la République.

Cette contradiction est centrale : derrière la rhétorique du « bon sens », c’est une vision oligarchique du pouvoir qui s’impose. Celle d’une minorité fortunée qui dicte au peuple ce qui est bon pour lui, tout en échappant à la solidarité nationale.

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La situation peut paraître triviale mais elle est grave : une extrême-droite moderne, riche et déterminée se structure à grande vitesse avec en toile de fond, un gouvernement Bayrou-Retailleau complice de ses idées. Périclès n’est pas un simple think tank : c’est une machine de guerre idéologique, un projet de société vertical, autoritaire et réactionnaire.

Face à cela, il convient de riposter sans attendre. Il faut alerter, dévoiler, documenter, mais aussi contre-attaquer. Le combat contre l’extrême-droite se joue sur tous les fronts : à l’école, dans les médias, sur les réseaux sociaux, dans les urnes. Ce n’est pas seulement une question électorale : c’est une bataille culturelle, sociale et morale. Un enjeu de société total.

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Source: https://linsoumission.fr/2025/04/23/pierre-edouard-sterin-commission/

URL de cet article: https://lherminerouge.fr/pierre-edouard-sterin-milliardaire-dextreme-droite-et-soutien-de-marine-le-pen-refuse-de-se-rendre-devant-une-commission-denquete-li-fr-23-04-25/

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