Plan Bayrou : « Adieu, 45 » (IO.fr-23/07/25)

Centre de la Sécurité sociale, à Valence. (AFP)

Le plan exposé par Bayrou comprend des mesures meurtrières contre la Sécurité sociale. Un dispositif qui s’attaque à tout notre modèle social. Comme disait Denis Kessler, patron des assurances privées, en 2001 : « Adieu, 1945… »

Par Nicole BERNARD.

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Au nom de la lutte contre la dette, Bayrou vient d’exposer son plan d’attaque contre tous les acquis sociaux en matière de temps de travail, de rémunérations, d’assurance chômage. Le plan exposé comprend des mesures meurtrières contre la Sécurité sociale. Un dispositif qui s’attaque à tout notre modèle social. Comme disait Denis Kessler, patron des assurances privées, en 2001 : « Adieu, 1945… »

Commençons par la question de fond : le gouvernement pioche comme il veut dans « le budget » de la Sécurité sociale.

La Sécurité sociale n’est pas une attribution de l’État mais « une organisation destinée à garantir les travailleurs et leur famille contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain » (article 1er de l’ordonnance du 4 octobre 1945).

C’est le coup de force du traité de Maastricht (1993) d’avoir fait de la Sécurité sociale une partie du budget de l’État. Alors que l’essentiel du financement provenait des cotisations. Véritable hold-up qui a été le fondement des ordonnances Juppé créant les lois de financement de la Sécurité sociale.

Objectif : en finir avec le financement par les cotisations sociales

Oui, mais depuis, la Sécurité sociale n’a-t-elle pas été financée par l’impôt ? Le financement par l’impôt (CSG, TVA, etc.) est une combine pour compenser l’exonération des cotisations sociales qui a augmenté les profits des entrepreneurs capitalistes. Personne ne peut dire le contraire. Il n’a pas changé la nature de l’institution basée sur les droits

C’est pourquoi l’offensive s’est renforcée pour en finir une bonne fois pour toutes avec le financement par les cotisations sociales.

80 milliards d’exonérations par an ont sérieusement réduit le « coût du travail » ? Non, répond le Medef. Cette baisse est provisoire. Dans le plan Bayrou, il y a des mesures qui viennent percuter les fondements financiers de la Sécurité sociale : c’est le cas de l’augmentation de la CSG pour les retraités (passage de la tranche supérieure de 8,3 % à 9,2 %, (qui est le taux supporté par les actifs).

Rappelons qu’initialement les retraités n’étaient assujettis à aucune cotisation puisque leur retraite est elle-même le produit des cotisations des actifs.

Derrière l’augmentation de la CSG des retraités, il y a l’idée, à peine sous-jacente, que ceux qui coûtent cher doivent payer plus ! C’est-à-dire l’inverse de la Sécurité sociale !

Quelle est la première conséquence de ce coup de force ?

« Année blanche »

Ce qu’on appelle « année blanche », c’est l’arrêt de l’indexation des prestations sociales.

L’indexation des prestations sociales c’est l’article L. 161-25 du Code de la sécurité sociale. C’est un article en « L » parce qu’il émane d’une loi votée par le Parlement.

Que dit-il ?

« La revalorisation annuelle des montants de prestations dont les dispositions renvoient au présent article est effectuée sur la base d’un coefficient égal à l’évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels de ces prix publiés par l’Insee l’avant-dernier mois qui précède la date de revalorisation des prestations concernées. »

Pourquoi cet article ? Pour concrétiser ce que dit l’article 1 er de l’ordonnance du 4 octobre 1945. S’il s’agit de garantir contre les risques susceptibles de réduire la capacité de gain, l’inflation est le premier risque. D’où l’article L. 161-25.

En voulant imposer une « année blanche », Bayrou s’assied sur l’article L. 161-25 et donc sur la loi. Ce n’est que le début !

Le 100 %, cœur de la Sécurité sociale, attaqué

Les ordonnances de 1945 reprennent une partie des lois de 1928 et 1930 sur les assurances sociales. Mais ce qui est capital, c’est justement les différences.

L’article 35 de l’ordonnance du 19 octobre 1945 instaure la prise en charge à 100 % :

– des maladies graves ;

– des affections de longue durée (arrêt de travail supérieur à six mois).

L’instauration de « l’assurance de la longue maladie » est totalement corrélée à l’organisation du contrôle médical conçu par les bâtisseurs de la Sécurité sociale non pas pour refuser les prestations comme le veut le directeur de la Cnam mais pour vérifier que les assurés bénéficient bien des soins dont ils ont besoin POUR GUÉRIR.

Il suffit de lire l’article 35 : « Les prestations attribuées comprennent la couverture des frais de toute nature pour permettre au malade de guérir et de recouvrer sa capacité de gain. » La « couverture des frais de toute nature » signifie, en bon français, la prise en charge de tous les soins nécessaires pour permettre au malade de guérir ! C’est à cela que s’attaque le plan Bayrou.

Doublement des « franchises »

Comme d’habitude, il se sert des « franchises » qui permettent de remettre en cause la prise en charge de la Sécurité sociale sans, apparemment, toucher à la répartition reste à charge/remboursement.

Il y a moins de deux ans, le gouvernement a doublé les franchises (2 euros sur une consultation). Mais il n’avait pas osé toucher au plafond qui restait de cinquante euros.

Aujourd’hui, il se propose de doubler le plafond. Le malade pris en charge à 100 % devra, si le plan Bayrou n’est pas renversé, payer de sa poche 100 euros au titre des médicaments, 200 euros au titre des actes médicaux, biologiques, radiologiques et 200 euros pour les transports.

Ensuite, le gouvernement veut imposer un « panier de soins » pour la prise en charge à 100 %. Ce n’est plus le médecin mais le gouvernement qui décidera quels sont les traitements liés à l’affection prise en charge à 100 %.

Voilà ce que signifie concrètement le plan Bayrou.

C’est le passage de la Sécurité sociale qui permet de se soigner au « parcours de soins » remboursable qui exclut des malades de l’accès aux soins.

Quel en est le résultat ?

La capacité ou non de l’assuré à payer de sa poche va être le critère pour les soins ! L’inverse de ce pourquoi la Sécurité sociale a été arrachée.

C’est vrai pour le dentaire et l’optique mais cela ne l’était pas pour le médical en raison du 100 %.

C’est ça qu’ils veulent remettre en cause. C’est cela qu’il faut empêcher.

Ne touchez pas à la Sécu !

LE DIRECTEUR DE LA CNAM, MAIN DANS LA MAIN AVEC BAYROU

Les mesures détaillées depuis le discours de Bayrou, le 15 juillet, avaient été présentées le 3 juillet par le directeur de la Cnam, Thomas Fatôme, comme résultant de la discussion avec les « partenaires sociaux ».À noter : elles ont été approuvées par tous les membres du conseil d’administration SAUF CGT ET FO.Dans son communiqué, le président CFDT de la Cnam se félicite de « la démarche de collaboration inédite »  qui a permis d’élaborer le rapport « charges et produits », c’est-à-dire le rapport préparatoire au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026. « Avec la volonté affirmée d’étudier sans tabou l’ensemble des pistes envisageables pour pérenniser notre système d’assurance maladie. »D’accord. En fait, ce qu’ils ont adopté, avec quelques jours d’avance, c’est le plan Bayrou. Sous le slogan : « Payer le juste soin au juste prix » . Faut-il commenter ?

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Source: https://infos-ouvrieres.fr/2025/07/23/plan-bayrou-adieu-45/

URL de cet article: https://lherminerouge.fr/plan-bayrou-adieu-45-io-fr-23-07-25/

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