Ces dernières semaines, des panneaux en breton, puis en gallo ont été subtilisés dans le pays de Rennes. On vous explique ce qui se cache derrière ces querelles intestines.
« A s’entrevair Lifrë. Kenavo Liverieg. » Mi-mai, Liffré a décidé de retirer ses panneaux d’entrée de villes en gallo et en breton. L’épilogue d’une séquence qui a vu s’affronter les partisans des deux langues de Bretagne.
Premier acte de ce conflit larvé entre bretonnants et gallésants ? La réapparition, le 9 avril, à Carhaix, d’une quinzaine de panneaux d’entrées de ville en breton dérobés ces derniers mois dans le pays de Rennes, dont plusieurs dans la capitale bretonne. À l’origine de l’action, la « brigade Albert-Poulain ».
Guerre de clochers
« Le gallo est la langue de Haute-Bretagne et est prioritaire à tout affichage bilingue préalable », revendique le collectif. Un tacle à peine masqué à la maire de Vitré, Isabelle Le Callennec, qui a inauguré en janvier la double signalétique français-breton. Les défenseurs de la langue celte ont riposté en subtilisant six panneaux en gallo à Liffré. Une escalade qui illustre une nouvelle fois la sensibilité des sujets liés à l’identité bretonne.
Symbole de cette hystérisation des débats, le président du Parti breton (PB), habitant de la Chapelle-Thouarault (Rennes Métropole), a comparé la situation à Mayotte à celle des gallésants en Bretagne. « Les collabos ont toujours accompagné la colonisation : en Bretagne (les gauchistes du gallo actuellement), (…), dans le sud des États-Unis (les « house-niggers »), en Algérie (les Harkis) (…), etc. Les Comores ne font pas exception », a tweeté Mathieu Guihard, le 25 avril.
Langue à défendre
Aujourd’hui, il assure que son tweet était « maladroit » et qu’il s’adressait à une « minorité de gens qui utilise le gallo pour faire avancer des positions gauchistes ». Selon lui, la langue doit être défendue car elle est parlée en Haute-Bretagne. Tout en rétorquant que le parler, d’origine romane, « n’est pas un symbole national ». Au contraire, le vol des panneaux en breton s’inscrit, lui, dans une séquence « d’attaques contre l’identité bretonne ». Et de citer l’exposition Celtique ? ou encore la sortie du livre de Benjamin Morel fustigeant « l’ethnorégionalisme » qui mettrait en péril l’identité française…
L’Union démocratique bretonne (UDB), qui compte dans ses rangs l’élue aux langues régionales à Rennes assure, elle, que « breton et gallo ne doivent pas être opposés ». Et que les deux langues doivent être défendues. Une déclaration d’intentions qui ne résiste pas à l’épreuve des faits. À Rennes, alors qu’il était question, en octobre, d’une signalétique d’entrée de ville trilingue français-breton-gallo, Montserrat Casacuberta-Palmada temporise aujourd’hui. « On se dirige vers une signalétique sur les lieux patrimoniaux. »
Une stratégie à vocation touristique mais sans plus pour le moment. « Ça marcherait peut-être davantage dans les petites communes », avance l‘ élue UDB. De fait, rétorque Guillaume Gérard, du collectif Du gallo en Bertegn, le gallo est surtout un parler populaire. « C’est une langue d’ouvriers, de paysans, d’artisans… C’est intéressant de constater que ces gens sont les oubliés des politiques publiques. »
Auteur : Kevin Storme
URL de cet article : Près de Rennes, ce qui se cache derrière ces vols de panneaux de communes – L’Hermine Rouge (lherminerouge.fr)