
© Jean Claude MOSCHETTI/REA
Alors que l’ex-chirurgien pédocriminel Joël Le Scouarnec, est jugé pour des violences sexuelles sur 299 patients par la cour criminelle du Morbihan, les premières auditions des parties civiles ont débuté, ce jeudi 6 mars.
Par Clémentine EVENO.
Les parties civiles étaient amenées à s’exprimer, ce jeudi 6 mars, dans le cadre du procès de l’ex-chirurgien pédocriminel Joël Le Scouarnec, jugé pour des violences sexuelles sur 299 patients par la cour criminelle du Morbihan. Le procès doit durer jusqu’à début juin, selon le calendrier transmis par la cour. O. a été la première à s’exprimer. Elle raconte comment l’ex-chirurgien a « brisé (sa) vie » en la violant à plusieurs reprises dans son lit d’hôpital lorsqu’elle avait 10 ans, rapporte l’Agence France Presse.
« Ça fait 33 ans que j’attends ce moment », lance O. avant de laisser s’échapper des sanglots. Une profonde inspiration, et elle reprend courageusement : « Il a brisé ma vie et je veux qu’il m’entende. » Hospitalisée en 1992 à la clinique de Loches (Indre-et-Loire) pour une appendicectomie, O. a raconté comment le chirurgien, dès le premier jour, avait demandé aux aides-soignantes de déplacer un autre patient âgé qui partageait sa chambre, afin qu’elle y reste seule.
« J’étais terrorisée »
« Pendant mon séjour, ce chirurgien m’a violée plusieurs fois », raconte-t-elle, auditionnée par visioconférence en raison de problèmes de santé consécutifs, selon elle, des viols commis par l’accusé. « J’étais terrorisée » ajoute-t-elle. Elle n’a que dix ans à l’époque mais sait qu’« on ne (mesure) pas la fièvre en insérant un doigt dans le vagin » et qu’« on n’écoute pas le cœur d’un malade en caressant longuement ses seins », souligne-t-elle, balayant les arguments avancés la veille encore par l’accusé, pour qui certains viols étaient des gestes « purement médicaux ».
La voix vibrante d’émotions, O. décrit comment le médecin lui « a donné des gouttes en disant qu’il repasserait plus tard voir si elle dormait bien ». « Mais moi, j’essayais de pas dormir parce que je savais très bien ce qui allait se passer » ajoute-t-elle. « Pas besoin de remettre en ordre mes souvenirs, ça me hante ! », insiste-t-elle. « Là je vais avoir 44 ans et depuis l’âge de 10 ans et demi ça me hante tous les jours, tous les jours » poursuit-elle.
« J’avais la sensation de ne pas pouvoir bouger, ne pas pouvoir crier… Mais je sentais très bien ses mains partout sur moi », souffle la victime. Pendant une longue semaine, O. reste hospitalisée en raison de « complications » liées à son opération
de l’appendicite.
« Personne ne m’a crue, personne ne m’a comprise »
À son retour dans sa famille, elle tente de parler à ses parents de ce qu’elle a subi. « Mais personne ne m’a crue, personne ne m’a comprise » explique-t-elle. Sombrant dans la dépression, vers l’âge de 13 ans elle demande à voir une gynécologue qui constate la rupture de l’hymen et lui demande « si (elle) fait beaucoup de sport ».
« Personne ne m’a jamais demandé si j’avais subi des sévices sexuels alors que je n’attendais que ça pour pouvoir en parler », lance O. Depuis son box, le médecin âgé de 74 ans garde un visage toujours impassible à ce récit, figé comme une statue de cire, fixant l’écran où apparaît la plaignante.
Si l’accusé a reconnu durant l’enquête une partie des faits de viols (touchers rectaux) sur des garçons, il n’a reconnu que des agressions sexuelles sur des filles, avait relevé plus tôt à la barre le gendarme qui a dirigé l’enquête. En outre, lors de la première semaine d’audience du procès qui a débuté le 24 février l’accusé a reconnu pour la première fois avoir commis des « abus sexuels » sur la fille de son fils aîné.
°°°
URL de cet article: https://lherminerouge.fr/proces-de-joel-le-scouarnec-personne-ne-ma-cru-personne-ne-ma-comprise-une-des-299-victimes-prend-la-parole-h-fr-6-03-25/