
Commencé le 24 mars 2025, à Paris, le procès de six hommes accusés d’avoir préparé des attentats d’inspiration islamiste depuis une boucherie halal à Brest (Finistère) se termine vendredi 11 avril. Le Parquet national antiterroriste requiert leur culpabilité à tous, malgré les grandes différences d’engagement.
Par Laurence GUILMO avec AFP.
« Même en l’absence de passage à l’acte, des peines lourdes se justifient […] On ne doit pas attendre qu’un attentat se déroule pour agir. » Mercredi 9 avril 2025, à l’encontre des six Finistériens jugés à Paris pour des projets d’attentats d’inspiration djihadiste, le Parquet national antiterroriste (Pnat) a requis 8 à 25 ans de réclusion contre les accusés.
« Éviter un bain de sang »
Alors même que l’accusation a du mal à citer un projet d’attentat précis, les avocates générales demandent à la cour de reconnaître la culpabilité des six accusés – dont un était mineur au moment des faits – tous poursuivis pour association de malfaiteurs terroriste. Le Parquet a rappelé que « la lutte contre le terrorisme c’est d’éviter un bain de sang ».
La peine la plus sévère, 25 ans de réclusion criminelle, assortie d’une période de sûreté des deux tiers, a été requise à l’encontre d’un premier accusé. À 39 ans, ce Palestinien né en Syrie a combattu dans les rangs du groupe État islamique (EI) en 2014. Il a rejoint la France en tant que réfugié à l’automne 2025, un statut qu’il a perdu depuis. Une interdiction définitive du territoire a aussi été réclamée, alors qu’il est marié et père de deux enfants nés en France.
Un « vétéran du jihad »
« Sa seule présence (au sein du groupe qui se retrouvait dans une boucherie halal de Brest) a galvanisé et donné des ailes » à ses co-accusés, a fait valoir une avocate. Sa consœur l’a comparé à Tyler Vilus, une figure du jihadisme, évoquant « une cellule dormante » prête à passer à l’action.
Cet homme est soupçonné d’avoir combattu lorsqu’il se trouvait en Syrie (de mars à l’automne 2014) dans la brigade Al-Mouhajirine, où a transité Abdelhamid Abaaoud, le chef des commandos des attentats du 13-Novembre. Il aurait participé à « la bataille de Mossoul » en juin 2014. Il serait « un vétéran du jihad », « sa radicalisation est ancienne et ancrée », a souligné le parquet.
« Ça ne vous regarde pas »
Lors d’une de ses rares interventions, il a déclaré : « Ce qui s’est passé en Syrie ne vous regarde pas. » Lors de son interrogatoire, l’accusé a dénoncé les « falsifications » et les « mensonges » de l’accusation : « On me reproche des actes que je n’ai pas commis et des paroles que je n’ai pas prononcées. » Les enquêteurs ont pourtant retrouvé une abondante documentation jihadiste sur ses appareils, dont des tutos pour la fabrication d’explosifs, des vidéos d’exactions… Son avocat commis d’office a choisi le silence après que la cour a refusé sa demande de supplément d’information et d’ajournement du procès.
Le boucher, « l’élément fédérateur »
Contre le propriétaire de la boucherie hallal de Brest où les accusés se retrouvaient (jamais tous ensemble) parmi d’autres clients, le parquet a réclamé 13 ans de réclusion criminelle, assortie d’une période de sûreté des deux tiers ainsi qu’une obligation de six ans de suivi socio-judiciaire. À 35 ans, il est fiché S, déjà condamné pour apologie du terrorisme. C’était « l’élément fédérateur » du groupe, a estimé le parquet. « C’est par lui que passaient tous les projets. Il n’a jamais cherché à décourager les uns ou les autres » quand ils évoquaient leurs projets (attaque d’un village isolé la nuit, attaque du Stade brestois, attentat à l’occasion du Nouvel an chinois…). Toutes les accusations reposent sur les écoutes, pendant deux mois, de novembre à janvier 2020, dans cette boucherie.
Mineur âgé de 16 ans au moment des faits, le plus jeune du groupe a été le plus prolixe après son interpellation, reconnaissant notamment son désir d’aller combattre en zone irako-syrienne. Contre lui, le parquet a requis 10 ans de réclusion criminelle.
Le verdict est attendu vendredi.
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