Projets d’attentats terroristes à Brest : un acquittement et des peines de 7 à 20 ans de prison (OF.fr-11/04/25)

Au palais de justice de Paris, comparaissent six Finistériens accusés d’avoir préparé des projets d’attentats terroristes dans une boucherie halal de Brest. Tombé ce vendredi 11 avril 2025, le verdict aligne des peines allant de à vingt ans de prison, et un acquittement pour ces six hommes âgés de 21 à 40 ans, en détention provisoire depuis cinq ans. | OUEST-FRANCE

Après trois semaines de procès, le verdict est tombé à la cour d’assises spéciale de Paris, ce vendredi 11 avril 2025, pour les six Finistériens inscrits dans « la mouvance islamiste radicale » et accusés d’avoir planifié, dans une boucherie halal de Brest, des projets d’attentats terroristes. Le verdict aligne un acquittement et des peines allant de sept à vingt ans de prison.

Par Frédérique GUIZIOU et Amélie COM.

Peut-on « condamner pour des actes de terrorisme des hommes qui ne sont pas des terroristes » ? C’est le leitmotiv des avocats des six Finistériens inscrits dans « la mouvance islamiste radicale » et jugés, pour des projets d’attentats, par la cour d’assises spéciale consacrée au terrorisme, à Paris.

Tombé ce vendredi 11 avril 2025, le verdict aligne des peines moins sévères que celles requises par le Parquet national antiterroriste (Pnat) : à l’exception de Marwan Tahmed, Brestois de 38 ans qui a été acquitté, les membres de l’équipe de la boucherie “conspiratrice” de Brest ont été condamnés à des peines allant de 7 à 20 ans de prison.

Toutes les accusations reposent sur une enquête, hors normes, débutée en novembre 2019, par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), dans une boucherie halal de Brest (Finistère) : 1 500 heures d’écoutes, plus de 100 000 photos et vidéos au total. Et « le rôle écrasant » des policiers chargés de « sélectionner les passages méritant d’être retranscrits », ces « morceaux choisis pour coller à l’obsession des enquêteurs », s’indigne la défense, Me Sami Khankan et Me Raphaël Kempf.

Des cibles évoquées

Parmi les cibles évoquées : la base navale de Brest, le Stade Brestois, les célébrations du Nouvel an chinois, ou l’attaque violente d’un village. Sans cesse réclamé, l’original des enregistrements et transcriptions qui constituent le socle de l’accusation d’association de malfaiteurs terroristes, n’a été retrouvé qu’au milieu du procès. « Sur une clé USB, même pas sous scellés, au fond du carton des preuves ! » s’indigne Me Louis Heloun, l’avocat du boucher, « l’élément fédérateur », Wahid Bouraya, 40 ans bientôt, déjà condamné pour apologie du terrorisme, il prend 11 ans de prison, et deux tiers de sûreté avec un suivi socio-judiciaire de 5 ans. Dans sa boucherie, au centre-ville de Brest, en décembre 2019, Mehdi, alors ado et lycéen, a prêté allégeance à l’organisation État Islamique (EI).

Des déclarations « lourdes de conséquences »

À la fois le plus jeune et le « plus motivé » du groupe, qui voulait « partir combattre avec l’EI en Syrie » , Mehdi, arrêté à 16 ans, 21 ans aujourd’hui, s’est montré, aussi, le plus bavard. « Très incriminantes », ses déclarations ont été « lourdes de conséquences » pour les cinq autres accusés : « J’ai inventé des responsabilités à certains alors qu’il n’y avait ni hiérarchie, ni structuration », a assuré le jeune homme qui se dit « animé par la rage et la haine » : « J’ai fait de l’excès de zèle. J’étais complètement mytho. » Son avocate, Me Louise Hennon, confirme : « Un enfant qui a voulu jouer dans la cour des grands. » Contre lequel 10 ans de prison étaient requis. « Totalement dégoûté de [son] expérience en France », ce jeune Marocain né à Brest « choisira de vivre au Maroc » une fois libéré. Il écope d’une peine de 7 ans de prison et d’un suivi socio-judiciaire de 5 ans.

Des images insoutenables

Sérieux ou frime ? Mytho ou djihadiste ? Difficile de croire à une « blague » quand on les entend enregistrés, à leur insu par la DGSI, comparer les points forts de Daesh et Al-Qaida. Ou devant l’abondante documentation de l’EI retrouvée chez les accusés. Les images insoutenables de propagande djihadiste, les scènes atroces de viols et de torture.

« Que pensez-vous de la charia ? » a demandé le président, Charles-Andor Fogarassy. « Je suis favorable à l’application de la loi islamique, elle vient de Dieu », a répondu Mehdi. « Je n’aimerais pas devoir appliquer la charia, a reconnu Wahid. Mais je ne remets jamais en question le Coran. »

20 ans au « vétéran » de l’État Islamique

La peine la plus lourde, 20 ans de réclusion avec deux tiers de sûreté et une interdiction définitive du territoire français, est prononcée contre Mohamad Darwich, 39 ans. Père de deux jeunes enfants nés en France et qu’il n’a jamais vus, il est présenté comme « un vétéran » de l’organisation État Islamique (EI), selon le parquet. Palestinien né en Syrie, réfugié politique au physique impressionnant, admiré des autres qui nient son « influence » de « tête pensante ». Ayant demandé, en vain, un supplément d’information et un ajournement du procès, son avocat, Me Sami Khankan, n’a pas plaidé.

Celui dont l’implication semblait la plus faible, Marwan Tahmed, Brestois de 38 ans, artisan plombier, un ami d’enfance proche de Wahid, est acquitté : « Douze ans que je porte cette robe et c’est la première fois que ça m’arrive, l’acquittement de mon client ! », exulte son avocat, Me Raphaël Kempf. « Sa situation était difficile à appréhender », a concédé l’avocate générale.

Erwan Miry, 32 ans aujourd’hui, venait d’avoir un fils quand il affirmait qu’il « fallait trouver et enrôler des jeunes ». Se décrivant « stigmatisée » et « détruite » par « la descente aux enfers » post-arrestation, son épouse lui conserve sa confiance : éloigné de l’idéologie islamiste, il compte désormais « se consacrer totalement à sa famille ». Face aux 12 ans de prison requis, son avocat, Me Alexandre Luc-Walton, a dénoncé « une échelle des peines hors-sol ». La cour le condamne à 9 ans de détention et un suivi socio-judiciaire de 3 ans.

Originaire de Landerneau, Christopher De Sousa Neves, 37 ans, converti en 2016, pratique un Islam « extrêmement rigoriste ». Un visage fin, les cheveux en catogan, il porte une très longue barbe. Il lui est reproché d’avoir cherché à se procurer des armes dans un quartier sensible de Brest, le 7 décembre 2019. Une recherche d’armes qui n’a duré que « six minutes ». Des 15 ans requis, sa peine a été réduite à 10 ans, assortie d’un suivi socio-judiciaire de 5 ans « Ne s’agit-il pas d’une réponse à une peur de l’époque, celle des attentats ? » a questionné son avocate, Me Maïa Kantor. « La lutte contre le terrorisme, c’est éviter un bain de sang ; on n’attend pas pour agir, a rétorqué l’avocate générale Ophélie Leray. Même sans passage à l’acte, des peines sévères s’imposent. »

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Source: https://www.ouest-france.fr/terrorisme/projets-dattentats-terroristes-a-brest-un-acquittement-et-des-peines-de-7-a-20-ans-de-prison-c6801a24-16b8-11f0-8663-b0a0331793f2

URL de cet article: https://lherminerouge.fr/projets-dattentats-terroristes-a-brest-un-acquittement-et-des-peines-de-7-a-20-ans-de-prison-of-fr-11-04-25/

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