Par Guillaume Bietry
S’il est à peu près acquis que les deux magasins, installés à côté de Rennes et Saint-Malo, ne fermeront pas, ils pourraient en revanche passer sous la bannière Carrefour.
« On ne sait pas encore à quelle sauce on va être mangé ». Quelques semaines après l’annonce (surprise) du rachat des supermarchés Cora et Match en France par Carrefour, les salariés des deux enseignes sont dans le flou.
L’opération – la plus importante dans l’Hexagone pour Carrefour depuis deux décennies – concerne 175 magasins au total, la plupart situés dans les régions Grand-Est et Hauts-de-France. Seuls deux, exploités par Cora, sont installés en Bretagne : l’un à Pacé, à côté de Rennes ; l’autre à Saint-Jouan-des-Guérets, à proximité de Saint-Malo.
À ce stade, les collaborateurs de ces deux hypermarchés (230 pour le premier et 150 pour le second, sur un total de 18 000) ne savent encore rien des conséquences potentielles du rapprochement avec Carrefour, deuxième distributeur français derrière E.Leclerc. « Il n’y a rien de sûr et de concret mais on sait à peu près comment fonctionne le groupe… », lance Cyrille Lechevestrier, délégué syndical central CFTC (majoritaire) chez Cora et par ailleurs salarié à Pacé.
Aujourd’hui, Cora et Match restent propriété du groupe belge Delhaize, le rachat étant soumis au feu vert de l’Autorité de la concurrence et à l’avis des représentants du personnel. « Le transfert des activités et du personnel devrait devenir effectif au mieux à l’été 2024. D’ici là rien ne change », indique la direction de Cora France, pour qui répondre aux questions sur l’avenir de son réseau de supermarchés s’avère « prématuré ». Carrefour, de son côté, n’a pas répondu à nos sollicitations.
Pas de fermetures mais un changement d’enseigne ?
Pour le délégué CFTC, il est à peu près acquis qu’aucun magasin ne fermera. Car tous fonctionnent bien, même ceux situés en dehors de la zone de prédilection Grand-Est/Hauts-de-France. En 2022, l’ensemble des hypermarchés Cora français ont généré un chiffre d’affaires cumulé de 3,2 milliards d’euros (hors essence), dont 40,6 millions pour le magasin de Pacé et 37,4 millions pour Saint-Jouan-des-Guérets, selon des estimations publiées par le site spécialisé LSA. Des performances honorables mais qui positionnent les deux établissements dans le dernier tiers du classement des 60 magasins, respectivement en 42e et 47e places.
En revanche, si les supermarchés bretons restent ouverts, rien ne dit qu’ils conserveront l’enseigne Cora. « En Bretagne, on ne connaît pas Cora ou alors très peu, estime Cyrille Lechevestrier. Mais ce n’est pas le cas dans l’Est ou dans le Nord, où l’enseigne est très très populaire ». Idem pour Match. Plusieurs possibilités s’offrent donc à Carrefour : conserver le réseau Cora et Match tel qu’il est actuellement, passer tous les magasins sous la bannière Carrefour ou conserver les marques Cora et Match uniquement dans certaines régions.
Des suppressions de postes anticipées au siège
Côté emploi, Cyrille Lechevestrier ne s’attend pas à des suppressions de postes dans les magasins. « Vu les difficultés à recruter dans la grande distribution, nous sommes souvent en manque d’effectifs. Donc j’ai du mal à imaginer l’ouverture d’un PSE [plan de sauvegarde de l’emploi] par Carrefour ». Des suppressions pourraient toutefois intervenir dans les ressources humaines, la logistique, la compatibilité, l’information ou encore la centrale d’achats, afin d’éviter les doublons entre Carrefour et Cora, dont le siège est installé en région parisienne, à Croissy-Beaubourg (Seine-et-Marne). « On est inquiet chez Cora parce que Carrefour prévoit 110 millions d’euros d’économies par an dans le cadre du rachat. On sait comment ça se passe… », commente Cyrille Lechevestrier. Par ailleurs, Carrefour a annoncé en juin plus de 900 départs volontaires dans ses sièges français.
Ces inquiétudes, les organisations syndicales de Match et Cora France auront l’occasion de les évoquer cette semaine lors d’un rendez avec le directeur de Carrefour chargé des ressources humaines, Jérôme Nanty. « On devrait en savoir plus », espère le délégué CFTC de Cora.
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