Renault : Luca de Meo quitte le navire… avant la grande débandade ? (H.fr-16/06/25)

L’ancien patron de Renault, Luca de Meo va rejoindre le groupe de luxe français Kering.© Lou BENOIST / AFP

L’annonce du départ du directeur général du constructeur français laisse la marque au losange dans le brouillard le plus complet. Les syndicats alertent.

Par Stéphane GUERARD.

Dans une lettre interne adressée ce lundi 16 juin aux salariés de Renault, Luca de Meo a eu beau justifier son départ inopiné de la direction générale par l’envie de s’embarquer dans « un nouveau défi de transformation, dans un secteur complètement différent », son « je ne m’enfuis pas » vers Kering, la multinationale du luxe de la famille Pinault, ne convaincs pas grand monde.

« Les plus anciens ironisent sur le fait que les rats quittent le navire. Les derniers arrivés se disent qu’il est temps d’aller voir ailleurs. Si les chefs s’en vont avant même d’avoir achevé leurs plans de transformation, on peut se demander quel est l’avenir de Renault et même de l’automobile en France, tellement c’est le bazar », décrit un employé du Technocentre.

Un bilan en demi-teinte

Lundi matin, des noms bruissaient déjà en interne comme en externe pour succéder à l’Italien francophone. Mais cette subite vacance du pouvoir ne pose pas que des questions de casting. « On était quand même en pleine transformation », s’étonne Fabrice Roze auprès de l’AFP. Le délégué syndical CFDT insiste sur le besoin « d’assurer la stabilité de la stratégie et la stabilité industrielle du groupe. Il faut qu’on reste dans la continuité, pas créer plus d’anxiété qu’il peut y en avoir aujourd’hui ».

Grand chef de Renault et parrain de l’Association des constructeurs européens d’automobiles, Luca de Meo incarnait cette stabilité à tort ou à raison. Côté pile de son bilan de cinq ans, sa « Renaulution » lancée début 2021 a fait passer la marge financière du groupe de – 0,8 % en 2020 (année du Covid) à 7,9 % en 2023 (7,4 % en 2024).

Mais cette profitabilité retrouvée et saluée par les actionnaires est un savant mélange d’explosion des prix (donc des marges) des nouvelles gammes de véhicules, et de saucissonnage des activités, externalisées ou partiellement cédées : les véhicules thermiques et hybrides filialisés dans Horse, codétenu par le constructeur chinois Geely et la compagnie pétrolière saoudienne Aramco ; l’électrique dans Ampère, dont l’introduction en Bourse a échoué ; la maison mère Renault SA et une myriade d’autres branches comme Alpine, Dacia… Résultats : la marque au losange a écoulé en 2024 1,5 million de véhicules de moins qu’en 2018 et les effectifs français ont fondu de 46 250 postes en 2020 à 38 730 en 2024.

Pro du marketing, Luca de Meo avait pourtant trouvé un nouveau nom à la deuxième phase de transformation. « Futurama » annonçait des investissements dans des « innovations » aux contours flous, de nouvelles alliances dans la tech, comme celles avec Google ou Qualcomm, ainsi que de « nouveaux business adjacents », comme peut-être une usine de drones en Ukraine, à la demande du ministère français de la Défense.

« Futurama, c’est pour des résultats éventuels dans trois à cinq ans. Mais aujourd’hui, que fait-on ? Dans un contexte où les utilitaires ne se vendent pas, l’électrique non plus, sauf la R5, les chaînes d’approvisionnement sont chaotiques et les normes compliquées, personne ne sait quoi faire », souligne Laurent Giblot. Le délégué central adjoint CGT appelle à rompre avec le dogme des 7 % de rentabilité, dont les conséquences sont des diminutions d’effectifs en France et le développement en Chine des nouveaux modèles électriques.

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Source; https://www.humanite.fr/social-et-economie/automobile/renault-luca-de-meo-quitte-le-navire-avant-la-grande-debandade

URL de cet article: https://lherminerouge.fr/renault-luca-de-meo-quitte-le-navire-avant-la-grande-debandade-h-fr-16-06-25/

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