Reportage-Un vent de jeunesse souffle sur la lutte antinucléaire (reporterre-21/07/25)

Le rassemblement proposait notamment des rencontres, activités et tables rondes. – © Guy Pichard / Reporterre

Le festival Haro ! a réuni plusieurs milliers de personnes à La Hague du 18 au 20 juillet. Au pied de l’usine de retraitement de déchets nucléaires, une nouvelle génération de militants s’est mise en lumière.

Par Guy PICHARD.

La Hague (Manche), reportage

« Haro ! Haro ! No n’veurt dé vos ôtis à ma. » (« Au secours ! Au secours ! Nous ne voulons pas de vos outils de malheur. »). Écrit en 1971, le poème de Côtis-Capel contre l’usine de retraitement de déchets nucléaires de La Hague a retrouvé une certaine jeunesse, du 18 au 20 juillet, dans la pointe du Cotentin. De la langue normande au français, le cri du cœur du poète local a raisonné à Vauville, ce petit village de la nouvelle commune de La Hague.

Réunissant plusieurs milliers de personnes pendant trois jours, le joyeux rassemblement baptisé Haro ! a proposé à ses visiteurs venant de toute la France des rencontres, des activités, des tables rondes et des ateliers, du type « répondre à son tonton jancoviciste ». Le weekend a ainsi débuté avec la table-ronde « Déchets radioactifs : ce que le mythe du retraitement nous fait avaler », avant une rencontre avec Larbi Benchiha, documentariste réalisateur de Bons baisers de Mururoa. Cette première édition a illustré l’importance du collectif organisateur, Piscine Nucléaire Stop, dans la relève de la lutte contre le nucléaire.

« Heureusement que la nouvelle génération a une grande force et beaucoup d’optimisme »

Cet événement sonnait comme un appel au secours des habitants de ce territoire face aux investissements dans le nucléaire annoncés le 7 mars 2024 par Bruno Le Maire, alors ministre de l’Économie, dans le cadre du projet Aval du Futur.

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Pour un coût annoncé de « plusieurs réacteurs nucléaires EPR » selon Orano — les estimations tournent autour de 40 à 50 milliards d’euros —, la région devrait voir arriver une nouvelle usine de retraitement, une usine de fabrication de combustible nucléaire Mox (Mixed oxide fuel) et trois bassins d’entreposage de combustibles usés, les fameuses mégapiscines nucléaires à l’origine du collectif Piscine Nucléaire Stop, créé en 2021.

L’usine de retraitement de déchets nucléaires de La Hague, vue depuis le camping du festival Haro  !. © Guy Pichard / Reporterre

« Les réunions d’information publiques ont tendance à me plomber, comme celle organisée par Orano le 21 juin, explique Christelle, qui fait partie du collectif. Ce soir-là, je suis rentrée à la maison et j’ai demandé à mon conjoint si nous allions rester ici pour notre retraite, continue cette femme de 54 ans, habitant à moins d’un kilomètre du site du rassemblement. Heureusement que la nouvelle génération a une grande force et beaucoup d’optimisme. »

Un vent de jeunesse

« Je suis très agréablement surpris par l’organisation, il y a du monde et beaucoup de jeunes, confirme Maxime Laisney, député (La France insoumise) de Seine-et-Marne, présent aux côtés de sa mère, qui vit non loin. Généralement, les militants antinucléaire sont plutôt de la génération au-dessus de la mienne [il a 44 ans], mais ici, on ressent malgré tout une grande maturité. »

Le rassemblement Haro  ! a réuni plusieurs milliers de participants. © Guy Pichard / Reporterre

Au sein du collectif Piscine Nucléaire Stop, ce sont plusieurs générations qui cohabitent, avec parfois même quelques membres d’une même famille. « Les anciens ont un héritage dans cette lutte et ils nous en apprennent beaucoup, notamment sur comment l’industrie nucléaire s’est installée dans la région, détaille Clara [*], 36 ans, membre du collectif. Beaucoup de femmes sont dans le mouvement et pour la plupart féministes. L’attention est aussi aux minorités de genre ou au milieu queer, mais nous restons un collectif contre les piscines nucléaires. »

Après un weekend festif et sans incident, il était bien difficile de comprendre les arrêtés préfectoraux qui visaient le festival, notamment celui permettant l’installation d’une caméra sur un hélicoptère de la gendarmerie pour « la prévention d’actes de terrorisme ».

La baignade à la plage de Vauville, point culminant de la journée du 19 juillet. © Guy Pichard / Reporterre

« C’est la première fois que je viens à un tel événement et je suis très surprise par l’ambiance, dit Lou [*], en regardant la mer et les manifestants se baigner. Ils ont mis en place les veilleuses sur le camp par exemple, qui sont là pour informer et intervenir en cas de violences sexistes et sexuelles, c’est très chill et bienveillant. » À 22 ans, cette Parisienne compte bien revenir aux prochaines éditions et connaît maintenant un mot en Normand : Haro !

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Source: https://reporterre.net/Un-vent-de-jeunesse-souffle-sur-la-lutte-antinucleaire

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