
Le Premier ministre François Bayrou a maladroitement tenté de sauver les discussions sur la réforme des retraites, après les avoir plombées pendant des semaines. Mais la perspective d’un accord s’éloigne encore un peu plus.
Par Cyprien BOGANDA.
Une journée entière et une longue soirée de discussions pour… pas grand-chose. Vers 2 heures du matin, mercredi 18 juin, les négociateurs n’ont pu qu’acter leurs divergences, en dépit de la bonne volonté des organisations syndicales encore présentes. Une ultime date de revoyure est prévue, lundi 23 juin, mais la perspective d’un accord, déjà ténue, s’éloigne à grands pas.
Pour mémoire, les syndicats (CFDT, CFE-CGC, CFTC) et le patronat (Medef et CPME) planchent depuis fin février sur la réécriture de la réforme des retraites de 2023 (recul de l’âge légal de départ de 62 à 64 ans), à l’initiative du premier ministre, François Bayrou. Dénonçant des discussions verrouillées à double tour, la CGT, FO et l’U2P ont claqué la porte. Ce « conclave » dont les « partenaires sociaux » n’étaient pas demandeurs a été conçu par l’exécutif comme une sorte de monnaie d’échange offerte au Parti socialiste, contre la promesse, en février dernier, que ce dernier ne censurerait pas le gouvernement.
Pas de retour aux 62 ans : le cadeau surprise de Bayrou au Medef
Mais le premier ministre n’a eu de cesse de plomber sa propre créature, en donnant le sentiment que les négociateurs discutaient en pure perte. Trois semaines après l’entame, François Bayrou a lancé par exemple qu’il était hors de question, selon lui, de revenir aux 62 ans, alors même qu’il s’agit d’un enjeu central des négociations et d’un chiffon rouge pour une partie des organisations syndicales. Le Medef n’en demandait pas tant, lui qui a toujours milité pour le maintien des 64 ans.
L’organisation patronale n’a fait quasiment aucune concession, fermement campée sur ses lignes rouges : aucun retour en arrière sur l’âge légal et hors de question de mettre la main à la poche pour financer d’éventuelles concessions sociales destinées à amadouer les organisations de salariés ou rééquilibrer le régime des retraites. De leur côté, les syndicats encore présents ont pourtant ouvert la porte, en cessant de faire des 64 ans un préalable indispensable à signature.
La prime aux seniors, un mirage en plein désert social
Ils réclamaient néanmoins des gestes de la part du Medef, notamment en matière de pénibilité (départ anticipé des salariés les plus exposés), mais aussi sur l’âge de départ sans décote, aujourd’hui fixé à 67 ans, que la CFTC voudrait voir ramené à 66 ans.
Dans une tentative maladroite de sauver du naufrage un conclave mal embarqué, François Bayrou a mis sur la table, dans la dernière ligne droite, la possible création d’une prime destinée à inciter les salariés seniors à retarder leur départ à la retraite. « Ce n’est ni une demande d’une organisation syndicale, ni d’une organisation patronale, a sèchement évacué Yvan Ricordeau, de la CFDT. Elle n’a fait l’objet d’aucun chiffrage et d’aucune étude de faisabilité et, pour l’instant, elle n’a pas été évoquée. »
Dans la nuit du 18 juin, les négociateurs ont donc acté leurs divergences. Une réunion de la dernière chance, lundi 23 juin, a été proposée en désespoir de cause par Jean-Jacques Marette, animateur des discussions. Mais Patrick Martin, dirigeant du Medef, s’est dit « très réservé » quant à la présence de son organisation.
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