Par Antoine MANESSIS
Le maire LR (droite radicalisée) de Saint-Raphaël a inauguré une stèle en hommage aux « cents millions de morts du communisme ». Il a déclaré: « Nous pensons qu’il est bien d’avoir une vision sur ces deux grandes doctrines totalitaires du XXe siècle : le nazisme, qui est condamnable sous tous ses aspects, puis vous avez également le communisme. « Pour Frédéric Masquelier, maire Les Républicains de la ville, l’objectif est de « mettre fin à un tabou: on ne parle pas des victimes du communisme au nom d’une idéologie officielle, avec le paravent de la Résistance. On réduit les victimes du communisme à celle du stalinisme…/… le totalitarisme, qu’il soit brun ou rouge, procède d’une même logique mortifère…/…Le nazisme et le communisme sont les deux faces d’une même médaille »
Le sénateur PCF Ian Brossat rappelle qu’ « en France, les seules victimes du communisme furent les nazis et leurs collaborateurs ».
Contexte électoral. Les municipales approchent. A Saint Raphaël comme dans le sud et le nord du pays le RN néofasciste pèse lourd. Une partie de la droite marche donc main dans la main avec l’extrême droite dont les racines historiques plongent dans le régime de Vichy et le collaborationnisme.
Comment réhabiliter cet allié encombrant? En lui inventant un jumeau à gauche. A ce travail de corruption de l’histoire, les droites se sont attelées depuis longtemps. L’obsession anti-communiste existe depuis que le mouvement ouvrier organisé existe. En1848 Marx et Engels écrivaient: « Un spectre hante l’Europe : le spectre du communisme. Toutes les puissances de la vieille Europe se sont unies en une Sainte-Alliance pour traquer ce spectre. »
Le communisme avant même la révolution russe de 1917 est accusé de tous les maux. Les partisans de l’ordre capitaliste perçoivent immédiatement le danger. Procès, répression policière et militaire, prison, exil, interdictions diverses et variées, calomnies…toutes les armes de l’Etat sont utilisées contre le spectre. En 1849 Adolphe Thiers, futur massacreur de la Commune de Paris en 1871, écrit un livre anti-communiste intitulé Du communisme
A partir de 1917 à cela se rajoute un anti-soviétisme frénétique. Et d’une répression accrue contre les communistes et assimilés. Le fascisme, le nazisme et les régimes fascistoïdes qui pullulent en Europe durant l’entre-deux-guerres sont tous fondamentalement anti-communistes. « Mort au marxisme! » est le mot d’ordre partagé par tous les fascismes. Les droites ne sont pas en reste.
Les bourgeoisies soutiennent les partis fascistes et leurs donnent le pouvoir. Les fascismes soutenant les intérêts du capital et voulant exterminer le communisme, le marxisme, la gauche (y compris la social-démocratie).
Churchill proclame à Mussolini: « Si j’avais été italien, je suis sûr alors que je vous aurais apporté un soutien total à toutes les étapes de votre combat triomphant contre les passions et les appétits bestiaux du léninisme »
Après la Seconde Guerre mondiale, la guerre froide voit s’épanouir l’anti-communisme. De Washington, où règne un temps un maccarthysme déchaîné, à Djakarta, où en 1965 au moins un demi-million d’Indonésiennes et d’ indonésiens communistes sont exterminés, d’Athènes à Santiago, de Paris à Madrid, l’anti-communisme devient l’axe des politiques des régimes bourgeois qu’ils soient parlementaires ou dictatoriaux.
Les luttes de libération anti-coloniales du Tiers-Monde excitent encore plus l’anti-communisme. Les impérialistes dénoncent « la main de Moscou », du « communisme international » partout, d’Alger à Hanoï, du Congo au Guatemala.
On aurait pu penser que l’effondrement de l’Union Soviétique, de la restauration du capitalisme à Pékin, signifieraient la fin de l’anti-communisme. Cela ne fut pas le cas.
Il faut comprendre simplement que l’ennemi mortel du capitalisme baptisé « communisme », « judéo-bolchevisme », « marxisme », « islamo-gauchisme »… c’est en fait la lutte des classes. Lutte que les classes populaires, les peuples, mènent contre l’exploitation capitaliste et la destruction de l’environnement qui en est la conséquence.
Il n’y a donc aucune raison que les forces liées au capitalisme cessent de lutter contre « le spectre du communisme ». En France en 1927 on disait « le communisme, voilà l’ennemi », en 2025 les mêmes disent « la France insoumise, voilà l’ennemi ». Identifiée à « l’extrême-gauche » plus ou moins « terroriste et anti-nationale », ce sont les adversaires les plus résolus de la domination capitaliste qui sont ciblés.
Comme le dit le maire de Saint-Raphaël « le fascisme et le communisme sont les deux faces de la même pièce », les bourreaux fascistes et leurs ennemis anti-fascistes. Les communistes allemands premiers pensionnaires de Dachau et les brutes de la SA qui les assassinaient. Les vainqueurs de Stalingrad et les bourreaux des Einsatzgruppen. Les tueurs de la SS et les libérateurs d’Auschwitz.
Les racistes du RN et les anti-racistes de la gauche.
Quant aux « cent millions » de victimes du communisme, ce chiffre est issu du cerveau fatigué du flic Stéphane Courtois qui est totalement discrédité aux yeux des historiens mais promu par les chiens de garde serviles et incultes.
Disons qu’il ne s’agit pas d’opposer aux morts des uns les morts des autres, le capitalisme a de toute façon un avantage chronologique qui le rend imbattable. Non, il s’agit de contextualiser, de faire de l’histoire, de comprendre les facteurs qui déterminent les événement et motivent les humains. Des livres remarquables ont été publiés sur ces questions qui ne nient rien mais qui sont des livres d’histoire.
Cette stèle sacrilège, expression de l’électoralisme le plus obscène et d’une obsession anti-communiste, anti-marxiste qui devrait nous faire comprendre que le maire de Saint-Raphaël et Joseph Goebbels sont les deux faces de la même pièce.
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