Sécurité sociale : qui veut noyer son chien l’accuse de la rage (IO.fr-9/06/25)

Un pannonceau indique l’accès d’un point d’accueil retraite de la sécurité sociale en 2010. (AFP)

Une situation financière « catastrophique  » d’après le Premier ministre. « Hors de contrôle », d’après la Cour des comptes. La Sécurité sociale serait, toujours selon l’honorable institution, « en défaut de paiement  ». Et chacun y va de son commentaire !

Par Nicole BERNARD.

Une situation « hors de contrôle » ? Une « insoutenable dérive » ? Le déficit de la Sécurité sociale, fin 2024, est inférieur à ce qui était attendu : 15,3 milliards au lieu d’une prévision de 18 milliards de déficit. 15,3 milliards sur un « budget » de 643 milliards, soit 2,3 %1.

Ajoutons que ce « déficit hors de contrôle » est à peine inférieur au bénéfice réalisé par TotalEnergies pour la seule année 2024.

Non seulement, ce « déficit » est minime mais… En réalité, il n’existe pas ! Car il n’y a pas de déficit. Il faut lire les petites lignes…

Sur ces 15,3 milliards, 5,5 milliards, d’après la Cour des comptes elle-même, correspondent à ce que l’État n’a pas payé au titre de la « compensation » des exonérations : 5,5 milliards qui viennent s’ajouter, année après année, aux dizaines de milliards non compensés parce que l’État a besoin de sous.

Enfin, comme le fait très justement remarquer le président de la commission des Finances, le député LFI Éric Coquerel, 18 milliards sont prélevés, chaque année, sur les recettes de la Sécurité sociale pour, soi-disant, rembourser la dette Covid que l’État a froidement transférée sur la Sécurité sociale en 2021.

Tous ces tripatouillages n’ont qu’un sens : pour ceux qui nous gouvernent comme pour le patronat dans son ensemble, chaque euro dépensé pour la Sécurité sociale est « insoutenable » ! D’où le bruit autour de la « TVA sociale » qui a l’avantage, pour ces gens-là, de faire payer les pauvres et de supprimer toute solidarité.

Tous ces discours n’ont qu’un but : « justifier » les mesures concoctées contre les assurés sociaux. Déficit ou pas déficit, le patronat et ses représentants, du Rassemblement national aux macronistes, veulent en finir avec la Sécurité sociale.

800 millions d’économies désormais exigées des taxis

Au premier chef, l’aggravation du « virage ambulatoire » (cf. IO n° 860) qui consiste à ne plus hospitaliser les malades. Au moment même où Bayrou fait semblant d’écouter les chauffeurs de taxi, son gouvernement fixe un objectif de 800 millions d’économies, soit 500 millions de plus que les 300 millions déjà visés.

Le gouvernement envisage également de poursuivre la diminution des indemnités journalières dans le cadre des arrêts de travail. Le salaire plafond a été diminué. C’est maintenant la durée des indemnités journalières qui est sur la sellette.

En fait, les mesures ponctuelles vont bientôt être épuisées.

Le directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), Thomas Fatôme, déclare : « Quand vous avez 100 000 à 200 000 personnes diabétiques ou atteintes de maladies cardiovasculaires en plus par an, ce sont des volumes très importants. ». Ah ! Si seulement, il n’y avait pas de malades… Comme tout irait mieux !

Le cœur de l’ordonnance du 19 octobre 1945, c’est le remboursement à 100 % des affections de longue durée (ALD), des maladies graves. Son article 35 prévoit « la COUVERTURE des frais DE TOUTE NATURE pour permettre au malade de guérir et de recouvrer sa capacité de gain ». Pour permettre de guérir… Voilà à quoi la Sécurité sociale est consacrée en 1945. La guérison n’est plus liée aux possibilités financières de l’individu. Elle est l’objectif de l’institution.

Vers une franchise de plus de 600 euros sur les remboursements de soins ?

Voici que des voix s’élèvent pour substituer à ce système emblématique de toutes autres règles :

– la création d’un ticket modérateur pour les patients en ALD : c’est la proposition du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie. Il n’y aurait donc plus de 100 % !

– une franchise globale dépendant des ressources de l’assuré. Cette franchise pourrait être de 3 % du revenu annuel. Soit pour un salarié au Smic, et quel que soit son état de santé, une franchise de 605 euros2 sur les dépenses remboursables. C’est le système qui existe aujourd’hui en Allemagne incluant la sortie de nombreux soins du « panier de soins ». On appelle cela le « bouclier sanitaire ». Nous reviendrons sur ses conséquences qui constituent une mise à bas du système de 1945 (incluant les mutuelles).

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Source:https://infos-ouvrieres.fr/2025/06/09/securite-sociale-qui-veut-noyer-son-chien-laccuse-de-la-rage/

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