
Lors d’une audience au tribunal de Brest (Finistère) le jeudi 10 octobre 2024, le patron d’une entreprise agricole du pays de Brest était devant la barre pour une affaire d’homicide involontaire qui date de plus de deux ans. Une de ses saisonnières est décédée le 9 janvier 2022 après que son foulard s’est coincé dans une brosseuse, utilisée pour trier des pommes de terre.
Par Marie RABIN.
Les faits remontent à plus de deux ans. Le vendredi 7 janvier 2022, plusieurs salariés saisonniers s’attellent autour d’une brosseuse à plat dans une entreprise agricole du pays de Brest (Finistère).
Quatre personnes s’occupent du tri des pommes de terre. Avant de finir son service, une salariée vient prêter main-forte à sa collègue pour pousser les derniers tubercules qui encombrent la brosseuse. Mais alors qu’elle se penche, son foulard se prend dans un des rouleaux encore en rotation. Cette salariée décède deux jours plus tard.
Hier, le tribunal de Brest est revenu sur cette affaire. Avec comme question centrale : les salariés étaient-ils informés des consignes de sécurité ? « Une saisonnière raconte que, quelques années avant, l’une d’entre elles a échappé de peu à un même accident avec les fils de son sweat. Rien n’avait changé après » , note le président du tribunal.
Une notice d’utilisation en allemand
Aucune formation de sécurité n’aurait été dispensée au sein de l’entreprise. « On connaissait la machine depuis plusieurs années, et on montre aux salariés comment elle fonctionne » , se défend le prévenu qui comparait aussi au nom de son entreprise. « Oui mais informer sur les consignes de sécurité c’est autre chose », nuance le juge.
Le rôle de la brosseuse, utilisée lors de l’incident, n’est pas le tri des pommes de terre, rappelle les parties civiles. La notice de cette machine acquise auprès d’une entreprise alsacienne n’était disponible qu’en allemand à l’époque de l’incident. « Si elle avait été traduite, l’employeur aurait vu qu’il est bien marqué qu’on ne doit pas s’approcher de cette machine à moins d’un mètre », précise l’avocat des parties civiles.
« Un comportement inhabituel »
Pour l’employeur de la victime, le port du foulard était difficilement contrôlable. « À cette période de l’année, beaucoup de salariés arrivaient avec le col fermé », se défend le prévenu.
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La défense affirme également que la saisonnière aurait eu un « comportement inhabituel avec des inattentions au cours de la journée » et que des traces d’« un médicament qui peut endormir en fonction de sa dose » auraient été retrouvées dans son corps.
« Je suis vraiment désolé »
Après les faits survenus le 7 janvier 2022, des changements ont été opérés au niveau de la sécurité dans l’entreprise agricole. « Mais il est désolant qu’il faut qu’il y ait un événement comme celui-ci pour que des mesures soient prises », souligne la procureure.
Elle requiert à l’encontre de la société 10 000 € pour homicide involontaire et le versement de 2 000 € à chaque salarié impacté par le manque de sécurité. En ce qui concerne le prévenu (le patron de l’entreprise agricole), la procureure requiert huit mois de prison avec sursis ainsi que 1 000 € aux salariés impactés.
« Je suis vraiment désolé de ce qui est arrivé » , lance-t-il une dernière fois en larmes.
La décision sera rendue le jeudi 12 décembre.
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