Le nouveau pape, Léon XIV, se place dans les traces de François comme partisan d’une écologie en communion avec la nature et critique de la technologie. Son nom fait écho à Léon XIII, fondateur de la doctrine sociale de l’Église.
Par Moran KERINEC.
La fumée blanche au-dessus de la chapelle Sixtine tournera-t-elle au vert ? Jeudi 8 mai, les cardinaux rassemblés au Vatican ont nommé Robert Francis Prevost pour succéder au défunt pape François. Né aux États-Unis, le nouvel évêque de Rome fut pendant près de vingt ans missionnaire au Pérou, dont il a acquis la nationalité. Sous le nom de Léon XIV, l’homme de 69 ans va désormais dicter la ligne théologique et politique de l’Église catholique… Et semble déjà engagé à poursuivre l’engagement écologique de son prédécesseur.
Le pontificat de François a été marqué par la publication en 2015 de l’encyclique Laudato Si’, une lettre destinée aux fidèles du monde entier dressant le constat de la crise écologique en la liant à la crise sociale. « L’engagement envers l’écologie du pape François a été une bénédiction pour les chrétiens sensibles à cette question, ainsi que pour les nouvelles générations qui ont grandi avec lui et ont été éveillées à ces notions-là », observe Dominique Lang, prêtre assomptionniste et auteur d’un Petit manuel d’écologie intégrale (Saint-Léger éditions, 2015).
Incitation à « passer des mots à l’action »
Léon XIV fait partie de ces croyants touchés par l’encyclique. Le 28 novembre 2024, celui qui n’était encore que cardinal a exprimé ce qui pourrait être sa doctrine lors d’un séminaire à Rome consacré aux impacts du changement climatique sur les pays du Sud global. « Il faut passer des mots à l’action », déclarait-il, tout en assurant que la réponse au dérèglement du climat doit se fonder sur la doctrine sociale de l’Église, rapporte Vatican News.
Pour le nouveau pape, la « domination sur la nature », c’est-à-dire la tâche que Dieu a confiée à l’humanité selon la Bible, ne doit pas devenir « tyrannique » en ne profitant qu’à quelques-uns. Au contraire, les humains doivent entretenir une « relation de réciprocité » avec l’environnement. Le prélat avait également mis en garde contre les conséquences « néfastes » du développement technologique.
« C’est rassurant d’avoir un nouveau pape qui s’inscrit dans cette lignée-là »
« Avec cette prise de position, il s’inscrit dans la lignée du pape François, analyse Théophane, jeune chrétien engagé au sein du collectif Lutte et contemplation. Il serait bon que le pape Léon XIV continue dans cette direction et porte un message clair, fort et politique, qui assume les rapports de forces économiques et techniques. »
Pour mesurer l’ambition écologique de chef de l’Église, les catholiques guetteront avec attention la commémoration des dix ans de Laudato Si’, le 18 juin. « Il faut voir les gestes que le pape posera à cette occasion, nous verrons alors si c’est un marqueur important pour lui, prévoit Dominique Lang. Avec François, nous avons vu dès les premiers mois de son pontificat ce qu’il allait faire pendant dix ans. »
Un nom en hommage à la doctrine sociale de l’église
Le nom choisi par le nouveau souverain pontife laisse deviner ses ambitions. Son prédécesseur Léon XIII (1810-1903) est réputé pour avoir écrit, en 1891, l’encyclique Rerum novarum, le texte fondateur de la doctrine sociale de l’Église sur la condition ouvrière, et ouvert la porte au syndicalisme chrétien. Léon Ier (pape de 440 à 461) est, lui, renommé pour avoir convaincu Attila, chef des Huns, ne pas mettre à sac l’Italie. « C’est rassurant d’avoir un nouveau pape qui s’inscrit dans cette lignée-là », apprécie Théophane. D’autant que le prélat dispose d’une vaste influence, pointe le jeune homme : « Il est le leader de 1,3 milliard de catholiques auprès de qui sa parole rayonne, y compris des dirigeants politiques. »
Beaucoup reste encore à faire pour infuser la question environnementale au sein de l’Église. « J’ai pu constater une incompréhension sur le fait que l’écologie soit une question chrétienne, observe Marie-Hélène Lafage, autrice de Laudato Si’ en actes : Petit guide de conversion écologique (éd. Première Partie, 2020). Il n’est pas toujours compris que l’écologie est une question pastorale qui doit s’inscrire dans notre foi, que la crise écologique doit nous faire prendre conscience que nous ne sommes pas en communion avec les autres créatures. » Charge au nouveau souverain pontife de reformuler le message de François pour le diffuser à ses fidèles.
Mais tout ne reposera pas sur les seules épaules de l’évêque de Rome. « On ne peut pas tout attendre d’un pape, cela dépend aussi de comment les baptisés font bouger l’Église, rappelle Marie-Hélène Lafage. Les encycliques sont la résultante des croyants qui s’engagent sur les terrains sociaux et environnementaux et qui sont reconnus par l’Église. »
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Source: https://reporterre.net/Sur-le-climat-le-pape-Leon-XIV-appelle-a-passer-des-mots-a-l-action
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