
Vladimir Poutine et Donald Trump se seront rencontrés en Alaska ce 15 août pour tenter de trouver aussi sérieusement que possible bien qu’avec des motivations différentes, une issue à la guerre en Ukraine.
Certains ont imaginé qu’ils pourraient se mettre d’accord sur un partage de l’Ukraine entre les États-Unis et la Russie et le faire avaliser par le régime de Zélensky en laissant payer la note de la reconstruction aux Européens.
Par Jean PEGOURET
Un partage de l’Ukraine entre la Russie et les États-Unis est une option que la Russie ne peut pas accepter. Elle serait l’équivalent d’un scénario à la Coréenne contraire à la principale revendication de la Russie, à savoir le refus de la militarisation de l’Ukraine sous une égide hostile à la Russie, au départ, l’OTAN, mais aussi les États-Unis seuls ou l’Europe seule si l’OTAN venait à éclater.
Dans la mesure où les États-Unis ne peuvent être alliés de la Russie face au Royaume-Uni et à l’Union Européenne, et que même si Trump le prétendait, Poutine ne le prendrait pas au sérieux, l’Ukraine de l’Ouest ne peut être laissée aux mains des Américains.
Par contre, après avoir très attentivement suivi depuis le Maïdan les intentions de Vladimir Poutine, je suis maintenant convaincu que le Président russe ne cherche pas à faire réintégrer la Novorossia dans la Fédération de Russie, contrairement à ce que souhaiteraient beaucoup de responsables nationalistes comme Douguine, Medvedev ou Malofeev.
Cette dernière option aurait abouti à un dépeçage de l’Ukraine en récupérant la partie utile et en laissant les débris à la Pologne, la Hongrie, la Slovaquie et pire la Moldavie ou la Roumanie. Ces débris auraient été des chicots instables et, pour le coup, l’OTAN par leur intermédiaire, aurait progressé vers les frontières de la Russie, ce qui était justement ce que Poutine voulait éviter.
Par contre, Poutine vise, selon ce que je vois à travers ses déclarations, une Ukraine viable économiquement, donc moins sensible aux déstabilisations sociales. Pour cela, elle doit garder une infrastructure industrielle (Kharkov, Dniepropetrovsk, Nikolaïev) et un accès à la mer (Odessa).
La condition pour accepter cette option est un changement de régime, dénazifié et démilitarisé à l’encontre de la Russie, comme l’a été le Japon après la deuxième guerre mondiale mais cette fois-ci, la Russie jouant le rôle des États-Unis et l’Ukraine celui du Japon.
Poutine et Trump pourraient très bien s’accorder sur un tel scénario car il serait gagnant-gagnant-gagnant sur le plan économique pour la Russie, la population ukrainienne et les États-Unis et permettrait à ces derniers de sauver la face en prétendant avoir obtenu la paix, fait faire des économies au contribuable américain alors que ce sont des officines d’inspiration conservatrices américaines et britanniques qui ont allumé la mèche du Maïdan et provoqué la guerre.
C’est l’occasion de rappeler ce que disait Montesquieu : « Les responsables des guerres ne sont pas ceux qui les déclenchent mais ceux qui les ont rendues inévitables ».
Sur les quatre scénarios d’objectifs de guerre* que j’avais imaginés en 2014 après la réintégration de la Crimée, anticipant l’opération militaire spéciale inévitable de 2022, c’est donc l’option n°2 que vise Vladimir Poutine : celui de l’intégration à la Fédération des régions russophones du Donbass alors soumises à une « dérussification violente » qui demanderaient leur rattachement à la Fédération, et de la préservation du reste de l’Ukraine sous forme d’un État économiquement viable mais débarrassé du nationalisme ukrainien artificiellement gonflé par les manipulations anglo-américaines et ayant fait ce choix par des élections remettant dans le jeu les onze partis notamment pro-russes et communiste actuellement interdits.
Le premier verrou à faire sauter maintenant serait le départ du régime de Zelenski sous la pression de la rue ukrainienne ne supportant plus l’impasse dans laquelle elle a été engagée depuis 2014. Les Ukrainiens pourraient vite être convaincus qu’après le lâchage des États-Unis, son avenir programmé serait de servir de champ de bataille à une Europe incitée par le Royaume-Uni et la France à se réarmer contre la Russie pour masquer ses propres problèmes internes.
L’ultimatum fixé par Trump à la Russie pour un cessez-le-feu expire le 3 septembre, le jour du 80e anniversaire de la capitulation du Japon en 1945. Poutine sera à Pékin ce jour-là aux côtés de Xi Jinping…
Mes quatre scenarios de 2014
Option 1. La Russie se contente de la Crimée. Ce scénario aurait été possible avec les accords de Minsk, une fédéralisation de l’Ukraine ou une autonomie donnée aux districts russophones du Donbass et la fin des opérations militaires dans l’Est de l’Ukraine.
Option 2. La Russie intervient au Donbass, intègre les régions russophones (Donetsk, Lougansk) et celles du nord de la Crimée pour garantir sa sécurité (Kherson, Zaporojia (Mélitopol)) et laisse le reste à une Ukraine stabilisée politiquement (« dénazifiée »), démilitarisée et viable économiquement.
Une sorte de Japon post-1945 qui a perdu les Kouriles, la moitié sud de Sakhaline, Taïwan et le Mandchoukuo, démilitarisé mais viable économiquement sous occupation américaine. Dans ce scénario, c’est la Russie qui jouerait le rôle des États-Unis et l’Ukraine celui du Japon.
Option 3. La Russie récupère la Novorossia (arc d’Odessa à Kharkov incluant Dniepropetrovsk, Nikolaïev, Kherson, Zaporojie, et la rive gauche du Dniepr, incluant une partie de Kiev)
Option 4 : la Russie prend le contrôle de la totalité de l’Ukraine. Scénario que je n’ai pas développé car il me paraissait absurde.
Jean PEGOURET
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