« Un métier à risque » : à Brest, après l’attaque du tram, la CFDT voulait l’arrêt total du réseau (OF.fr-11/04/25)

Les représentants de la CFDT du réseau Bibus à Brest, dont Sébastien Pellennec, délégué syndical (à droite). Photo prise en décembre 2024. | ARCHIVES OUEST-FRANCE

Après l’attaque d’un tram, jeudi 10 avril 2025, à Pontanézen, à Brest, la sous-préfecture du Finistère a décidé d’exclure le quartier du réseau de transports en commun durant les soirées du week-end. Mais la CFDT Bibus, qui craint un déplacement de la violence dans d’autres quartiers, comme en 2022, aurait préféré une mesure plus forte.

Par Laurence GUILMO.

Entretien avec Sébastien Pellennec, délégué syndical chez Bibus à Brest.

Que pensez-vous de la décision de la sous-préfecture d’interrompre la circulation à Pontanézen, uniquement en soirée, durant le week-end ?

Par précaution, on aurait préféré une interruption totale du réseau des transports en commun à partir de 22 h, sur l’ensemble de la métropole. C’est une décision qui prend en compte les usagers brestois mais qui ne va pas dans le sens de la sécurité des salariés de Bibus.

Pour quelles raisons ?

La situation actuelle est un décalque de celle de janvier 2022, où un tram était aussi tombé dans un guet-apens à Pontanézen, et avait subi des tirs de mortier. La décision avait été, comme cette fois-ci, d’interrompre les transports en commun uniquement pour ce quartier.

Or, la nuit suivante, la violence s’est déplacée à Bellevue, où un bus a subi des tirs de mortier d’artifice. On craint que ça ne recommence cette fois-ci ! Face à une telle violence, il faut une réponse forte. Pour montrer aux salariés que leur sécurité est prise en compte. Mais s’il y a le moindre problème, tous les conducteurs exerceront leur droit de retrait et cesseront le travail.

Mais si des policiers sont présents en ville, la sécurité des conducteurs est assurée…

On a plutôt le sentiment que l’essentiel est de maintenir la vitrine, montrer que le tram continue de rouler, que la situation est sous contrôle. Ils ne veulent pas donner raison aux casseurs. Mais c’est au détriment de l’humain. C’est sans prendre en compte le conducteur qui sera derrière le manche du tram ou le volant du bus aura, de toute façon, la boule au ventre, même s’il y a des CRS.

Avez-vous le sentiment que le métier de conducteur est plus difficile ?

On devient un métier à risque. En janvier 2022, c’était la même attaque. Sans oublier le précédent de juillet 2014, où c’était un cocktail molotov ! Les deux collègues qui conduisaient les trams et qui ont subi ces événements ne sont plus dans l’entreprise.

Traumatisés, ils n’ont jamais pu reprendre leur service. L’un a été licencié pour inaptitude, et l’autre a démissionné. Ils n’ont pas été blessés physiquement, mais moralement, ils n’en sont pas sortis indemnes. En fait, on est des travailleurs isolés. Dans notre bus ou notre tram, on se retrouve tout seul à gérer des situations de danger. C’est du stress, de l’appréhension.

Comment est l’ambiance chez les conducteurs ?

On sent la tension monter. Déjà, voilà deux ans et demi que Brest est dans les travaux pour la deuxième ligne de tram et le bus à haut niveau de service. Des déviations constantes, des contraintes au quotidien. On arrive à un épuisement. Et puis, en décembre dernier, il y a eu aussi une rixe au sein d’un bus à Bellevue, qui a été caillassé.

Pourquoi les jeunes de ce quartier populaire s’en prennent-ils au tram ?

Ils ne s’en prennent pas à Bibus en tant que tel, pour un problème avec un conducteur ou parce que le prix des tickets a augmenté. Mais le tram devient la cible car il est le symbole de l’État, des institutions. C’est aussi une façon de régler leurs comptes avec la police. Sauf qu’on n’est pas là pour être des cibles. On n’est pas de la « chair à canon » comme le dit mon collègue Luc Daniel. Notre rôle, c’est de transporter des usagers.

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Source: https://www.ouest-france.fr/bretagne/brest-29200/un-metier-a-risque-a-brest-apres-lattaque-du-tram-la-cfdt-voulait-larret-total-du-reseau-9d1ff37c-16de-11f0-a8b3-a2145a0def9b

URL de cet article: https://lherminerouge.fr/un-metier-a-risque-a-brest-apres-lattaque-du-tram-la-cfdt-voulait-larret-total-du-reseau-of-fr-11-04-25/

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