En 2024, pour la première fois depuis dix ans, l’hôpital de Brest-Carhaix accusait un déficit. Il est estimé à 15,6 millions d’euros pour 2025. Mais le plan d’efficience annoncé fait grincer les dents des salariés car il entraînerait la suppression de « droits acquis négociés » comme celui d’un 4e jour de congé en cas de décès d’un proche.
Par Laurence GUILMO.
«Les personnels vont une nouvelle fois payer le prix fort du déficit !
Jeudi 18 décembre 2025, les élus CFDT du CHU de Brest-Carhaix (Finistère) ont quitté le comité social d’établissement (CSE) très en colère, dénonçant « une mascarade de dialogue social
».
Le projet de réduction du nombre de jours de décès pour un proche, soit 3 au lieu de 4, a mis le feu aux poudres. « On est tombé de nos chaises !
» s’exclame Marie-Françoise Patinec, secrétaire de la section. Le syndicat dénonce « le retrait de petits acquis sociaux négociés en 2017
», « unilatéralement
et « sans concertation
». « C’est l’application stricte de la loi selon la direction. Mais d’un autre côté, elle s’assoit sur la législation en refusant l’ouverture d’un compte épargne temps ou de comptabiliser certaines heures supplémentaires
».
La direction voudrait aussi réduire le paiement en heures supplémentaires, pour les agents qui remplacent des collègues malades. Or, il avait permis de « diminuer de moitié le rappel sur repos des agents, ce qui permettait un meilleur respect de leur vie privée
», assure le syndicat qui craint une crispation et une dégradation des relations humaines dans les équipes
.
Pour le syndicat, ces projets sont en lien avec le contexte national et le plan d’efficience
initié à la fin de cette année. En 2024, pour la première fois depuis dix ans, le CHU de Brest-Carhaix (6 600 agents) a enregistré un déficit, établi à 5,6 millions d’euros. Et pour 2025, le trou devient un gouffre inédit estimé à 15,6 millions d’euros, sur un budget de 814 millions d’euros.
150 mesures d’efficience
Plusieurs raisons expliquent cette dégradation financière. Les aides de l’État pour compenser les hausses de salaire actées lors du Ségur de la Santé et l’inflation sont en forte baisse. Et c’est la fin du « Quoi qu’il en coûte » : une aide de 7 millions d’euros, attribuée depuis la crise du Covid quand il y avait moins d’activités que prévue, est supprimée.
Dans un hôpital qui a investi dans de gros projets immobiliers, les amortissements du nouvel Institut de cancérologie et imagerie (ICI) – qui a coûté 100 millions d’euros – pèsent lourd dans le budget. Il y a aussi des dépenses de personnels liés à des activités nouvelles. « Entre 2019 et 2025, 550 emplois ont été créés. Dont une centaine cette année
», rappelle Quentin Hénaff, directeur des Ressources humaines. Et 56 lits ont ouvert. Mais, si l’activité a augmenté, cette hausse s’observe surtout en ambulatoire (à la journée), moins rémunérateur que l’hospitalisation complète.
Un plan d’efficience se met en place. Pas de suppressions de postes ni de fermeture de lits pour l’instant, mais 50 mesures d’économies annoncées en octobre, devenues 150 en décembre. Objectifs : dynamiser l’activité et réduire les dépenses. Notamment mieux coder les actes médicaux pour une meilleure rémunération de l’activité, regrouper les achats, etc.
Le CHU de Brest ne remet pas en cause ses projets : les réunifications de ses Ehpad (86 millions) ; la construction d’un nouvel hôpital psychiatrique (72 millions) ; la modernisation du bloc opératoire de la Cavale-Blanche (144 millions). Pour la CFDT, la piste à privilégier serait au contraire celle de suspendre les investissements immobiliers.
En 2014-2016, un plan de retour à l’équilibre, la prochaine étape après l’efficience, avait entraîné la suppression de 150 postes, pour combler un déficit de près de 9 millions d’euros.
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