Un porte-avions nucléaire pour les gouverner tous (CA.net-22/12/25)

La dernière lubie de Macron : une forteresse flottante inutile et dangereuse à 10 milliards, qui sera construite à Saint-Nazaire

«À l’heure des prédateurs, nous devons être forts pour être craints. J’ai décidé de doter la France d’un nouveau porte-avions» a lancé Emmanuel Macron depuis les Émirats Arabes Unis le 21 décembre. Le président se prend pour une bête sauvage : en novembre 2024 il disait déjà que «le monde est fait d’herbivores et de carnivores, si on décide de rester des herbivores, les carnivores gagneront», afin de justifier le surarmement. «La décision de lancer en réalisation ce très grand programme a été prise cette semaine» précise l’Élysée, pour qui «ce nouveau porte-avions sera l’illustration de la puissance de notre nation». Une «illustration» grise, polluante, dévastatrice et hors de prix.

Durant les six premiers mois de l’année 2023, la France a connu l’une des plus graves crises sociales de son histoire : plusieurs millions de personnes dans les rues, des grèves massives, des milliers d’arrestations et de blessures par la police, une immense colère, l’usage de 49.3 pour passer en force contre la population. C’était la réforme des retraites, un caprice de Macron dont les remous continuent d’agiter la vie politique. Et tout ça pour quoi ? Selon le gouvernement, cette mesure devait faire économiser environ 10 milliards au budget du pays.

Deux ans plus tard, devinez combien l’État va débourser pour un nouveau porte-avions ? 10 milliards. Minimum. La question n’a donc jamais été budgétaire : il n’y a aucun problème a débloquer cette somme pour faire la guerre.

Ce «porte-avions nouvelle génération» – surnommé affectueusement «PANG» – est le symbole du réarmement en cours. La France dispose déjà d’un porte-avions baptisé Charles-de-Gaulle, qui a coûté 4 milliards et qui a été mis en service en 2001 après 15 ans de chantier. Un gros machin très onéreux qui sillonne les océans du globe en transportant des avions de guerre, histoire de montrer que la France peut envoyer des bombes nucléaires à peu près partout.

Pour le remplacer, l’État français voit les choses encore plus grand. Le «PANG» pèsera plus de 80.000 tonnes, le double du précédent. Il mesurera 310 mètres de long, plus long que le Titanic, mais surtout beaucoup plus large. Un porte-avions, c’est une véritable île militarisée avec une piste de décollage, qui vogue à toute vitesse. Un délire complet, fruit de l’ingéniosité humaine et des technologies les plus avancées, mises au service de la guerre. Le «PANG» embarquera plus de 2000 marins, une trentaine d’avions de combat – coûtant chacun plus de 100 millions d’euros, et transportant des bombes nucléaires – mais aussi des hélicoptères et des drones, et peut parcourir 1000 kilomètres par jour. Comment faire fonctionner cette forteresse maritime ? En installant directement des centrales nucléaires à bord, pardi !

Deux réacteurs atomiques permettront de propulser cette gigantesque machine à plus de 50 kilomètres heures sans besoin de la ravitailler en permanence en milliers de litres de carburant. Un «atout stratégique» disent les militaires. Mais surtout une catastrophe absolue en cas de naufrage ou d’attaque.

Le chantier pour construire une telle folie devrait prendre au moins 10 ans. Sachant que Macron et ses généraux parlent sans cesse d’un «choc» guerrier dans les 3 à 5 ans, ce «PANG» ne présente aucune utilité. D’ailleurs, au sein de l’armée, ce projet a été critiqué. «On arrive à un moment où les adversaires, de part et d’autre, sauront lancer des essaims de drones pour aller attaquer, dont on ne sait pas si on peut véritablement se protéger» expliquait par exemple le Général Vincent Desportes. Traduction : un porte-avions nucléaire à 10 milliards pourrait se faire couler par des drones qui coûtent 10.000 fois moins cher.

Le boss de l’armée française estimait encore il y a quelques jours : «La forme doit être réinterrogée, car on ne peut pas se contenter de reproduire un outil qui a été conçu à la moitié du siècle dernier». Une grosse carcasse truffée d’armes au milieu de la mer ne fait plus le poids, à l’ère de l’IA, des drones et de l’hyper vitesse. Par ailleurs, dans le cas du fameux conflit avec la Russie agité en permanence, cela n’aurait aucune utilité puisque les combats seraient «très essentiellement terrestres, aéroterrestres. La dimension navale serait quand extrêmement limitée», selon Péria-Peigné, chercheur au Centre des études de sécurité de l’Ifri (Institut français des relations internationales). En clair, une partie des militaires préféreraient mettre ce pognon de dingue dans des productions moins coûteuses et plus efficaces.

Mais Macron et ses copains y tiennent, à leur porte-avions. Ils veulent montrer qui a le plus gros. L’amiral Nicolas Vaujour expliquait que «l’Inde est en train de réaliser le deuxième et les États-Unis en possèdent déjà dix. Détenir un tel outil, c’est faire peser la voix de la France. Dire, nous sommes là». Ça fait un peu cher le message.

Ce projet inutile, hors de prix, mais symbolisant le réarmement tricolore, sera réalisé dans l’ouest, à Saint-Nazaire, près de Nantes. Ce grand port possède le seul chantier naval assez grand pour construire un navire d’un tonnage aussi important. Dès 2020, la région Pays-de-la-Loire et le maire de Saint-Nazaire se félicitaient de l’éventualité de ce «chantier du siècle» sur leur territoire. Jusqu’en 2035, la ville «va devenir une grosse base navale» selon chef d’État-major de la Marine. Le Maire de Saint-Nazaire réclame un «plan logement de toute urgence» pour les 3000 à 4000 salariés qui travailleront sur ce projet, sans compter les militaires, experts, sous-traitants qui feront des allers-retours dans la ville. Une partie du «PANG» sera aussi réalisé à Nantes, par l’entreprise Naval group, qui produira «des éléments de chaufferie du futur porte-avions» en bord de Loire.

Ce projet est tellement énorme qu’il va modifier la forme même des villes : des aménagements urbains sont prévus en lisière de Nantes comme à Saint-Nazaire pour adapter les territoire à l’industrie militaire. C’est tout un tissu économique et géographique mis au service de l’armée.

Sauf que Nantes et Saint-Nazaire sont des villes réputées pour leurs révoltes sociales, et que le département a déjà mis en échec plusieurs grands projets nucléaires et un aéroport à Notre-Dame-des-Lande. La population pourrait donc enfin sortir de sa torpeur, et s’opposer massivement à ce réarmement financé à coup de plans d’austérité, pour réaliser des chantiers militaires au mieux inutiles et nuisibles, au pire dangereux pour l’humanité entière.

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Source: https://contre-attaque.net/2025/12/22/un-porte-avions-nucleaire-pour-les-gouverner-tous/

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