
Une cinquantaine de salariés et militants syndicaux du groupe Yves Rocher ont protesté, ce mardi, à Ploërmel (56), contre la suppression de 270 postes et la fermeture d’une usine dans le Morbihan.
« Je suis PLO », lettres blanches sur t-shirt noir, à la manière de « Je suis Charlie », avec, glissée dans le O, une feuille emblématique du Groupe Rocher. « PLO » pour Ploërmel, où une cinquantaine de salariés et de militants syndicaux FO, CFDT et CGT ont dit, ce mardi, leur opposition à un accord de gestion des emplois et parcours professionnels (GEPP) conclu par la direction avec les deux syndicats majoritaires CFE-CGC et CFTC. Les deux autres organisations représentatives, FO et la CFDT, s’y sont opposées.
Suppression de 300 postes en trois ans
L’accord se traduirait par la suppression de 300 postes dans les trois ans, soit 10 % des effectifs, dont 270 dans le Morbihan, où l’usine de conditionnement de parfums et d’eaux de toilette pourrait fermer en 2025. 108 personnes y travaillent en CDI, majoritairement des femmes, d’une moyenne d’âge proche de 48 ans.

Marie-Noëlle est l’une d’elles. « Le site va fermer. Je suis en colère », confie, médusée, cette technicienne de production, recrutée en 1989. « Mon inquiétude, c’est de savoir si demain, on aura une place sur un autre site Yves Rocher. Personne ne sait nous dire. Je n’aurai pas le choix que de bouger, mais à quelles conditions, à quel salaire ? », s’interroge Frédérique. Cette gestionnaire de production, 48 ans, travaille dans l’usine depuis 1996.
À l’allure où cela va, les choses vont aller vite : deux chaînes de maquillage, dont la mienne, partent déjà à Rieux, à environ 60 km.
« S’il faut faire six mois à La Gacilly, à 35 km, je le ferai. Les choses vont aller vite : deux chaînes de maquillage partent déjà à Rieux, à 60 km. Là, je n’irai pas », signifie Sylvie, 60 ans, conductrice de ligne embauchée il y a 35 ans. « Pour une prime de transfert, on touchera entre 2 000 € et 5 000 €. S’il faut changer de véhicule pour multiplier les kilomètres par 10, ça ne suffira pas », s’agace Nelly, 33 ans de boîte.
« Cet accord est trop faible, estime la quinquagénaire référente des bonnes pratiques de fabrication. Mon métier me plaisait, on tombe de très haut. Si on décide de quitter l’entreprise, les seuls emplois que l’on trouvera ici, c’est dans l’agroalimentaire. Je ne m’y vois pas, d’autant moins si je dois travailler deux ans de plus avec la réforme des retraites ».
« C’est un plan social déguisé »
Devant les salariés réunis devant l’usine de Ploërmel, le secrétaire général de Force ouvrière dans le Morbihan, Pierrick Simon, redit que son syndicat aurait préféré « un plan social, pour lequel les critères de licenciement sont objectivés, à ce plan d’âges qui manque de moyens. Tout laisse à penser que l’on aura des ruptures conventionnelles ou des licenciements de type classique indemnisé 57 % du salaire brut, contre 75 % pour un licenciement économique ».

Le cédétiste Serge Coyac, nuance l’analyse. « On était contre la négociation de l’accord car c’est un plan social déguisé. Il intervient dans un contexte de baisse des volumes des parfums vendus depuis 2019, de charges de structures plus élevées avec la guerre en Ukraine, la crise énergétique… C’est compliqué », signale le délégué central, venu en compagnie d’autres militants, par solidarité avec les salariés ploërmelais.
Face à la « baisse significative du chiffre d’affaires », la direction estime nécessaire de « revoir la capacité industrielle du groupe » et d’« adapter son organisation ». Elle évoque « l’arrêt de l’activité de Ploërmel comme un scénario plausible à horizon 2025, si les volumes de production restaient sur la tendance des trois dernières années ».
Bruno SALAÜN