Plus de 1 000 cégétistes, dont 17 secrétaires généraux d’organisations de la centrale, sont inquiétés à la suite des actions en lien ou non avec la réforme des retraites.
Par Naïm SAKHI
La CGT paye le prix fort d’être l’un des principaux contre-pouvoirs de la Macronie. Myriam Lebkiri, secrétaire confédérale CGT, est convoquée ce vendredi par la gendarmerie de Pontoise (Val-d’Oise). En trois mois, la dirigeante est la seconde membre du bureau confédéral, après Sébastien Menesplier, le 5 septembre, à devoir répondre d’actions menées par la CGT durant le conflit contre la réforme des retraites. Un rassemblement devant la gendarmerie est d’ailleurs prévu dès 9 heures, ce vendredi.
Au total, plus de 1 000 cégétistes sont actuellement inquiétés, par des procédures disciplinaires, judiciaires, ou par des convocations par les forces de police. Dans l’énergie, 400 plaintes ont été déposées en 2023, se traduisant par des poursuites disciplinaires et parfois par des procès pour deux militants à Bordeaux, trois à Marseille et six à Valenciennes. Plus encore, selon les décomptes de la centrale de Montreuil, des procédures ont été ouvertes à l’encontre d’au moins 17 secrétaires généraux de ses organisations.
Sophie Binet interpelle Elisabeth Borne
Dans ce contexte, Sophie Binet a adressé une lettre ouverte, mardi soir, à la locataire de Matignon, Élisabeth Borne : « La convocation de premiers dirigeants de la CGT devant la justice a pour conséquence de décomplexer la répression patronale. » Pour la secrétaire générale de la CGT, « les employeurs sont ainsi de plus en plus nombreux à tenter, au prétexte de la diffamation, d’interdire l’expression syndicale ou à remettre en cause le droit de grève ».
Car, au-delà de la contestation contre la réforme des retraites, les portraits de cégétistes que l’Humanité a réalisés témoignent d’un basculement, depuis 2016 et la loi travail, vers une criminalisation de l’action syndicale CGT. Ces dernières semaines, les exemples sont légion. Sylvie Bertuit, de la CGT santé du Loiret, a été traînée devant les tribunaux pour un tract jugé diffamatoire à l’encontre d’une directrice d’un Ehpad. Condamnée en première instance, la responsable syndicale a été relaxée en appel.
Jean-Paul Delescaut, de la CGT du Nord, a été placé en garde à vue pour « apologie du terrorisme », à la suite d’un tract en soutien à la cause palestinienne, le 7 octobre. À Bourges, cinq militants de l’union départementale du Cher comparaîtront le 21 décembre, à cause d’un feu de pneus sur la voie publique, lors d’un piquet de grève, un mode d’action syndicale apparu dès la fin du XIXe siècle.
À ce propos, Céline Verzeletti précise que « les actions menées par la CGT excluent toutes violences sur les personnes et dégradations graves de matériels ». En charge de la répression antisyndicale, la secrétaire confédérale dénonce une criminalisation d’autant plus « inquiétante » que des groupuscules d’extrême droite ont pu « parvenir à défiler, parfois même sans autorisation, tout en proférant des propos racistes ou xénophobes » après la tragique mort de Thomas à Crépol, dans la Drôme, le 18 novembre.
Face à cette criminalisation accrue des mouvements sociaux, utilisant parfois les instruments de la lutte antiterroriste, Sophie Binet prévient l’exécutif : « Si, par malheur, l’extrême droite arrivait au pouvoir, l’ensemble des instruments seraient en place pour mater toute contestation. » L’intention cachée du capital ?
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