
Le 22 mai, la Première ministre a présenté son plan pour atteindre la « neutralité carbone » en 2050 et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Qu’en est-il ? Quelles conséquences ?
Peu de temps après, Macron appelait à « mettre fin à un modèle insoutenable » de production et de consommation du plastique, dans un message vidéo aux représentants de 175 nations réunis au siège de l’Unesco, dans « l’objectif d’aboutir à un texte agréé d’ici à la fin de l’année 2024, un an avant la conférence des Nations unies sur l’océan à Nice ».
Objectif affiché : rendre la planète plus vivable. Qui pourrait être contre ? Mais quels sont les faits ?
– Les rapports et les alertes sur la pollution plastique se sont multipliés depuis plus de dix ans. Le programme des Nations unies pour l’environnement avait publié un premier rapport sur la pollution des océans en 2011. Puis l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, l’Organisation mondiale de la santé et l’Organisation maritime internationale. Résultat : la production annuelle de plastique a plus que doublé en vingt ans et moins de 10 % des déchets sont recyclés. Selon le journal Les Echos, la production mondiale de plastique pourrait même augmenter encore de 50 % d’ici à 2025.
– La France et la plupart des pays occidentaux ont délocalisé une partie considérable de leur production et de leur pollution en Chine depuis des décennies. Résultat : en l’espace de trois mois, au premier trimestre 2023, la Chine a augmenté ses émissions de CO2 de l’équivalent des émissions annuelles totales de la France. En un seul trimestre !
LITHIUM ET EAU
Au nom de la prétendue « réindustrialisation », une méga-usine de batterie au lithium vient d’être inaugurée à Douvrin, dans le Nord, en présence des patrons de Total, Mercedes et Stellantis, à grand renfort de subventions publiques françaises et allemandes : 1,2 milliard d’euros ! A la clé, mille emplois créés, alors que 1 200 postes seront supprimés dans les usines de production de moteur thermique… au même endroit.
Le gouvernement a donc annoncé la mise en exploitation minière d’un gisement de lithium à Beauvoir, dans l’Allier, une première dans le pays, afin d’équiper sept cent mille voitures électriques par an.
L’objectif de production annuelle est de trente-quatre mille tonnes d’hydroxyde de lithium. Or il faut environ un million de litres d’eau pour extraire une tonne de lithium… L’eau semblait pourtant devenir une denrée rare dans nos communes, soumises, en de nombreux endroits, à une sécheresse sévère.
Malgré cela, le Bureau national de recherches géologiques et minières a recensé une quarantaine de gisements potentiels dans le pays, dispersés dans sur une diagonale reliant le Massif armoricain au Massif central, mais également en Alsace. Les arrêtés accordant des permis de recherche de métaux rares, dont le lithium, se multiplient.
« EXTRÊMEMENT PROFITABLE »
De son côté, la Chine s’apprête à remplacer les batteries au lithium par des batteries au sodium. Tandis que l’agence de la transition écologique (Ademe) a établi dans un rapport que seules les voitures électriques légères et dotées de batteries peu puissantes sont moins polluantes que les modèles thermiques.
La réalité est qu’il ne peut pas y avoir et qu’il n’y aura jamais de transition écologique véritable ni avec Macron ni avec quiconque acceptant le cadre des rapports de propriété existants, fondés sur la seule recherche du profit.
Comme le dit un patron fier d’annoncer l’installation de panneaux solaires sur le toit de son usine pour remplacer son vieux système de chauffage : « L’Etat prend en charge 50 % des coûts. L’opération sera rentable au bout de sept ans. C’est extrêmement profitable pour nous. »
Tel est le véritable but des annonces que la Première ministre, Elisabeth Borne, a présentées le 22 mai : un budget de 70 milliards par an, dont 34 de dépenses publiques annuelles supplémentaires, sans compter les secteurs aérien et maritime, pour augmenter encore davantage les marges des entreprises sous couvert d’écologie. Sa vision à 70 milliards, Borne l’a dévoilée au Conseil national de la transition énergétique.
Les rapporteurs préviennent que ces milliards « sont des investissements qui n’auront pas d’impact positif sur le potentiel de croissance », ce qui va « probablement induire un coût économique et social », une baisse de la productivité « de l’ordre d’un quart de point par an », précisant que « l’automobile va subir un choc particulièrement violent ». Ils estiment même qu’un alourdissement significatif de la dette publique, de l’ordre de dix points de PIB, est à l’ordre du jour.
Le journal Les Echos, le 23 mai, rapporte que « l’essentiel de l’effort serait bien fourni par les transports (27 % des 138 millions de tonnes à supprimer), grâce aux véhicules électriques et au covoiturage, par exemple. Seulement 9 % viendraient de l’agriculture, où la transition est plus complexe à mettre en œuvre. Le bâtiment et l’industrie représenteraient “respectivement 25 % et 20 % de l’effort”. »
TOUT EST BON POUR TOURNER LA PAGE DES RETRAITES
La plus grosse part passerait par la « sobriété » du transport automobile, couplé au déclin des véhicules thermiques, dont la vente serait interdite après 2035. Le gouvernement envisage également de recourir au fret ferroviaire pour réduire de 11 % les émissions de gaz à effet de serre. Pourtant, au même moment, il organise le démantèlement… du fret ferroviaire.
Alors pourquoi ce cirque et ce gigantesque enfumage ? Jean-Marc Zulesi, président Renaissance de la commission du développement durable de l’Assemblée nationale, propose peut-être l’explication la plus explicite : « Après les retraites qui ont occupé l’espace, avant les canicules, nous devons montrer que nous pouvons embarquer les Français dans notre vision d’une écologie positive. »
L’exécutif tente une nouvelle fois de tourner la page des retraites. Tout est bon, surtout si cela permet de convaincre de la nécessité de nouveaux sacrifices en s’érigeant en grand défenseur de l’écologie et de la planète.
LE SEUL MOYEN D’AGIR
Bien sûr, le rapport, rédigé pour l’occasion par Pisani-Ferry (inspirateur du programme économique de Macron en 2017) et Mahfouz (inspectrice générale des finances), préconise de s’endetter et suggère même de taxer les 10 % les plus riches… Une option que Borne n’entend pas retenir, préférant faire des économies sur les budgets existants. « Hors de question, pour Aurélie Trouvé, députée LFI interrogée sur Franceinfo, d’aller prendre dans le budget pour les écoles, les hôpitaux publics, qui sont déjà dans un très sale état et qui ont besoin de plus de moyens, c’est inadmissible, donc il faut aller prendre l’argent là où il est. » On ne saurait mieux dire.
Reste qu’il n’y aura aucune transition écologique possible, ni aucune politique sociale véritable, sans rupture avec le système économique qui nous a conduits dans la situation actuelle.
Comme le dit Yamina Saheb, experte du Giec, « le seul moyen d’agir, c’est de reprendre le pouvoir ».
Auteur : Par Nicolas Boichard, Stéphane Marati
Source : La « transition » écologique de Macron est un enfumage (infos-ouvrieres.fr)
URL de cet article : LA « TRANSITION » ÉCOLOGIQUE DE MACRON EST UN ENFUMAGE. ( IO.fr – 10/06/23 ) – L’Hermine Rouge (lherminerouge.fr)