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Le gouvernement de Nicolas Maduro est « autoritaire et antidémocratique ».
Non, il ne s’agit pas des propos d’un ami politique de Juan Guaido, ni de la droite vénézuélienne. Il ne s’agit pas non plus d’une déclaration de l’exécutif étasunien. Ni même d’un membre du gouvernement macroniste.
Cette sentence est d’Oscar Figuera, le secrétaire général du PCV (parti communiste du Venezuela).
De quoi s’agit-il ?
Le Tribunal supérieur de justice (TSJ) a prononcé la destitution de la direction du PCV, jugée illégitime, et son remplacement par une direction ad hoc, chargée de « rétablir les processus démocratiques au sein du parti ».
Pour Oscar Figuera, le secrétaire général démis, » le parti a été victime d’un assaut du pouvoir » et le PCV a publié une déclaration confirmant cette analyse puisque elle dénonce une « fraude procédurale, qui viole les droits politiques du PCV et des travailleurs vénézuéliens » et « expose également le caractère autoritaire, antidémocratique et réactionnaire du gouvernement PSUV, qui croit à tort qu’il soumettra les communistes vénézuéliens par cette manœuvre ».
Henry Parra a été nommé à la tête de l’équipe chargée de remettre le PCV sur la bonne voie. Longtemps membre du parti communiste, Parra l’avait quitté en 2021 pour se rapprocher du PSUV. La direction « sortante » du PCV traite Parra et ses camarades de « mercenaires » du pouvoir. Profitant de cette situation toute l’opposition (y compris de droite) a manifesté samedi sa solidarité envers le Parti communiste.
Le PCV critiquait depuis plusieurs mois le « virage néolibéral » de Maduro (la fin du contrôle des changes et des prix, la dollarisation de fait de l’économie ou encore l’ouverture de la région minière de l’Orénoque aux investisseurs étrangers). Il dénonçait de plus en plus fortement la corruption et des privations imposées aux classes populaires.
Diosdado Cabello, le vice-président du Parti socialiste unifié, déclarait depuis des mois que la base du Parti communiste n’approuvait pas la ligne de la direction. La semaine dernière, juste avant que le TSJ ne rende publique sa décision, M. Diosdado était en visite officielle à La Havane. Et le 10 août, lors de la visite de Cabello, Granma titrait » Le PCC et le PSUV seront toujours sur le même voie de la Révolution ». On imagine mal les Vénézuéliens ne pas avoir informé les Cubains de leurs intentions à l’égard du PCV.
A contre-pied de cette position, le KKE déclare « Le gouvernement social-démocrate du président Nicolas Maduro, a procédé à un coup d’État inacceptable et honteux contre le Parti communiste du Venezuela (PCV), imposant par une sentence judiciaire une « direction » fantoche composée de mercenaires. Cette activité est le résultat d’une attaque croissante orchestrée par l’État vénézuélien contre les communistes et le mouvement de la classe ouvrière du pays. »
Comment analyser cet événement ?
Bien entendu on peut dire comme les dogmatiques que Chavez, Maduro, le PSUV sont sociaux-démocrates et que par nature de classe ils frappent les communistes. Donc circulez y a rien d’autre à voir, c’est l’éternel retour de la trahison du « social-fascisme ». Une seule solution, la dictature du prolétariat.
Avec ça on est bien avancé. Ce n’est pas « une analyse concrète de la situation concrète, » c’est la répétition ad nauseum des mêmes versets de la bible jdanovienne. Ne manque que l’exigence du Frexit. Et un appel à la révolution « socialiste-communiste » lancée par une poignée de septuagénaires. Rien d’enrichissant, ni même de sérieux.
Même s’il l’on doit constater que des partis communistes comme le PC Portugais, le PC Espagnol, le PC Chilien, le PC Brésilien, le PC de la Fédération de Russie et même le PCF, le PTB ou le Parti communiste cubain n’ont pas adhéré à cette vision…primitive des choses.
D’ailleurs ce sont surtout des groupuscules, pour la majorité d’entre eux, qui se sont alignés sur la position du KKE. Il faut dire que la PC Grec a au moins de la suite dans les idées puisqu’il a toujours pris ses distances vis à vis de ce qu’il appelle « le soi-disant socialisme du XXI e siècle ». Pour ce qui est de la France c’est le PCRF qui est cité « officiellement » et non le PRCF. Le plus inconditionnel est récompensé.
Mais par ailleurs le silence gêné des autres n’est guère plus constructif. Sans compter que même si l’on diverge avec un PC le minimum c’est de défendre son droit à l’expression. Au moins si on est démocrate. Aussi l’intervention du Tribunal supérieur de justice peut légitimement sembler, pour le moins, inopportune. Et finalement assez proche des méthodes staliniennes desquelles certains, qui s’offusquent aujourd’hui, sont pourtant demandeurs…
Bref que Maduro et le PSUV ne veuillent voir aucune tête dépasser et aucune critique venant de leur gauche n’est pas un signe de force mais au contraire de faiblesse. Et que le PCV et le PSUV, engagés dans un processus révolutionnaire complexe, face à des adversaires extrêmement puissants, ne puissent pas régler leurs divergences autrement qu’en s’entre-déchirant publiquement n’est certainement un signe positif pour ceux qui, comme nous, regardons avec une vive sympathie le bolivarisme.
Antoine Manessis.
* « Nous nous sommes tant aimés » titre du magnifique film du cinéaste italien Ettore Scola, par ailleurs militant du PCI. Il contribua au film-documentaire L’addio a Enrico Berlinguer aux côtés des plus grands réalisateurs italiens.
Source : « Nous nous sommes tant aimés » * – NBH-pour-un-nouveau-bloc-historique.over-blog.com
URL de cet article : « Nous nous sommes tant aimés » * (NBH – 18/08/23) – L’Hermine Rouge (lherminerouge.fr)