À Brest, le rattrapage de notes de plusieurs étudiants de cinquième année de médecine interpelle. L’université vient d’acter la modification des modalités de validation.
Par Paul BOHEC.
Ils n’ont pas eu la moyenne dans une matière hors santé. Et auraient dû redoubler leur cinquième année de médecine et donc ne pas pouvoir passer le concours de l’internat. Pourtant, ces quatre étudiants de l’Université de Bretagne Occidentale (UBO) ont vu leur année être validée après décision du jury.
Une décision qui pourrait sembler anecdotique mais qui ne l’est finalement pas tant puisque, à la suite de cette histoire, la Commission de la formation et de la vie universitaire (CFVU) a officiellement acté, en décembre, la modification des modalités de validation du deuxième cycle des études de médecine.
Quatre étudiants concernés… dont le fils de la doyenne
Pour comprendre pourquoi, il faut remonter le fil. Retour au début de l’été, au moment du passage des examens de fin de cinquième année de médecine. À leur issue, quatre étudiants – un autre étudiant est aussi concerné mais a demandé à redoubler volontairement – n’obtiennent pas la moyenne dans une option obligatoire hors santé, pourtant impérative pour pouvoir passer en sixième année… et donc les concours. Parmi ces quatre étudiants, le fils de la doyenne de la fac de médecine.
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En interne, l’affaire provoque de nombreux remous. Des tensions consécutives conduisent à « l’exfiltration » du responsable de scolarité de la fac de médecine, nommé directeur des affaires juridiques au cabinet de la présidence. Selon nos informations, Pascal Olivard, le président de l’université, mène plusieurs auditions dans le courant du mois de septembre, dont celle de la doyenne. « Il m’a été expliqué qu’au regard de la complexité des années d’études de médecine et de la crise des vocations, le jury avait décidé de leur accorder leur année. Rien ne me laisse à penser que ces étudiants aient bénéficié d’un passe-droit. Mais si, d’aventure, de nouveaux éléments étaient portés à ma connaissance, je ferai preuve d’une intransigeance absolue. Je ne mollirai pas », assène-t-il.
« Un gâchis intégral » de les faire redoubler
Directrice de l’UFR (Unité de Formation et de Recherche) de médecine, Béatrice Cochener se défend, assurant que « ce n’est pas que son fils mais un groupe de cinq étudiants qui est concerné ». « D’ailleurs, reprend-elle, s’il avait été seul, je n’aurais jamais accepté que son année soit validée ». La doyenne précise « n’avoir aucun droit de regard sur la décision du jury » mais que « la situation était ubuesque à l’heure où l’on a un manque d’internes pour assurer la permanence des soins ». Elle assure également avoir rencontré à plusieurs reprises des étudiants de cinquième année et leurs représentants pour se « sécuriser ». Sollicités, ni Cédric Janneau, élu de la promotion, ni l’association nationale des étudiants en médecine de France n’ont accepté de répondre à nos questions.
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Contactée elle aussi, la présidente du jury de cinquième année, Véronique Kerlan, livre ses explications : « Cela aurait été un gâchis intégral de faire redoubler ces étudiants pour une seule matière qui n’impacte pas leurs qualifications médicales ».
Nous n’avons pénalisé aucun étudiant. Nous avons même consenti à du rattrapage dans des options médicales, ce qui n’arrive jamais d’habitude
D’après nos informations, ces étudiants ont obtenu, par ailleurs, des notes globalement bien suffisantes dans les matières médicales. « Faute de pouvoir organiser une nouvelle session en septembre, valider l’année à ces étudiants était la seule solution envisageable », indique Véronique Kerlan.
Un sentiment d’injustice ?
Cette décision peut-elle avoir fait naître un sentiment d’injustice auprès d’étudiants qui n’ont pas eu leur cinquième année en raison de notes insuffisantes dans d’autres matières, alors qu’ils auraient pu faire l’impasse sur cette option ? « Je ne peux pas dire que c’est faux. C’est extrêmement contrariant », reconnaît la professeure en endocrinologie, diabète et maladies métaboliques. « Mais nous n’avons pénalisé aucun étudiant. Nous avons même consenti à du rattrapage dans des options médicales, ce qui n’arrive jamais d’habitude. »
Une situation qui aura fini par conduire l’université à revoir les règles du jeu pour s’éviter de nouveaux remous de ce type.
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