À Paris, la plus grosse manifestation de l’ère Macron. ( Rapports de Force – 19/01/23 )

400 000 personnes ont manifesté à Paris contre la réforme des retraites, selon les syndicats. Pour la police ils étaient 80 000. Malgré les écarts de chiffres, organisations syndicales et ministère de l’intérieur s’accordent sur un fait : ce 19 janvier a vu naître la plus grosse manifestation de l’ère Macron. La première étape d’un mouvement qui va s’ancrer dans la durée ? L’intersyndicale a déjà annoncé une prochaine journée de grève interprofessionnelle le 31 janvier.

A Paris, c’est un cortège massif qui s’est lentement élancé de la place de la République jusqu’à la place de la Nation. La CGT a annoncé 400 000 personnes, la police 80 000. Le 5 décembre 2019, lors de la première manifestation contre la retraite à points, les chiffres étaient en deçà du résultat du jour. Respectivement 250 000 pour les organisations syndicales et 65 000 pour la police. A l’échelle nationale, Philippe Martinez a déclaré 2 millions de manifestants, les forces de l’ordre 1,12 million. Tout le monde est donc d’accord : la manifestation du jour est bien la plus grosse jamais vue sous l’ère Macron.

« Je ne m’attendais pas à une mobilisation de cette taille »

Dans le cortège parisien, si  de nombreux manifestants s’attendaient à une forte mobilisation, ils se disent également agréablement surpris du nombre de personnes présentes. Le flux est si important qu’il alimente deux cortèges, l’un boulevard Voltaire, l’autre boulevard du Temple. « C’est fort, très fort, se réjouit Jacques Borensztejn, secrétaire adjoint de la fédération parisienne de FO. Je ne m’attendais pas à une mobilisation de cette taille. Au-delà de la manifestation, les échos qui nous reviennent des premières assemblées générales (AG) sont encourageants. La grève continue et, dans certaines AG, ils ont appelé à la grève jusqu’au retrait. »

Au jeu de la comparaison avec la mobilisation de décembre 2019, cette nouvelle date présente quelques avantages, assure l’élu syndical : le nombre mais aussi la rapidité de la mobilisation. « Le 5 décembre 2019, la mobilisation avait été préparée dès septembre. Là, en 9 jours seulement on a eu un mouvement assez fort. »

Un levier pour le futur

Quelques centaines de mètres avant la place de la Bastille, un nombre assez important de manifestants ont affronté la police pendant plusieurs heures. En amont du parcours, l’ambiance s’avérait beaucoup plus conviviale : on y croisait des manifestants de tout âge, ce qui pouvait contraster avec les manifestations des dernières années. Une base sur laquelle construire de futures mobilisations, au-delà même du mouvement contre la réforme des retraites ? Pour Wag, étudiant à l’Université Paris 13, cette lutte peut être « un levier ». « Il y a eu beaucoup de lois dégueulasses : celles sur les expulsions des locataires, sur l’assurance chômage, sur la dissolution des associations. Par exemple, la lutte pour les travailleurs sans papiers mobilise moins de monde et ça ne veut pas dire que c’est moins important. » Dans son université, il assure que la mobilisation reste cependant à construire.

« Il y a des gens qui sont en retard. Ils ne sont pas vraiment politisés. » Laurent, comédien, fait le même constat dans son secteur. « Dans l’ensemble, c’est une profession peu syndiquée », souligne celui qui appartient au syndicat français des artistes interprètes et assure avoir une « longue histoire de syndicalisation ». « Les mobilisations sont bonnes pour faire avancer la lutte mais aussi en tant qu’outil d’éducation populaire », continue-t-il.

Les 60 ans, tout de suite ?

Dans le cortège parisien, de nombreuses pancartes revendiquent un retour à 60 ans de l’âge de la retraite. Mais les manifestants rencontrés au long du parcours, d’accord sur le fond de la revendication, se montrent sceptiques sur la possibilité de dépasser la stricte lutte défensive. « Oui, nous avons des propositions d’amélioration. Mais le premier objectif, c’est de faire tomber la réforme », assure Jacques Borensztejn. « Techniquement, on pourrait baisser l’âge à 55 ans et travailler 20 ou 25 heures par semaine, souligne Laurent. Mais politiquement, ce n’est pas évident de le demander là tout de suite. » Pour Wag, cette mobilisation est une « revanche ». « Pourquoi on a les 62 ans ? Car on a perdu en 2010. » Alors que le gouvernement mise sa crédibilité politique sur cette réforme, les prochaines semaines s’annoncent cruciales pour inverser le rapport de force. Prochain rendez-vous le 31 janvier.

Crédit photo : Ricardo Parreira

Auteur : Victor Fernandez

Source : À Paris, la plus grosse manifestation de l’ère Macron – Rapports de Force

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