À Plogonnec (29), pour contrer la spéculation foncière, ces paysans bios voient la vie en yourte ! (LT.fr-21/02/23)

Depuis un peu plus d’un an, Erwan et Audrey vivent dans une yourte mongole installée sur leur terrain, à Plogonnec. Un moyen ingénieux, pour ces deux paysans bios, de contourner la spéculation foncière et l’explosion des prix de l’immobilier.
À l’heure où de nombreux agriculteurs, acculés par la spéculation foncière, renoncent à leur projet, Erwan et Audrey, jeunes paysans bios de Plogonnec, ont trouvé la solution : la vie en yourte. Un mode de vie minimaliste, certes, mais idéal pour revenir à l’essentiel.

Quand il regarde son terrain, vaste lande verdoyante et sauvage, Erwan Julien, tout jeune agriculteur installé à Plogonnec, se réjouit. Mais, dans un coin de sa tête, il ne peut s’empêcher de penser au passé : « Aujourd’hui, il n’y a qu’une seule ferme sur l’ensemble du terrain… Autrefois, il y en avait une dizaine ».

Si l’espace à l’intérieur de la yourte est restreint (28 m2), Erwan et Audrey ont su en faire leur cocon : « J’aime bien vivre en rond », affirme la paysanne. « L’intérieur est confortable, on utilise
Si l’espace à l’intérieur de la yourte est restreint (28 m2), Erwan et Audrey ont su en faire leur cocon : « J’aime bien vivre en rond », affirme la paysanne. « L’intérieur est confortable, on utilise la structure au plafond pour accrocher des objets, comme de la décoration… C’est notre chez-nous ».

Le retour des paysans

Cet « autrefois » auquel Erwan fait référence, c’est la France d’avant les années 60, quand l’agriculture paysanne était encore la norme, somme de petites parcelles séparées les unes des autres par un bocage. À l’époque, l’Hexagone comptait six millions d’agriculteurs. Aujourd’hui, il n’y en a plus que 400 000. Un ratio qui, s’il en décourage plus d’un, n’empêche pas certains jeunes de tout plaquer pour saisir la bêche… à l’instar d’Erwan Julien. Originaire de Plogonnec, cet amoureux de la nature n’a pas laissé les chiffres compromettre son projet : « Un jour, j’ai compris que ce que je voulais vraiment, c’était vivre de la terre. Revenir à l’essentiel, vivre au rythme des éléments… Même si je savais que les débuts pouvaient être difficiles ».

D’emblée, avec Audrey, ma compagne, nous avons exclu la possibilité de construire une maison. Être endetté sur des années, ça ne nous dit rien. Selon moi, c’est le meilleur moyen de passer à côté de sa vie.

L’habitat léger, une alternative durable et économique

De fait, en 2023, les freins à l’installation des jeunes agriculteurs sont nombreux : prix du foncier agricole en hausse, explosion des prix de l’immobilier, inflation des tarifs énergétiques… : « Pour le terrain, j’ai eu de la chance, se souvient le Plogonnecois. Je l’ai acheté juste avant que les prix ne montent trop. Aujourd’hui, je paierais le double ». L’exploitation trouvée, restait une problématique : le logement.

« D’emblée, avec Audrey, ma compagne, nous avons exclu la possibilité de construire une maison, indique Erwan. Être endetté sur des années, ça ne nous dit rien. Selon moi, c’est le meilleur moyen de passer à côté de sa vie ». Le couple songe alors aux habitats légers : « On a d’abord pensé aux tiny-houses, mais leur prix a explosé ces dernières années. Notre mobil-home, lui, était trop long à retaper… Finalement, on a trouvé une yourte sur Leboncoin ».

Authentique habitat mongol, la yourte d’Erwan et Audrey est presque exclusivement composée d’éléments naturels : bois d’épicéa, laine de mouton feutrée pour l’isolation, tendons de mouton pour relier
Authentique habitat mongol, la yourte d’Erwan et Audrey est presque exclusivement composée d’éléments naturels : bois d’épicéa, laine de mouton feutrée pour l’isolation, tendons de mouton pour relier les éléments de la structure entre eux… : « C’est une pièce de musée ! », confirme Erwan.

« En tout, on en a eu pour moins de 5 000 € »

Habitat traditionnel des communautés nomades de Mongolie, la yourte d’Erwan et Audrey a tout d’un habitat classique si ce n’est sa taille – 28 m2 – et son prix : « En tout, mobilier compris, nous en avons eu pour moins de 5 000 € », indique Erwan, au départ assez dubitatif : « J’avais entendu dire que les yourtes, en Bretagne, ça n’était pas possible à cause de la météo. Au final, il suffit de rajouter un pare-pluie pour être totalement à l’abri ! »

Un petit coin nuit a été aménagé pour Dagan, le fils d’Erwan et Audrey.
Un petit coin nuit a été aménagé pour Dagan, le fils d’Erwan et Audrey.

Reliée à l’eau via un forage et à l’électricité via des panneaux solaires, la yourte est parfaitement fonctionnelle. Pour le chauffage, le couple se sert d’un petit poêle. Quant à internet, les partages de connexion à partir du téléphone font l’affaire : « Il faut voir la surprise des démarcheurs internet quand ils nous appellent et que je leur explique dans quoi on habite : ils pensent tous que c’est une blague ! »

En vivant tel que nous le faisons, nous revoyons peut-être nos exigences de confort à la baisse, mais notre liberté à la hausse.

Aucun boulet financier au pied

Pour Audrey, la vie en yourte s’est avérée un moyen idéal pour revenir à l’essentiel : « Ce mode de vie nous a permis de reprendre conscience de la valeur des choses. On fait le tri entre les vrais et les faux besoins. Et puis, pour les enfants, c’est une belle expérience : ils sont souvent dehors, au contact des éléments… Même si, pour les punir, on ne peut pas leur dire d’aller dans leur chambre ! ». Même s’il gagnait au loto, le couple de paysans n’entend pas faire marche arrière : « On y gagne trop, affirme Erwan. En vivant tel que nous le faisons, nous revoyons peut-être nos exigences de confort à la baisse, mais notre liberté à la hausse ».

Exit l’achat impulsif ! Depuis qu’ils habitent en yourte, Erwan et Audrey font très attention à ce qu’ils achètent, « tout simplement parce qu’on n’a pas la place ! sourit Erwan. On a revu ce sur quoi
Exit l’achat impulsif ! Depuis qu’ils habitent en yourte, Erwan et Audrey font très attention à ce qu’ils achètent, « tout simplement parce qu’on n’a pas la place ! sourit Erwan. On a revu ce sur quoi se porte notre intérêt. En l’occurrence, pour nous, les livres sont très importants… Nous avons plus de bouquins que de vêtements ! »

Laura AYAD

source: https://www.letelegramme.fr/finistere/quimper/a-plogonnec-pour-contrer-la-speculation-fonciere-ces-paysans-bios-voient-la-vie-en-yourte-21-02-2023-13282527.php

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