
Les travaux de cette commission consacrée aux violences dans les établissements scolaires (privés et publics) ont débuté dès ce jeudi 13 mars, avec la visite de « contrôle » du ministère de l’Education, par les corapporteurs Paul Vannier et Violette Spillebout. Les auditions des collectif des victimes, dont celui de Bétharram, débuteront, elles, le 20 mars.
Par Alexandre FACHE.
La scène date du 15 février dernier, à l’hôtel de ville de Pau, elle est restée dans toutes les mémoires : Alain Esquerre, le porte-parole du collectif de victimes de Notre-Dame de Bétharram, questionnant les responsabilités de l’État dans ce scandale étouffé des décennies durant, aux côtés d’un François Bayrou hagard, hésitant, dans les cordes. Tous deux seront au centre des auditions que la commission d’enquête sur les violences commises dans les établissements scolaires (privés et publics) va lancer le 20 mars.
« Nos travaux vont se dérouler en trois temps : d’abord nous allons entendre les collectifs de victimes, puis les administrations, et enfin les responsables politiques », a expliqué Fatiha Keloua Hachi, députée PS et présidente de la commission permanente des Affaires culturelles et de l’Éducation de l’Assemblée nationale, qui dirigera également les débats de cette commission d’enquête, avec les corapporteurs Paul Vannier (FI) et Violette Spillebout (Renaissance).
François Bayrou « pourra probablement éclairer nos travaux »
Le premier à être auditionné, le 20 mars, sera Alain Esquerre, suivi par les porte-parole d’autres collectifs de victimes, mais aussi des responsables de la Ciivise, ou encore Jean-Marc Sauvé, ex-président de la Commission d’enquête indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase).
Le premier ministre François Bayrou devrait passer sur le gril de la commission beaucoup plus tard, en fin de processus, vraisemblablement courant mai. « Comme ministre de l’Éducation entre 1993 et 1997, mais aussi comme président du conseil départemental, il pourra probablement éclairer nos travaux », a indiqué Paul Vannier.
Interrogée sur la possibilité pour le chef du gouvernement, ou sa ministre de l’Éducation, Élisabeth Borne, d’échapper à la convocation de la commission, sa présidente Fatiha Keloua Hachi a été claire : « Ils ne peuvent pas s’y soustraire. Seuls le président de la République ou sa garde rapprochée sont dans ce cas. Bien sûr que M. Bayrou et Mme Borne seront auditionnés par la commission. »
Les parlementaires déjà sur le terrain ce jeudi 13 mars
Les parlementaires risquent d’avoir beaucoup de questions à leur poser. François Bayrou est mis en cause depuis début février par plusieurs témoignages affirmant qu’il était au courant des violences exercées dans l’établissement, ce qu’il dément. Ce mercredi 12 mars, il a également été accusé d’avoir, comme président du département des Pyrénées-Atlantiques, largement subventionné Notre-Dame de Bétharram, en lui accordant, entre 1995 et 1999, pas moins de 1 million de francs (environ 230 000 euros), selon des révélations de Mediapart.
Quant à l’actuelle ministre de l’Éducation, il lui est reproché d’avoir tardé à lancer une inspection dans l’établissement catholique à la suite des récentes révélations. Prévue le 17 mars, celle-ci ne bénéficiera guère de l’effet de surprise… Un atout dont les parlementaires espèrent se parer, eux qui ambitionnent d’exercer leur contrôle « sur le terrain » dans les prochaines semaines. Ce jeudi 13 mars, à 10 heures, Paul Vannier et Violette Spillebout sont d’ailleurs passés à l’action, en s’invitant au ministère de l’Education nationale. Après en être ressortis, trois heures plus tard, avec “de premiers documents”, les deux corapporteurs ont surtout témoigné du peu d’intérêt de l’institution pour ces questions de violences sur les élèves. “Il n’existe pas de centralisation annuelle des faits de violences commis (dans le cadre scolaire) par des adultes sur des enfants”, a constaté Paul Vannier, devant le ministère, rue de Grenelle. Quant à l’application interne censée permettre de faire remonter les faits de violences, “elle n’existe pas pour les établissements privés sous contrat et hors contrat”, ce qui exclut “des millions d’élèves de ce recensement et donc d’une action possible”.
Après d’âpres discussions, la commission a par ailleurs décidé de ne pas limiter ses investigations aux seuls établissements privés sous contrat, comme Notre-Dame de Bétharram, mais de les ouvrir à tous les établissements scolaires, privés comme publics. En revanche, seules les violences commises par les adultes sur les enfants feront partie du périmètre de ses travaux. « Nous avons à répondre à une question très grave : comment tant de crimes, pendant autant d’années, ont-ils pu être commis à Bétharram sans que l’État ne les détecte ? résume Paul Vannier. Une question que nous allons élargir à tous les établissements du pays. Avec l’objectif d’éviter d’autres Bétharram et de protéger les enfants. »
Le rapport final de la commission devrait être rendu d’ici à « la fin juin ». En fonction de ses conclusions, une proposition de loi pourrait être élaborée dans la foulée.
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