Affaire Iquioussen : le coup d’éclat raté de Gérald Darmanin (LH.fr-1/09/22)

Justice-Alors que le Conseil d’État vient de confirmer l’arrêté d’expulsion, de l’imam Hassan Iquioussen, celui-ci est en fuite. Une aubaine pour l’extrême droite, qui dénonce la porosité des frontières et espère impulser une nouvelle loi sur l’immigration, plus répressive

Gérald Darmanin avait voulu régler l’affaire rapidement en faisant grand bruit : il faisait mine de découvrir la dangerosité des propos d’un imam proche des Frères musulmans, Hassan Iquioussen, en ordonnant son expulsion le 28 juillet, lui reprochant des appels à la haine et à la violence, notamment contre la communauté juive et les femmes, tenus il y a près de vingt ans pour certains. Le ministre de l’Intérieur révélait alors que l’imam était fiché S par la DGSI « depuis dix-huit mois ».

Né en France, il avait opté pour la nationalité marocaine à sa majorité

« Il sera expulsé du territoire national. Dès son interpellation, il sera placé en centre de rétention administrative », assurait mardi soir Gérald Darmanin devant son ministère, alors que le Conseil d’État venait d’approuver sa décision d’expulsion. Tout l’été, l’avocate de Hassan Iquioussen avait fait des recours pour empêcher le renvoi de son client au Maroc, pays dont il possède la nationalité mais dans lequel il n’a jamais vécu. Né en France, père d’enfants et grand-père de petits-enfants français, il avait opté pour la nationalité marocaine à sa majorité.

Si la Ligue des droits de l’homme condamnait fermement « certains des propos tenus par l’intéressé par le passé », l’association avait soutenu la requête en référé liberté contre l’arrêté d’expulsion, en août, « du territoire français, où il est né, a toujours vécu et où il a fondé sa famille et alors même qu’il n’a jamais fait l’objet de la moindre condamnation pénale ». Le tribunal administratif avait suivi ces arguments, évoquant qu’une expulsion porterait une « atteinte disproportionnée » à sa « vie privée et familiale ».

Un dîner pour des votes

Gérald Darmanin avait immédiatement réagi, annonçant faire appel au Conseil d’État. Le ministre ajoutant plus tard : « Soit la loi permet à la France de se protéger, soit elle ne permet pas de l’expulser et, dans ce cas, il faudra changer la loi pour défendre davantage les Français. »

Le porte-parole du gouvernement avait insisté dans ce sens en estimant qu’un refus d’expulsion de la part du Conseil d’État « serait un très mauvais signal ». Des interventions « inquiétantes pour l’État de droit », avaient souligné la LDH et des élus de gauche.

Pourtant, en 2014, la position du ministre ne semblait pas être la même, révélait la semaine dernière Mediapart. Avant les élections à Tourcoing, dont il visait la mairie, Gérald Darmanin aurait dîné avec Hassan Iquioussen et d’autres personnalités de la communauté musulmane locale pour rallier leur vote. Un dîner confirmé par l’imam du Nord. Ses propos à caractère antisémite avaient pourtant déjà été révélés et même pointés par l’Humanité dès 2004… Ce qui n’empêche pas aujourd’hui Gérald Darmanin de tourner casaque pour mieux vendre sa nouvelle loi sur l’immigration, en préparation.

Injures et des menaces de mort

Mardi, le Conseil d’État a suivi ses arguments. Pour le juge des référés « M. Iquioussen tenait un discours systématique sur l’infériorité de la femme ». Le Conseil d’État ne croit pas aux excuses de l’imam sur ses discours antisémites, estimées « en réaction à l’émotion que ses propos avaient suscitée ». Aujourd’hui, l’imam est en fuite, relançant un discours d’extrême droite sur la porosité de nos frontières, alors que son avocate et l’un des trois magistrats du tribunal administratif ont reçu des injures et des menaces de mort.

Kareen JANSELME

source: https://www.humanite.fr/societe/expulsion-du-territoire/affaire-iquioussen-le-coup-d-eclat-rate-de-gerald-darmanin-762004

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