Algues vertes : en rade de Brest, un fléau moins visible mais tout aussi destructeur. ( OF.fr – 21/11/22 – 20h30)

« Le souci c’est que personne ne met la tête sous l’eau ici », déplore Alain Pibot, chef de projet LIFE IP Marha à l’Office français de la biodiversité
« Le souci c’est que personne ne met la tête sous l’eau ici », déplore Alain Pibot, chef de projet LIFE IP Marha à l’Office français de la biodiversité.

La rade de Brest ne fait pas partie des huit baies concernées par le plan de lutte contre la prolifération des algues vertes (Plav). Les blooms s’y accumulent pourtant en masse, tapis dans le fond, asphyxiant l’écosystème de ce joyau de biodiversité. L’Office français de la biodiversité tire la sonnette d’alarme.


C’est un angle mort du traitement médiatique et politique des algues vertes. La rade de Brest, petite mer fermée à la valeur écologique inestimable, est envahie par ces blooms toxiques qui s’accumulent dans le fond, créant un tamis pouvant atteindre un mètre d’épaisseur. Ce bassin n’est pourtant pas classé « zones soumises à contraintes environnementales (ZSCE) » par le plan de lutte contre la prolifération des algues vertes (Plav). La troisième version de ce plan a été adoptée par le conseil régional de Bretagne le 14 octobre 2022. Huit baies bretonnes sont considérées comme hautement menacées. Mais pas la rade de Brest.

Une plaie invisible

À cela, Alain Pibot voit une explication : « Ici le phénomène est presque invisible, car les algues restent au fond de l’eau. Il y a trop peu de houle pour qu’elles se déposent sur les plages », détaille l’agent de l’Office français pour la biodiversité (OFB), en observant la baie de Daoulas. Les risques sanitaires pour l’homme sont donc limités, de même que la gêne olfactive engendrée par la décomposition des végétaux marins.

Mais pour la biodiversité, ça reste un désastre. Les algues vertes qui sédimentent le fond de la rade meurent, puis entrent en fermentation, et privent le milieu de lumière mais aussi d’oxygène.

Les espèces emmêlées dans cet épais tamis d’algues résistent rarement | ALAIN PIBOT (OFB)

« On fait des suivis depuis trois ans et la mortalité des espèces ne cesse d’augmenter », alerte Alain Pibot en mettant l’accent sur la disparition des bancs de maërl. Comparable aux récifs coralliens, cet habitat naturel accueille une richesse biologique estimée à plus de 1 000 espèces. Un écosystème qui occupait initialement la moitié de la rade de Brest, et aujourd’hui plus que le dixième.

Les coquillages qui font la richesse écologique et économique de ce bassin – Saint-Jacques, pétoncles noirs, huîtres, etc. – sont aussi menacés par la dégradation de la qualité de l’eau. À cela s’ajoutent les espèces qui s’emmêlent et s’asphyxient dans cet épais tamis d’algues, hippocampes, crabes, poissons…

Les algues vertes asphyxient le milieu naturel, à commencer par les bancs de maërl qui servent d’habitats à de nombreuses espèces | ALAIN PIBOT (OFB)

Un site vulnérable

L’origine du problème est bien connue, ici comme ailleurs en Bretagne. La rade de Brest est alimentée par des cours d’eau, l’Elorn et l’Aulne principalement, qui charrient des polluants d’origine urbaine et agricole. Les rejets du bassin-versant de 2 645 km² atterrissent dans ce bassin de 184 km², où l’eau est peu renouvelée (une goutte d’eau y séjourne trois mois en moyenne). Pour ne rien arranger, la rade de Brest est peu profonde : 58 % de sa surface fait moins de 10 mètres, ce qui en fait un site particulièrement vulnérable.

Auteur : Julia TOUSSAINT.

Source : Algues vertes : en rade de Brest, un fléau moins visible mais tout aussi destructeur (ouest-france.fr)

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