Par Benoit GUÉRIN.
Dans le Morbihan, les élections sénatoriales n’ont pas bouleversé les équilibres de 2017. La droite et le centre conservent leur siège. À gauche, c’est un autre groupe qui va profiter de la victoire de Simon Uzenat. Le RN, discrètement, fait quatre fois mieux qu’en 2017.
Statu quo, ou presque. Voilà comment pourrait se résumer le résultat des élections sénatoriales dans le Morbihan, dimanche 24 septembre 2023. Trois sénateurs ont été élus : Muriel Jourda, Yves Bleunven et Simon Uzenat. Une sénatrice réélue, deux nouvelles têtes, mais un éventail politique qui ne change pas. La droite, le centre et la gauche seront à nouveau représentés au Sénat. Retour sur les trois principaux enseignements politiques de la soirée.
Un statu quo prévisible, mais à nuancer
On s’en doutait : le Morbihan n’a ni viré à gauche toute (comme en 2011) ni viré à droite. Sur ce point, la tempérance politique du département breton reste un marqueur fort et… prévisible. Dimanche soir, au Palais des arts, les élus locaux et parlementaires pronostiquaient tous, sauf accident industriel, la victoire de Muriel Jourda, sénatrice sortante LR, et celle du centriste Yves Bleunven, maire de Grand-Champ et président de l’association des maires du Morbihan.
En revanche, tous se faisaient beaucoup plus hésitants sur la liste de gauche susceptible de l’emporter. Entre Thérèse Thiéry, l’ancienne maire de Lanester, et Simon Uzenat, conseiller régional et élu socialiste vannetais, la balance a finalement penché en faveur du candidat de 38 ans, avec 64 voix de plus (360 au total, 19,09 % des suffrages) que sa concurrente.
La gauche morbihannaise ne siègera donc pas dans le même groupe que celui de Joël Labbé, sénateur sortant du Morbihan, qui ne se représentait pas. « Je souhaitais être remplacé dans le groupe écologiste du Sénat, et ce ne sera pas le cas. Simon (Uzenat) a fait une bonne campagne, il est élu et il y aura quand même un élu de gauche », souligne l’intéressé, qui soutenait Thérèse Thiéry.
Uzenat, l’expérience du Sénat
« Simon ! Simon ! » Les soutiens de Simon Uzenat ont donné de la voix quelques secondes après l’annonce – très tardive, deux heures après le début du dépouillement – des résultats, dimanche. Aucun autre élu n’a eu droit à cette ovation, mais il faut dire que le suspense se jouait surtout à gauche.
Simon Uzenat, « c’est le commis qui a repris la ferme », s’amuse Jo Kerguéris, présent à Vannes, ancien sénateur centriste (de 2011 à 2011). Une référence à l’expérience sénatoriale de l’élu vannetais, qui a été l’attaché parlementaire d’Odette Herviaux, sénatrice socialiste du Morbihan de 2007 à 2017.
« C’est une expérience que j’ai mise en avant durant la campagne, rappelle l’intéressé. J’ai dit aux grands électeurs que si on me faisait confiance, je serais immédiatement opérationnel. » Un argument qui a sans doute joué, en plus d’un programme très précis et d’une campagne intense sur le terrain. « On a vraiment proposé un programme détaillé, qu’on a pris le temps d’expliquer, ça fait six mois qu’on travaille dessus », résume Pascale Gillet, maire de Baud, très émue à l’annonce des résultats.
Le RN, perdant, mais quatre fois plus fort
En dehors du match qui a agité la gauche toute la journée, et de la victoire des deux favoris, d’autres signaux politiques ont été envoyés par une partie des 1938 grands électeurs du Morbihan, constitués d’une immense majorité d’élus locaux, désignés par leurs conseils municipaux.
Première évidence : le RN fait presque quatre fois mieux qu’en 2017. Florent de Kersauson, sans vraiment avoir fait campagne, a rassemblé 98 voix. C’est peu, mais c’est presque quatre fois le score de son parti en 2017. Bertrand Iragne, tête de liste à l’époque, n’avait réussi à séduire que 26 grands électeurs. « C’est le signe du malaise que l’on peut connaître dans nos campagnes. Il touche les électeurs, ce n’est pas nouveau, mais il commence à s’exprimer aussi aux élections sénatoriales, chez nos élus », constate Muriel Jourda.
Leurs réactions
Muriel Jourda : « Je suis satisfaite d’être arrivée en tête. Ma réélection est la reconnaissance d’un travail que j’ai pu faire depuis six ans. Je n’ai pas regardé les chiffres en détail, mais il me semble que les équilibres politiques ne sont pas bouleversés à l’occasion de ces élections. Il n’y a pas grand-chose de nouveau. Ma priorité désormais est de rester à la commission des lois où j’ai siégé six ans, et de continuer de travailler sur le projet de loi sur l’immigration dont je suis co-rapporteur au Sénat. »
Yves Bleunven : « Je suis satisfait d’avoir été élu. Il y a clairement une prime au sortant. Muriel Jourda a fait du terrain pendant six ans, et ça paye. Je note également que si l’on additionne les voix des deux principales listes de gauche, ça fait un score assez important, supérieur à ce qu’on avait pu imaginer. Le Rassemblement national passe de 26 voix en 2017 à une centaine. Il y a donc des éparpillements et des consolidations qu’il faut prendre le temps d’analyser. Je siégerai dans le même groupe que celui de Jacques Le Nay, l’union centriste. Je resterai conseiller municipal à Grand-Champ et conseiller communautaire. »
Simon Uzenat : « On a donné le meilleur de nous-mêmes. On a beaucoup travaillé et mis en avant nos 80 propositions durant cette campagne. Je serai un sénateur présent aux côtés de tous les élus locaux du Morbihan, de façon régulière et très étroite. Il y a beaucoup de travail, sur le statut des élus, les finances locales, les priorités environnementales, à mener rapidement. »
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