Avec l’annulation de l’A69, les opposants pourraient être relaxés (reporterre-13/03/25)

Des gendarmes mobiles devant les arbres occupés par des militants à la Crem’arbre, à Saïx, le 20 février 2024. – © Antoine Berlioz / Reporterre

Huit militants étaient jugés à Castres, le 12 mars, pour avoir occupé des arbres sur le tracé de l’A69. L’autorisation de l’autoroute étant annulée, ils pourraient être relaxés. Le procès a été renvoyé au 6 mai.

Par Justin CARRETTE.

Castres (Tarn), correspondance

« L’annulation d’un acte administratif enlève toute base légale aux poursuites contre les militants. » Maître Claire Dujardin, avocate des huit prévenus qui comparaissaient devant le tribunal judiciaire de Castres le 12 mars, ne cache pas son mécontentement. Quelques minutes plus tôt, la présidente a décidé de renvoyer le procès des huit « écureuils » — ces militants perchés dans les arbres — dans deux mois, le 6 mai 2025, notamment pour prendre du recul par rapport « à la décision très récente du tribunal administratif de Toulouse ».

Le 27 février, les juges toulousains avaient décidé d’annuler l’autorisation environnementale de l’A69, l’autoroute entre Toulouse et Castres, entraînant par la même occasion l’arrêt immédiat du chantier.

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« On n’avait pas besoin de cette décision pour savoir que notre action dans les arbres était nécessaire et urgente, mais on se sent encore plus légitimes », dit Saiga, l’une des prévenues, qui a passé 40 jours perchée dans sa cabane sur la zad de la « Crem’arbre », à Saïx, en février 2024. Sur le parvis du tribunal de Castres, peu après le renvoi du procès, elle ajoute : « J’étais stressée émotionnellement pour ce procès, de revivre tout cela. J’avais envie de mettre tout cela derrière moi, mais malheureusement, on va encore devoir attendre deux mois. »

« Qui était dans l’illégalité finalement ? »

Maître Claire Dujardin semblait pourtant confiante quant à une possible relaxe des prévenus. « Il existe une jurisprudence de la Cour de cassation du 16 novembre 2010, qui dit clairement que l’annulation d’un acte administratif implique que cet acte est réputé n’avoir jamais existé et prive de base légale toute poursuite engagée pour violation de cet acte. » Une jurisprudence à nouveau rappelée lors d’une décision de la chambre criminelle de la Cour le 12 décembre 2012.

Concrètement, l’annulation de l’autorisation environnementale de l’A69 par le tribunal administratif de Toulouse pourrait entraîner la relaxe de tous les opposants poursuivis pour le blocage du chantier ou des machines, au nom du « principe de l’autorité de la chose jugée », puisqu’il n’existerait plus aucune base légale pour les condamner.

« Qui était dans l’illégalité finalement ? Le concessionnaire et les pouvoirs publics, qui ont sciemment décidé de commencer un chantier en s’appuyant sur une autorisation environnementale très bancale, ou les militants, qui ont essayé par tous les moyens de sauver les arbres et les écosystèmes sur le tracé ? La justice nous a donné raison », lance une militante devant le tribunal judiciaire de Castres.

Aucune base légale

Lors du procès, qui n’aura duré finalement que quelques minutes avant le renvoi de l’audience au 6 mai, un contrôle judiciaire a tout de même été levé. « Depuis le 25 février 2024, j’étais interdit de territoire dans le Tarn et, dans un premier temps, je devais pointer tous les quinze jours au commissariat. C’était extrêmement contraignant », témoigne Ubac, qui a lui aussi résisté dans les arbres de la forêt de la Crémade, à Saïx. « Il n’existe de toute façon plus aucune base légale pour maintenir ce contrôle judiciaire », a soutenu Maître Dujardin devant la présidente.

L’avocate regrette également la position de la procureure de la République, ayant renvoyé le procès. « Le parquet aurait dû demander la fin des poursuites. Il n’y avait aucun problème à condamner les militants alors qu’il existait encore un flou sur la légalité de l’A69. Maintenant, avec la décision du tribunal administratif, on a une évidence juridique, et pourtant, la procureure a demandé le renvoi du procès. »

Au total, 70 procès ont déjà eu lieu ou vont avoir lieu en 2025, selon les comptes des militants. Les poursuites concernent 130 opposants à l’A69, et on dénombre une cinquantaine de contrôles judiciaires, des condamnations à de la prison avec sursis, des peines avec un bracelet électronique ou des interdictions de territoire. Après l’annulation de l’autorisation de l’A69, les opposants espèrent désormais que les tribunaux abandonneront toutes ces poursuites.

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Source: https://reporterre.net/Avec-l-annulation-de-l-A69-les-opposants-pourraient-etre-relaxes

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