Interview de Caroline Viau et Cédric Quintin, responsables de l’union départementale CGT du Val-de-Marne qui a lancé une campagne contre la guerre.
Le 20 janvier, Macron annonce 413 milliards d’euros pour l’armée (future loi de programmation militaire). Et déclare : « Nous devons avoir une guerre d’avance. » Votre réaction à ça ?
Les orientations de la loi de programmation militaire (LPM) ont été annoncées par Macron lors des vœux aux armées fin janvier, sans aucune concertation ni débat démocratique. Les 413 milliards annoncés de facto représentent le double du budget de la dernière loi de programmation 2017-2023. Macron se targue de vouloir construire une « économie de guerre ».
De ce fait et de par son adhésion à l’Otan, la France participe activement à la sur-militarisation de l’Europe, au moment même où l’Allemagne réinvestit dans l’armement pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. C’est une escalade extrêmement grave. La France s’inscrit dans un discours guerrier qui annonce un avenir très inquiétant, avec un risque de guerre mondiale nucléaire.
L’UD CGT 94 ne pouvait pas rester sans réaction. Nous sommes scandalisé.e.s de ces positions belliqueuses et partisanes. En tant que syndicalistes à la CGT, c’est un devoir pour nous de nous y opposer.
En pleine période de lutte contre le projet de réforme des retraites, projet qui s’appuie sur l’argument fallacieux du déficit des caisses de retraite, l’augmentation exponentielle des dépenses militaires se fera au détriment du financement des services publics de la santé, de l’éducation, des transports.
On peut ajouter que, dans les 413 milliards, est prévu le doublement du nombre de bataillons militaires professionnels sous le commandement de l’Otan et l’augmentation du nombre de réservistes.
Pourquoi est-il important que le mouvement ouvrier combatte les « guerres impérialistes » (comme les qualifie l’UD CGT 94) de Poutine, de l’Otan, de Macron ?
Dénoncer l’impérialisme est une évidence pour nous. Il n’est rien d’autre que le bras armé du capitalisme. Il porte en lui la guerre, détruit les démocraties et les individus.
En tant qu’internationalistes, à visée révolutionnaire, qui se battent dans le sens du progrès social, pour la paix et le désarmement, pour la fraternité entre les peuples, nous nous opposons à cet ordre impérialiste mondial qui n’a que pour ambition de toujours de dominer le voisin.
Plutôt que de garantir à l’humanité la paix, ce système est fondé sur le pillage des richesses, la domination des populations et la destruction de l’environnement.
Quelles initiatives avez-vous engagées ou souhaitez-vous prendre contre la guerre ? La première exigence, n’est-ce pas : cessez-le feu-immédiat, arrêt des envois d’armes ?
En même temps que d’être sur le front des questions sociales, nous avons décidé de lancer la campagne « Pas un euro, pas une arme, pas un soldat » contre la guerre car nous avons conscience qu’il ne peut pas y avoir de progrès social dans un monde en guerre.
C’est très important pour nous, malgré le contexte social explosif en France, de continuer d’agir sur ces questions, en particulier avec ce qu’il se passe en Ukraine. Nous voulons informer, mobiliser pour gagner une solution de paix par la voie diplomatique. La France s’honorerait à tout mettre en œuvre pour organiser une conférence internationale sur la paix, à imposer l’issue diplomatique plutôt que d’en rajouter dans la surenchère et les menaces par le biais de l’armement militaire.
En ce qui concerne le conflit en Ukraine, cette campagne alerte sur le matraquage idéologique imposé par les puissances occidentales et les grands médias. Il est important de revenir à l’origine du conflit. La guerre dans le Donbass a tué plus de 14 000 personnes depuis 2014.
Les Etats-Unis, l’Otan et donc l’Ukraine ont refusé de respecter les accords de Minsk. Il ne s’agit pas de défendre Poutine, mais cette attaque se fait en réaction à l’offensive que portent les Etats-Unis via l’Otan, en Europe mais aussi partout dans le monde.
Dans le cadre de cette campagne, nous avons mis à disposition un tract, une carte-pétition (accessibles sur le site udcgt94.fr) et organisons des initiatives d’éducation populaire qui sont prétexte à sensibiliser, lancer le débat et déconstruire cette propagande atlantiste. Beaucoup trop de gens pensent encore que la guerre, ça ne se passe qu’à la télé. Nous savons par expérience ce que signifie la guerre pour chacun des peuples engagés dans un conflit, avec comme seules victimes les populations civiles.
C’est pourquoi nous portons aussi loin que possible les revendications de la sortie de la France de l’Otan et sa dissolution, la fin du détournement de l’argent public pour la fourniture d’armement et l’accueil inconditionnel de tous les réfugiés et déserteurs qui fuient « cette connerie » la guerre.
Propos recueillis par la rédaction d’IO