
Sous assistance respiratoire, Éliane Le Meut, 85 ans, et son fils, qui vit avec elle, doivent s’organiser face à la menace de délestages électriques. Son médecin et son fils n’ont reçu aucune consigne. Reportage à Crac’h (56).
Dans la maison d’Éliane Le Meut, à Crac’h, de longs mètres de tuyaux traversent les pièces. Ils relient l’octogénaire, sous oxygénothérapie permanente depuis deux ans, à deux concentrateurs électriques, l’un au rez-de-chaussée, l’autre à l’étage. La vieille dame est capable de respirer toute seule, jusqu’à plusieurs heures, selon son médecin. Mais cela deviendrait rapidement inconfortable, « au bout de 10 minutes sans oxygène », précise la vieille dame, qui confie que les menaces de coupures d’électricité relayées par la télé, lui « foutent la trouille. Aussitôt qu’il y a un petit problème d’oxygène, je panique. J’ai une infirmière libérale qui passe matin et soir, mais à partir de 18 h 30, elles ne répondent plus, faut se débrouiller ».
« Cela illustre laconfusion »
Au pied de son lit, ce lundi matin, Christian, son fils qui vit avec elle, la rassure. « Quand on a un problème, on appelle Air de Bretagne (le fournisseur du matériel d’assistance respiratoire, NDLR), qui répond 24 h/24. Quand on les alerte, ils passent assez vite ». Après la sortie médiatique de Laurent Méric, le porte-parole d’Enedis, qui affirmait, le 5 décembre, que les patients sous assistance respiratoire à domicile ne seraient pas prioritaires pour le maintien de l’électricité, Christian Le Meut a dû mener sa propre enquête pour savoir quelles mesures prendre, alertant le médecin traitant, qui n’avait reçu aucune consigne officielle. Finalement, Éliane Le Meut n’entre pas dans la catégorie des patients à haut risque vital que sont les enfants sous nutrition parentérale et les gens sous respirateur artificiel. Son fils n’aura donc pas à remplir les formulaires prévus par l’ARS pour être informé à l’avance des coupures, et potentiellement, faire évacuer sa mère à l’hôpital. « Cela illustre la confusion de la situation », souligne-t-il.
En mode « promenade »
À Air de Bretagne, le directeur est rassurant. « Nous fournissons déjà aux patients à risque vital, dès l’appareillage, la procédure leur permettant d’être connus des services de secours et de l’ARS ; et, pour les patients ventilés, des batteries externes dont l’autonomie est bien supérieure à la durée envisagée des délestages (deux heures, NDLR) », rappelle Jean-François Diguet, qui a renouvelé cette information auprès de ses 65 patients à haut risque vital, ces derniers jours.
Quant à ceux sous oxygénothérapie, comme Éliane Le Meut, ils passeraient en mode « promenade ». Elle dispose dans son garage de sept bouteilles d’oxygène pouvant lui assurer au moins 11 heures de respiration, à fixer sur un chariot. « Ce qui m’inquiète, souligne son fils, c’est qu’il faut qu’on soit prévenu pour s’organiser, demander à des proches de venir installer les bouteilles d’oxygène quand je ne suis pas là. Et surtout, comment vont faire les personnes isolées ? ».
Caroline LAFARGUE