Dans l’archipel des Glénan, la disparition des sternes interroge (LT.fr-2/10/22-20h03)

Cette année, la population des sternes caugek est en chute libre dans l’archipel des Glénan. Sur la colonie de l’île aux Moutons, 2 300 couples ont disparu en un an.
Dans l’archipel des Glénan, plus de 2 300 couples de sternes caugek se sont volatilisés en l’espace d’une année. Une brutale disparition qui questionne les spécialistes.

Mais où sont passées les sternes de l’archipel des Glénan (29) ? De 2 775 couples de sternes caugek comptabilisés ? sur l’île aux Moutons, en 2021, ils n’étaient plus que 453 à avoir pondu cette année. Une chute de population inédite pour la deuxième colonie la plus importante de France métropolitaine, qui compte, au total, près 10 000 couples. « Normalement, les sternes arrivent ici, courant mars, et pondent durant la première dizaine du mois de mai. Mais cette année, aucun oiseau n’a pondu durant cette période et il a fallu attendre presque dix jours de plus pour observer des premières pontes », raconte Yann Jacob, chargé de mission naturaliste pour Bretagne Vivante, et responsable du suivi des sternes.

Une disparition soudaine qui ne manque pas d’interroger. « D’autant plus que la population était en augmentation constante depuis une quinzaine d’années. On battait à chaque saison le record du nombre de couples nicheurs », déplore Yann Jacob.

Plusieurs pistes sont avancées par les spécialistes pour expliquer cette année noire. Est notamment dénoncé « un problème de ressource alimentaire », dans le secteur de l’archipel des Glénan. « Les sternes caugek sont très grégaires et elles ont tendance à aller sur d’autres colonies existantes, en cas de pépin », explique le salarié de Bretagne Vivante.

La colonie de sternes de l’île aux Moutons est normalement la deuxième plus importante de France métropolitaine.
La colonie de sternes de l’île aux Moutons est normalement la deuxième plus importante de France métropolitaine. (Bruno Ferré/Bretagne vivante)

Un déménagement vers d’autres colonies

Pour étayer cette thèse, les spécialistes s’appuient sur les observations effectuées sur une autre colonie : celle du Platier d’Oye, réserve naturelle nationale située en bord de mer dans le Pas-de-Calais. « Ce site qui comptait 950 couples, en 2021, en a accueilli plus de 3 000, cette année ! On a donc de fortes suspicions que les sternes des Moutons soient allées s’installer dans le nord de la France », avance Yann Jacob.

Problème : le Platier d’Oye a été gravement touché par la grippe aviaire, avec plusieurs milliers de sternes retrouvées mortes, ces dernières semaines. Une mortalité qui n’a, au contraire, pas été observée sur les espèces restées en Bretagne, contrairement aux fous de Bassan et aux goélands.

Les goélands en cause ?

Ces derniers sont d’ailleurs mis au banc des accusés par les environnementalistes. « Depuis deux ou trois ans, on voit que des goélands se sont spécialisés dans la prédation des œufs de sternes. En cas de gros stress, elles peuvent donc aussi déménager sur d’autres sites », précise le chargé de mission. Car là aussi, des arrivées inédites de laridés ont été enregistrées sur d’autres colonies bretonnes. Sur la petite île d’Iniz er mour, proche de la Ria d’Etel (56), 500 couples ont été comptabilisés, en 2022. ?Sur l’île de La Colombière, à Saint-Jacut-de-la-Mer (22), ils étaient 300 cette saison contre une vingtaine habituellement. « On peut donc conclure qu’elles viennent probablement de l’île aux Moutons », en déduit le spécialiste.

Un report de population paradoxalement considéré comme « une bonne nouvelle » par l’association : « La concentration de 80 % des sternes nichant en Bretagne, sur la seule île aux Moutons dans le Finistère, rend l’espèce vulnérable aux aléas, dont la prédation fait partie, et peut mettre en péril le maintien de l’espèce en Bretagne ». Les multiples sites de nidification permettent donc « de maximiser les chances de succès des nichées », précise la structure.

Désormais en route vers sa zone d’hivernage en Afrique de l’Ouest, la sterne caugek sera-t-elle de retour aux Glénan, au printemps prochain ? « On verra bien, et il faudra surtout voir combien s’en sortiront de la grippe aviaire », appréhende Yann Jacob.

Guirec FLECHER

source: https://www.letelegramme.fr/finistere/fouesnant/dans-l-archipel-des-glenan-la-disparition-des-sternes-interroge-02-10-2022-13191333.php

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