Didier Gadéa (Modef) : « Ils dérégulent, ils spéculent et nous, on paye ! » ( IO.fr-25/01/34)

L’accès à la ville d’Albi (Tarn) bloqué par les agriculteurs, le 23 janvier (Photo AFP).

La parole à Didier Gadéa, secrétaire général du Modef national (Mouvement de défense des exploitants familiaux).

Un entretien d’Informations Ouvrières avec Didier Gadéa, Secrétaire général du MODEF.

Qu’en est-il en est de l’état de la mobilisation des agriculteurs en France ?

Didier Gadéa : En juillet 2015, il y avait eu une révolte qui était partie de la base des éleveurs. La FNSEA avait « arraché » non pas des prix libres mais des emprunts à hauteur de 3 milliards. Donc les agriculteurs ont emprunté et se sont encore plus endettés.

Là c’est encore une autre situation car c’est la FNSEA et les Jeunes agriculteurs (JA) qui ont lancé la mobilisation. Ils ont dit « ça suffit maintenant, le gazole non routier (GNR) pas question » parce que la taxe les ampute jusqu’à 10 000 euros par exploitation.
À mon avis, c’est une manœuvre qu’a lancée la FNSEA pour les élections professionnelles mais le problème c’est que quand tu sors le dentifrice du tube, c’est compliqué de le faire rentrer.

Ils sont en train de se faire taper sur les doigts par les agriculteurs car ces derniers ont appris que c’est la FNSEA qui a négocié le GNR avec le ministre Bruno Le Maire, le même qui avait supprimé les quotas laitiers en 2015…

Le prix de la viande bovine s’effondre ; il y a des nouveaux traités qui viennent d’être signés notamment avec la Nouvelle-Zélande pour importer de la viande ovine, du miel, du lait, ce qui va encore aggraver la pression des prix vers le bas ; il y a des retards de paiement de la part de l’État notamment pour les aides environnementales donc on est obligés d’aller emprunter à 6,5 %. C’est une situation catastrophique, mais elle n’est pas nouvelle.

Mais aujourd’hui, vu que tout est en train de s’effondrer – nous aussi on va faire nos courses, le plein de la voiture, on paye l’électricité – tout ça se surajoute. Ce dont la FNSEA a peur aujourd’hui, c’est qu’il y ait une convergence.

Si jamais les artisans, les commerçants, les travaux publics, les routiers, déboulent sur nos ronds-points, ils savent que là c’est danger ! Ils ont été reçus par le Premier ministre hier soir, il n’en est pas sorti grand-chose.

Quelles sont les revendications ?

D. G. : Depuis des années, dans les organisations professionnelles qui sont dirigées par la FNSEA, ils ont évacué des discussions dans les assemblées générales et dans les réunions la question du prix. On va te parler de primes, de qualité, de bureaucratie, qu’il y a trop de papiers à remplir – ce qui est vrai par ailleurs – mais le prix a été évacué car c’est le nerf de la guerre.

Nous, on a une revendication modeste qui est « prix plancher fixé et garanti par l’État ». Ça va à l’encontre de tout ce qui est proposé y compris à EGAlim (loi de 2021) qui ne marche pas parce que c’est cadré dans la concurrence libre et non faussée.

Mais il ne suffit pas de dire « les prix ».

C’est là que ça vient se heurter à la concurrence libre et non faussée puisque nous, justement, avec les prix garantis par l’État, c’est le contraire qu’on veut : on veut que l’État intervienne. On veut aussi les quotients multiplicateurs pour les marges.

Par exemple, mon litre de merlot, on me le paye 60 centimes la bouteille de 75 cl et je le retrouve à Leclerc, à seulement 6 km de chez moi, à 9 euros. Pareil pour tout, la viande, le pain… etc.

C’est la même problématique politique que l’énergie.

En appliquant leur politique de dérégulation et en permettant la spéculation, les intermédiaires se gavent. Les intermédiaires de l’agroalimentaire se gavent, tout comme les intermédiaires du pétrole ou de l’électricité. C’est la même politique : ils dérégulent, ils spéculent et nous, on paye !

Source: https://infos-ouvrieres.fr/2024/01/25/didier-gadea-modef-ils-deregulent-ils-speculent-et-nous-on-paye/

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