Alors que le camping de Kerolland, situé à Beg-Meil à Fouesnant (Finistère), a été racheté par le groupe immobilier Giboire, des propriétaires de mobil-homes ont été sommés de partir. Ce samedi 6 avril 2024, un apéro citoyen de soutien a eu lieu au camping, réunissant une centaine de personnes. Les campeurs, partagés entre colère, détresse et amertume, témoignent.
Par Hugo DESHORS.
« C’était un petit paradis pour nous, c’est devenu l’enfer. » Martial et Maryvonne Youinou ont acheté, à la fin du mois de juin 2023, un mobil-home de 21 m² au camping de Kerolland, situé à Beg-Meil, à Fouesnant (Finistère). Le coût : 10 000 €. « C’est un investissement important pour nous », reconnaît Martial Youinou qui a, de surcroît, réalisé des travaux.
« On nous a coupé l’eau et l’électricité »
Pour ces habitants de Logonna-Daoulas, « c’était pratique. Nous avons choisi ce camping et ce mobil-home pour nos cinq enfants et nos sept petits-enfants. Il y a la plage juste à côté. Ça nous faisait un pied à terre ».
Mais le camping va fermer. Une annonce faite par le groupe Giboire, promoteur à Rennes (Ille-et-Vilaine) et nouveau propriétaire du foncier de 3 hectares. À l’instar des autres propriétaires de mobil-homes à Kerolland (70 emplacements en tout), le couple a jusqu’à la fin de l’année 2024 pour quitter les lieux.
« Nous avons reçu un courrier au mois de mars nous disant qu’il fallait dégager les mobil-homes, déplore Maryvonne Youinou. Pourtant, deux mois avant, début janvier, on a reçu un courrier du groupe Giboire nous disant qu’on allait être conservé pendant deux ans sans réserve. Et juste après, on avance l’argument que le camping ne serait plus aux normes. On ne comprend plus. »
Pire, ils ont « l’impression d’avoir été trompés. On se sent volé, escroqué. Dernièrement, on nous a coupé l’eau et l’électricité ».
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De son côté, le groupe immobilier invoque, dans une lettre, une fermeture car « les tests de conformité technique remettent en cause la sécurité du site, et que l’état d’usage apparent des infrastructures a été infirmé ». « Mais nous n’avons aucune preuve de cette non-conformité ! » s’étonne le couple.
« On a trahi les petits-enfants »
Ce samedi 6 avril, un apéro citoyen de soutien a eu lieu, sur place, aux alentours de 11 h, et avec une centaine de personnes rassemblées. Une manifestation organisée par le Collectif des usagers du camping de Kerolland (CDUCK) qui compte 347 membres.
« Merci à tous d’être présents pour nous soutenir, a déclaré, ému, Paul Savary, Brestois propriétaire depuis plusieurs années d’un mobil-home et porte-parole du collectif. Tout ceci montre qu’il n’y a aucune humanité. Nous, la classe moyenne, devons virer au profit des riches. Pourtant, on a fait vivre cette commune pendant des dizaines d’années et avec nos économies ! »
La pilule ne passe pas. « On nous a promis de maintenir l’activité dans les deux ans qui viennent, alors que c’est tout l’inverse. Il n’y a que l’argent qui compte, c’est triste. On a trahi les grands-parents, les petits-enfants. »
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Lancée il y a quelques semaines, une pétition dépasse aujourd’hui les 8 200 signatures. Une association a été créée, le Collectif des usagers du camping de Kerolland (CDUCK). Les propriétaires ne veulent certainement pas en rester là. « S’il faut aller jusqu’au bout, nous irons, martèle l’un d’eux. Peu importe la bataille judiciaire, nous prendrons des avocats. Nous voulons faire respecter nos droits. »
Des retraités séniles ? « Certainement pas ! »
Martial et Maryvonne Youinou ne décolèrent pas : « Ils pensent avoir affaire à des retraités séniles ? Certainement pas ! Nous nous battrons. » Paul Savary opine du chef : « On n’est pas décidé à se laisser faire. On n’a réellement rien à perdre. On est soutenu par les habitants. On ne lâchera rien. »
Ont-ils d’autres solutions ? « Nous n’avons pas prospecté ailleurs, confie Maryvonne Youinou. Mais dans tous les campings, ce doit être la même chose : ils ne veulent plus des campeurs aujourd’hui, ils veulent du foncier. »
Martial Youinou s’inquiète forcément de l’avenir de son mobil-home, s’ils n’obtiennent pas gain de cause. « Si on doit partir et qu’on ne trouve aucun endroit, je le fous à la poubelle ? » Et en plus, « plusieurs propriétaires ont aussi des bateaux à Fouesnant. On fait quoi si on ne peut plus venir ici ? »
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