En Bretagne, l’incompréhension de ces enseignantes sans affectation. ( LT.fr – 13/09/22 – 17h48 )

Plusieurs enseignantes bretonnes formées se retrouvent sans affectation pour cette rentrée 2022.
Plusieurs enseignantes bretonnes formées se retrouvent sans affectation pour cette rentrée 2022. (Le Télégramme)

Admises au concours de professeurs des écoles sur liste complémentaire, ces jeunes enseignantes bretonnes vivent difficilement l’incertitude autour de leur titularisation.

Il ne lui a manqué que sept points sur 180 pour être lauréate du Concours de Recrutement des Professeurs des écoles cette année. Mais comme plus de 1 200 autres étudiants en France, Chloé a eu la surprise d’apprendre avant l’été qu’elle était finalement admise sur liste complémentaire. Ce dispositif permet aux académies de bénéficier d’une réserve d’enseignants formés afin de remplacer au pied levé des candidats admis qui se désisteraient.

Jeune étudiante professeur, Chloé n’est pas sûr d’obtenir un poste au sein de l’académie de Rennes malgré avoir été admise au concours.
Jeune étudiante professeur, Chloé n’est pas sûr d’obtenir un poste au sein de l’académie de Rennes malgré avoir été admise au concours.

Pour l’enseignante rennaise de 26 ans, cet espoir s’est rapidement transformé en un nuage d’incertitudes. « Je suis classée 24e sur la liste complémentaire du public dans l’académie de Rennes », explique Chloé. « Avec la pénurie d’enseignants, je me suis dit que ça allait le faire, mais je suis toujours sans nouvelles. On ne peut rien faire, c’est frustrant et énervant d’attendre ».

Job alimentaire

En Bretagne, une grosse vingtaine d’étudiants professeurs admis sur liste complémentaire ont été appelés pour le moment, sans pour autant avoir systématiquement accepté l’affectation proposée – notamment dans le cas où celle-ci se trouvait trop loin géographiquement. Si on ne lui propose rien, Chloé devra retenter le concours en avril 2023. En attendant, elle pense prendre un job alimentaire dans les prochaines semaines. « Il me faut quand même un emploi pour vivre. Je ne sais vraiment pas quoi faire ».

J’ai dû retourner vivre chez mes parents

Si certaines académies ont déjà appelé l’ensemble des étudiants admis sur leur liste complémentaire, la situation est plus compliquée dans l’académie de Rennes où environ 30 personnes restent toujours sur le carreau. « C’est très bloquant », se désole Blandine, jeune morlaisienne de 23 ans également dans ce cas. « Comme je n’ai pas de revenus, j’ai même dû retourner vivre chez mes parents. Je suis prête mais on ne me propose rien… C’est compliqué de ne pas savoir de quoi demain sera fait. Par exemple, je ne peux pas payer pour commencer une formation à la préparation au concours de l’année prochaine vu que ma situation peut évoluer demain ».

Blandine a été admise en 43e position sur la liste complémentaire du public de l’académie de Rennes.
Blandine a été admise en 43e position sur la liste complémentaire du public de l’académie de Rennes.

Des contraintes budgétaires

Dans le privé, le problème est quasiment le même. Si la liste est réduite, elle ne garantit pas pour autant d’être appelée plus facilement. Isabelle* qui s’est retrouvée parmi cette sélection dénonce les « travers de ce système ». « Il est plus facile d’embaucher des contractuels que de titulariser des “liste complémentaire” », déplore l’enseignante. « On nous prend, on nous jette car on coûte moins cher ».

On nous prend, on nous jette, on coûte moins cher

Selon le syndicat SNUipp-FSU 35, la problématique est surtout budgétaire du côté de l’académie. « Il y a aujourd’hui largement assez de besoins pour embaucher toutes les personnes présentes sur liste complémentaire en Bretagne, mais l’académie de Rennes n’a pu créer que 11 équivalents temps plein jusque-là, ce qui est loin d’être suffisant », précise Emmanuelle Maray, secrétaire départementale du syndicat. Contactée, l’académie de Rennes n’a pas encore répondu à notre sollicitation.

Faux espoir

« On réclame le recrutement jusqu’à épuisement de la liste complémentaire avant le recrutement de contractuels », poursuit la représentante du SNUipp-FSU 35. « Cela nécessite de créer des postes. Ces étudiants enseignants pourraient par exemple intégrer le vivier des remplaçants qui a fortement diminué et qui risque de souffrir sur l’année scolaire à venir. C’est un travail de négociation que doit mener le recteur avec le Ministère de l’éducation nationale ». L’année passée, chaque personne présente sur la liste complémentaire de l’académie de Rennes avait été embauchée, mais celle-ci ne comptait que 10 éléments.

Maëlle a été admise sur la liste complémentaire du privé dans l’académie de Rennes. Elle dénonce des « faux espoirs » pour de nombreux étudiants professeurs dans son cas.
Maëlle a été admise sur la liste complémentaire du privé dans l’académie de Rennes. Elle dénonce des « faux espoirs » pour de nombreux étudiants professeurs dans son cas.

Pour les jeunes étudiants finalement non appelés, la situation n’est pas toujours facile à digérer psychologiquement. « Là, j’ai vraiment perdu espoir qu’on m’appelle pour un poste », confie Maëlle, étudiante professeur à Brest. « Ça aura fait plus de mal que de bien d’être sur liste complémentaire. J’aurai préféré directement savoir que je n’avais pas le concours, ça m’aurait permis de m’inscrire pour faire des remplacements ». Le manque de communication de l’Éducation nationale sur le sujet semble également avoir pesé sur le moral de ces étudiants.

* Prénom d’emprunt.

Source : En Bretagne, l’incompréhension de ces enseignantes sans affectation – Rennes – Le Télégramme (letelegramme.fr)

Auteur : Quentin Ruaux

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