En finir avec la visite médicale-billet d’humeur du Dr Christophe Prudhomme (FB-8/04/24)

La Haute autorité de santé (HAS) a publié récemment un rapport concernant les interactions entre les professionnels de santé et les firmes pharmaceutiques, via notamment la visite médicale. La conclusion est que l’exposition des professionnels de santé à ces interactions débute lors de leurs études et se poursuit de manière constante pendant toute leur activité. Les autres éléments importants pointés dans ce rapport sont que l’information transmise lors de la visite médicale est de mauvaise qualité et que les professionnels de santé manquent d’esprit critique et de formation pour discerner les influences sur leur pratique. Ce qui est encore plus inquiétant est qu’il est considéré que les diverses tentatives de régulation mises en place dans certains pays pour limiter les conséquences négatives sur les soins n’ont pas été concluantes jusque-là.

Une spécificité pour la France concerne la remise d’échantillons de médicaments qui est normalement interdite depuis 2004 dans le cadre de la visite médicale, mais qui semble ne pas avoir complètement disparu. Les médecins ne sont pas les seuls concernés et l’ancienne ministre de la santé, Agnès Firmin-Lobodo, pharmacienne de métier aurait reçu plus de 20 000 euros de cadeaux du laboratoire URGO. Mais aujourd’hui, les laboratoires portent leurs efforts sur l’hôpital avec la mise sur le marché de médicaments de plus en plus spécialisés (et de plus en plus chers !) et l’instauration des traitements à l’hôpital avant la sortie des patients en ville. Par ailleurs, les spécialistes hospitaliers sont particulièrement ciblés en tant que leaders d’opinion dont les avis sont particulièrement suivis par les prescripteurs tant à l’hôpital qu’en ville.

Plus inquiétant est le fait que la visite d’un délégué de l’assurance maladie comme cela se fait aujourd’hui parvient à avoir un effet positif sur les prescriptions lors de campagnes ponctuelles mais ne contre pas sur le long cours les effets de la visite médicale organisée par les laboratoires pharmaceutiques. Ce qui semble le plus efficace sont les formations à l’indépendance mises en œuvre depuis quelques années dans les facultés de médecine. Il s’agit par exemple de la formation à l’analyse critique de la promotion pharmaceutique qui est devenue obligatoire pour tous les futurs médecins généralistes depuis 2019 à l’université de Bordeaux. Ces formations sont d’autant plus importantes, qu’au-delà de la visite, l’industrie pharmaceutique influence fortement les professionnels de santé par le biais de la publicité qui finance la quasi-totalité des revues ainsi que les congrès médicaux.

Il est donc urgent de supprimer définitivement la visite médicale pour la remplacer par une vraie formation, tant initiale que continue, à l’analyse critique des informations fournies par l’industrie du médicament. A cela s’ajoute la nécessité de limiter par la loi le volume des dépenses publicitaires qui représentent toujours près de 25 % du chiffre d’affaires des firmes, soit plus que ce qu’elles consacrent à la recherche.

Dr Christophe Prudhomme

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Source: https://www.facebook.com/christopheprudhomme93/posts/pfbid02uKQnbY9ntPAVHgzrNh2nzVtJ4brBGbSiCAwwbcirna8o4Quah5WWLuQMjiaQUFzel

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