ENTRETIEN. Face à la crise du logement en Bretagne, ce collectif de Saint-Malo veut « faire vite » ( OF.fr – 07/01/23 )

Franck Rolland, cofondateur et porte-parole du collectif Saint-Malo, j’y vis… J’y reste !

Franck Rolland, cofondateur et porte-parole du collectif Saint-Malo, j’y vis… J’y reste ! 

Le collectif Saint-Malo, j’y vis… J’y reste ! a été parmi les premiers en Bretagne à s’opposer aux « dérives » et aux « excès » des plateformes de location de meublés de tourisme type Airbnb, à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine). Franck Rolland, son porte-parole, appelle le conseil régional à « agir vite » face à « la crise du logement qui s’accentue en Bretagne ».


Le collectif Saint-Malo, j’y vis… J’y reste ! a été parmi les premiers en Bretagne à s’opposer aux « dérives » et aux « excès » des plateformes de location de meublés de tourisme type Airbnb, à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine). En 2019, la ville détenait le record de France des locations de courte durée avec 636 nuitées pour 100 habitants. Depuis 2021, elle impose notamment des quotas de meublés de tourisme par quartier (pas plus de 12,5 % des logements dans la vieille ville, par exemple). Une première en Bretagne, qui fait l’objet d’un recours non suspensif devant le tribunal administratif de Rennes, de la part d’une dizaine de propriétaires.

Franck Rolland, cofondateur et porte-parole du collectif, explique les conséquences de cette réglementation et appelle le conseil régional à « agir vite » face à « la crise du logement qui s’accentue en Bretagne ».

En quoi les plateformes de type Airbnb sont-elles responsables de la crise du logement bretonne ?

En 2020, on comptait 38 000 locations de courte durée en Bretagne. En 2022, il y en a 46 000. Avant, on quittait la Bretagne parce qu’il n’y avait pas d’emplois. Maintenant, on en part parce qu’il n’y a pas de logement. Avec Airbnb, la crise du logement touche la classe intermédiaire, des gens qui ne peuvent pas prétendre à des logements HLM et qui sont obligés de quitter le littoral ou d’acheter plus petit. C’est tout bête mais un logement loué par Airbnb, c’est un logement en moins pour des gens qui habitent à l’année.

Cette massification touristique, la Bretagne ne l’a pas vue ou n’a pas voulu la voir venir. ​Le phénomène Airbnb a été très juteux, mais il y a désormais un frein. Après dix ans de spéculation immobilière, toutes les jurisprudences montrent que devant la justice, la majorité des plaignants contre Airbnb a gagné.

« Sur le papier, cette réglementation est efficace »

Affluence dans la vieille ville de Saint-Malo, en début de saison 2022. En 2019, la ville détenait le record de France des locations de courte durée avec 636 nuitées pour 100 habitants. | VINCENT MICHEL / ARCHIVES OUEST-FRANCE

Dans une tribune signée par 38 particuliers, élus et associations, votre collectif « considère qu’il est possible d’augmenter très rapidement la part du logement disponible pour des habitants à l’année en réduisant prioritairement le nombre de locations de courte durée appartenant à des multipropriétaires et des sociétés civiles immobilières » . L’exemple de Saint-Malo doit-il être dupliqué ?

À Saint-Malo, on peut considérer qu’avec cette réglementation, 400 logements reviennent en location à l’année, soit une capacité d’accueil de 1 000 habitants en plus. Sur le papier, elle est efficace. Nous considérions qu’il fallait deux personnes pour contrôler. La Ville de Saint-Malo a recruté une personne. C’est déjà bien. Il faut rappeler que les contrevenants s’exposent à 50 000 € d’amende par fait constaté.

La nouvelle réglementation a-t-elle eu d’autres conséquences ?

Les autorisations de changement d’usage […] délivrées pour trois ans en 2020 vont être renouvelées en 2023. Les gens, qui possédaient six à sept appartements loués en meublés de tourisme, ne pourront plus continuer. Certains ont commencé à vendre à Saint-Malo pour acheter à Dinard où il n’y a pas de réglementation. Nous en souhaitons une à l’échelle intercommunale. Cela se pratique ailleurs, dans le pays basque par exemple.

« L’obligation d’enregistrement, c’est de l’esbroufe de communication »

Dans la vieille ville de Saint-Malo, la municipalité limite désormais à 12,5 % des logements le nombre de locations de tourisme de courte durée. | MARC OLLIVIER/ ARCHIVES OUEST-FRANCE

La réglementation adoptée à Saint-Malo est-elle suffisante selon vous ?

Quand vous faites une déclaration de changement d’usage, on vous demande une attestation sur l’honneur stipulant que rien ne s’oppose à ce que votre appartement soit mis en location Airbnb. Nous souhaitons qu’il y ait une obligation de fournir le compte rendu d’assemblée générale des copropriétaires attestant que l’ensemble des copropriétaires est d’accord pour que le logement soit loué en meublé de tourisme.

En 2023, on va avoir des effets très concrets : il y aura des gens qui ne seront pas d’accord pour que certains appartements soient mis en location de courte durée. Il y aura des contrôles. Et si la Ville ne demande pas le procès-verbal des assemblées générales, il y aura des recours.

En Bretagne, certaines villes, comme Vannes ou Lorient, veulent réglementer les locations de courte durée…

L’obligation d’enregistrement, c’est du pipeau, de l’esbroufe de communication. Elle n’a aucune utilité s’il n’y a pas d’obligation de déclarer le changement d’usage du logement et si la Ville ne met pas en place des quotas comme à Saint-Malo ou des compensations comme à Paris ( mise en place de la même surface que le logement loué ou de la même somme pour une location à l’année).

Comment régler la crise du logement en Bretagne et mieux réguler les locations de courte durée ?

Aujourd’hui, les outils sont là, simples et concrets. Un maire ne peut plus dire « on ne peut rien faire ». Et pour faire avancer les choses, la Région peut faire de l’ingénierie pour les communes. Il faut faire vite. Il faut des décisions rapides et concrètes.

Auteur : Laetitia JACQ-GALDEANO.

Source : ENTRETIEN. Face à la crise du logement en Bretagne, ce collectif de Saint-Malo veut « faire vite » (ouest-france.fr)

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