Famine, guerre civile… Cette Finistérienne raconte ses missions avec Médecins sans frontières(OF.fr-9/09/22-8h01)

Catherine Thomas a rejoint Médecins sans frontières en 1986. Elle était en République démocratique du Congo en avril 2022

Entre 1986 et 1991, et depuis 2020, Catherine Thomas a accompli de nombreuses missions au sein de Médecins sans frontières. Anesthésiste à l’hôpital de Quimper (Finistère), elle est notamment partie en République démocratique du Congo en mars 2022. Rencontre.

« Quand on revient en France, on se dit : “Comment, avec tous les moyens qu’on a, tout n’est pas impeccable ?” » Médecin anesthésiste à l’hôpital de Quimper (Finistère), Catherine Thomas a effectué de nombreuses missions pour Médecins sans frontières (MSF). Elle raconte ses actions dans les pays en guerre ou dont l’accès aux soins est difficile.

Son histoire au sein de cette organisation non gouvernementale (ONG) se découpe en deux parties. Elle effectue sa première mission au Sri Lanka en 1986, avant de partir en Somalie puis en ex-Yougoslavie, en proie à la guerre. Là-bas, sa mission est interrompue à la suite d’un attentat dans la ville de Vukovar (Croatie), qui blesse grièvement deux infirmières de MSF.

« Un convoi humanitaire avait été victime d’une mine posée, se souvient-elle. Il n’y a pas eu de mort, mais la mission a été arrêtée. J’ai dû conduire les deux femmes à l’hôpital militaire à proximité, puis à Belgrade. »

« Ça marque »

À cette époque, MSF n’a pas encore mis en place de soutien psychologique. « Mais Rony Brauman, le président de MSF de l’époque, était venu nous chercher à l’aéroport. »

L’événement l’éloigne de l’humanitaire pendant presque trente ans. « Ça marque un peu. Pendant un moment, dès que je voyais un truc sur la route, je faisais un bond ! Mais ça ne m’a pas empêchée de repartir plusieurs années après. »

En 2020, elle décide de rejoindre à nouveau MSF pour une mission au Tchad. L’année suivante, elle part en République démocratique du Congo (RDC). Elle y retourne en mars 2022. Sa dernière mission.

Catherine Thomas entourée de ses partenaires de la mission au Congo.

Depuis plus de vingt ans, le pays africain est confrontée à une guerre civile. « La situation est complexe, les alliances changent tout le temps. Même sur place, c’est compliqué à comprendre », reconnaît-elle.

Des kidnappings

Elle est alors témoin des conséquences du conflit : l’extrême pauvreté et, surtout, la famine. « C’est un énorme pays, très luxuriant, avec des ressources importantes. Malgré ça, il y a une malnutrition généralisée et les enfants meurent de faim. » L’une des raisons : « Il y a de nombreux kidnappings, pour réclamer des rançons. » Les membres de MSF reçoivent d’ailleurs « un briefing sur le kidnapping » avant leur mission.

Au sein de l’ONG, elle effectue d’abord une mission chirurgicale, pour soutenir les dispensaires, au nord de Rutshuru. Là-bas, aucune aide-soignante : « Ce sont les familles qui s’occupent des malades, les habillent, font leur toilette… »

Un enfant de 10 ans pesant 10 kg

Elle aide par ailleurs au centre de nutrition, sur lequel pèse un travail énorme. « Les enfants sont très maigres. Je me souviens avoir pris en charge un enfant de 10 ans qui pesait 10 kilogrammes. C’est vraiment comme les photos choc qu’on peut voir. Mais y être confronté, en vrai… C’est le pire que j’ai pu observer. » Elle explique que cet enfant ne pouvait même pas être anesthésié. « Ça l’aurait tué, il fallait d’abord le requinquer. »

La mortalité infantile y est énorme. Beaucoup meurent de la rougeole, avant 5 ans. « Comme ils sont mal nourris, ils se défendent moins bien. » MSF a réalisé une grande campagne de vaccination contre cette maladie, en plus du Covid-19.

La mission de Catherine Thomas prend brusquement fin, à peine un mois après son arrivée, lorsqu’un hélicoptère de l’ONU est abattu. « Déjà que l’ambassadeur d’Italie avait été assassiné en février. Cette fois, huit Casques bleus pakistanais sont morts. » Elle reçoit alors un coup de fil du chef de mission : « Il faut rentrer, ça chauffe. » Sur le chemin vers l’aéroport, elle est témoin d’une scène étonnante : un exode de femmes, « avec des matelas sur la tête ».

Romain LE BRIS

source: https://www.ouest-france.fr/associations/benevole/famine-guerre-civile-cette-finisterienne-raconte-ses-missions-avec-medecins-sans-frontieres-3358ab88-286a-11ed-aeed-4db6457d6e49

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